DOM : Guyane
Question de :
Mme Christiane Taubira
Guyane (1re circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 23 octobre 1997
M. le président. La parole est à Mme Christiane Taubira-Delannon.
Mme Christiane Taubira-Delannon. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, le bilan de rentrée est un exercice convenu qui donne lieu à des déclarations et à des communiqués de satisfecit de la part de l'administration, de réserve ou d'alerte sérieuse de la part des syndicats, et de vigilance critique de la part des parents d'élèves.
Chacun a probablement un peu raison, à cette nuance près que cette année a été marquée par la mise en place du rectorat en Guyane, par les premiers effets du plan de rattrapage en deux ans, par les efforts que votre ministère a consentis pour les personnels enseignant, médical et ATOSS, mais également aussi par des rentrées scolaires différées dans des communes rurales et dans des établissements urbains.
Vous avez probablement été informés des remous qui secouent actuellement le collège de Kourou et de la situation alarmante de Maripasoula. Ils prouvent que, lorsque l'école se défait, c'est le tissu social qui se démaille.
La situation est aggravée par la très forte pression d'une population scolaire, que personne ne sait encore évaluer.
Mais plutôt que de détailler les efforts de votre ministère et les carences qui restent encore à combler, je vous propose de nous attacher aux urgences.
La première a trait à la méthode: il faudrait cesser de travailler et de réagir dans l'urgence.
La seconde concerne le fond: il faudrait assurer l'accès égalitaire à l'enseignement sur l'ensemble du territoire.
Pour ce faire, on peut emprunter un certain nombre de pistes.
Il conviendrait d'abord de dresser un état des lieux humain et logistique; ensuite, de régler les questions en suspens relatives au statut de l'IUFM et de l'université, et de stimuler les conceptions de méthodes pédagogiques adaptées à la situation de multiculturalité et de plurilinguisme; enfin, de réorienter les filières d'enseignement scolaire, supérieur et secondaire.
Je suggère, monsieur le ministre, que l'on prenne en considération le fait que, sur le terrain, les conditions sont réunies pour mettre en place un pôle d'excellence.
Le réseau de recherche qui accumule du savoir, peut-être trop orienté vers l'ingénierie internationale, le réseau de grands établissements technologiques qui accumulent des savoir-faire, tels que EDF et le centre spatial guyanais, sont des conditions de mise en place de ce pôle d'excellence. La transversalité de votre ministère ne peut que constituer une garantie à cet égard.
Mais il faut évidemment une politique volontariste, c'est-à-dire à la fois des perspectives et de la durée.
Pourriez-vous accueillir favorablement l'idée d'un engagement pluriannuel de l'Etat concernant l'éducation en Guyane ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, sur de nombreux bancs du groupe communiste et sur divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Madame la députée, il est parfaitement exact que la scolarisation en Guyane et, plus généralement, dans les départements et territoires d'outre-mer, appelle un effort particulier de rattrapage.
A la suite des événements qui se sont produits en Guyane, le précédent gouvernement avait déjà prévu un plan, que nous avons poursuivi et même amplifié. Cela s'est traduit par la création de 110 classes nouvelles et de 50 logements de professeurs, par un effort budgétaire de 66 millions de francs pour l'enseignement primaire et de près de 200 millions pour l'enseignement secondaire. Nous avons modifié par ailleurs les conditions d'aide de l'Etat aux constructions puisque, par exception à la loi normale, si je puis dire, l'Etat peut participer à hauteur de 80 % et même de 100 % à la construction des écoles dans les communes rurales.
Nous comptons proposer d'ici à quelques semaines un plan pluriannuel de développement spécifique aux départements d'outre-mer. Ce plan prévoira un certain nombre d'efforts au niveau quantitatif. Il comportera également des mesures tendant à ce que la citoyenneté puisse se développer en tenant compte des spécificités culturelles de chaque département d'outre-mer.
J'ai donc bien reçu votre message.
Quant à la recherche, il est parfaitement exact, eu égard notamment à la présence du centre spatial de Kourou, que nous étudions la possibilité de développer une formation technologique en Guyane, qui soit associée à l'activité spatiale.
Soyez donc assurée, madame la députée, que nous portons toute l'attention qui est nécessaire aux départements d'outre-mer. Il faut reconnaître que cette attention n'a pas toujours été du niveau qui s'imposait. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
Auteur : Mme Christiane Taubira
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : éducation nationale, recherche et technologie
Ministère répondant : éducation nationale, recherche et technologie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 octobre 1997