Question au Gouvernement n° 1066 :
délinquance

11e Législature

Question de : M. Christian Estrosi
Alpes-Maritimes (5e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 27 janvier 1999

M. le président. La parole est à M. Christian Estrosi.
M. Christian Estrosi. Dans le prolongement des questions de mes excellents collègues Warsmann et Mathieu-Obadia, ma question s'adresse à Mme la garde des sceaux.
La sécurité semble, depuis quelques jours, être une priorité pour le Premier ministre. C'est nouveau, et il était temps. Il était temps au regard de son bilan catastrophique depuis 1997. («Tout à fait !» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) En effet, les chiffres d'un rapport des renseignements généraux démontrent une véritable explosion de l'insécurité en 1998.
M. Eric Doligé. Voilà !
M. Christian Estrosi. Près de 60 % d'augmentation de la délinquance urbaine entre 1997 et 1998, 26 000 actes de violence, 8 000 voitures incendiées, 2 300 actes de violence par jets de pierre. Ces chiffres, dissimulés jusqu'alors, démontrent que notre pays se transforme peu à peu en zone de non-droit. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Yves Fromion. C'est le bilan socialiste ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Christian Estrosi. Madame la ministre, dans le même temps, vous nous affirmez que la justice a les moyens de faire face à l'augmentation de la délinquance et notamment celle des mineurs. Mais nous voyons tous les jours sur le terrain des tribunaux d'instance fermés, des postes de magistrats titulaires non remplacés, en tout cas pendant plusieurs mois. Cela n'est plus acceptable.
Le RPR, d'ailleurs, a fait des propositions pour éviter cette spirale contre la peur: degré de tolérance «zéro», allocations familiales à points, responsabilisation des familles et des parents et comparutions immédiates. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Dans ce contexte, bien évidemment, nous avons approuvé les propositions courageuses et fermes de M. le ministre de l'intérieur pour lutter contre les «sauvageons», propositions qui reprennent quelques-unes de nos solutions: suppression des allocations familiales pour les familles de délinquants, éloignement des jeunes des cités où ils provoquent des ravages, création de centres de rétention pour les jeunes délinquants.
Madame la ministre, vous avez émis des réserves et des critiques contre ces propositions, en indiquant que le traitement de la délinquance des mineurs relevait de votre compétence et non de celle de Jean-Pierre Chevènement. Approuvez-vous, sur le fond, oui ou non, les propositions formulées par Jean-Pierre Chevènement ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la République, et du groupe Démocrate libérale et Indépendants et sur divers bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, avec la finesse qui vous caractérise (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert), vous venez d'essayer d'enfoncer un coin, bien hypothétique, entre Jean-Pierre Chevènement et moi, et à l'intérieur du Gouvernement. Sachez que le Gouvernement est uni sur l'analyse qu'il fait de la délinquance des mineurs. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Allaince et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Sachez que le Gouvernement n'a qu'une idée en tête: obtenir des résultats meilleurs en tout cas que ceux que vous avez obtenus de votre côté. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Sachez aussi que, lorsque je suis arrivée place Vendôme («Encore !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République), j'ai constaté que le budget de la justice était l'un de ceux qui avaient le plus souffert par la volonté des gouvernements que vous avez soutenus et qui s'étaient fait une religion de la baisse des dépenses publiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. Jean-Louis Debré. Ce n'est pas vrai !
Mme la garde des sceaux. J'ai alors découvert qu'on avait gelé le recrutement des magistrats et des fonctionnaires. La première décision budgétaire qu'a prise le Premier ministre fut d'ailleurs d'exonérer le ministère de la justice, et lui seul, du gel décidé par le gouvernement de M. Juppé.
Les deux budgets que nous avons établis en 1998 et 1999 ont permis un recrutement sans précédent de magistrats et de fonctionnaires. J'ai pu ainsi créer 700 emplois en 1998, dont 70 emplois de magistrats, soit deux fois plus que l'année précédente. Les recrutement se poursuivent en 1999, avec, notamment, ceux de 140 magistrats.
M. Robert Lamy. Ce n'est pas la question !
Mme la garde des sceaux. Ces jours derniers, en prévision du conseil de sécurité intérieur, je me suis fait transmettre les documents établissant l'évolution des effectifs de la protection judiciaire de la jeunesse les éducateurs et fonctionnaires chargés de prendre en charge les jeunes délinquants et les jeunes en danger. («La question !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Il ressort de cette série de chiffres que dans les années 1986, 1987 et 1988 le recrutement des éducateurs avait brutalement «plongé». («C'est vrai !» sur quelques bancs du groupe socialiste.) Ce n'est que depuis l'an dernier, grâce au recrutement que le Premier ministre m'a autorisée à faire, que nous avons pu dépasser le chiffre de 1983 ! Voilà la situation.
Ainsi, monsieur le député, si vous regardez la réalité en face, vous admettrez que vous n'avez de leçons à donner à personne. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Verts. - Protestations sur les bancs du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Données clés

Auteur : M. Christian Estrosi

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Jeunes

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 janvier 1999

partager