Question au Gouvernement n° 1070 :
égalité des sexes

11e Législature

Question de : Mme Muguette Jacquaint
Seine-Saint-Denis (3e circonscription) - Communiste

Question posée en séance, et publiée le 27 janvier 1999

M. le président. La parole est à Mme Muguette Jacquaint.
Mme Muguette Jacquaint. Madame la garde des sceaux, la parité entre les femmes et les hommes dans la vie politique s'inscrit dans le mouvement de la société réelle où les femmes tiennent, dans le domaine économique, social, culturel, scientifique, une place de plus en plus importante. La parité est reconnue par 80 % de la population. Cette évidence n'est pas tombée du ciel, il aura fallu de longues années de luttes des mouvements féministes et des femmes.
L'Assemblée nationale - et je m'en réjouis -, en phase avec les citoyennes et les citoyens, a adopté à l'unanimité, le 15 décembre 1998, le projet de réforme de la Constitution intégrant dans l'article 3, celui traitant de la souveraineté, l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives.
C'est la première phase du travail législatif qui doit être accompli pour atteindre les objectifs de cette égalité. Or, au Sénat, la majorité de droite de la commission des lois a décidé, sous un prétexte de droit qui n'est que du juridisme, d'adopter une nouvelle rédaction, en estimant que la parité est du seul ressort des partis politiques. Cette rédaction vide le projet de son contenu et de ses avancées démocratiques.
L'ensemble des femmes, mais aussi des forces vives du pays - aujourd'hui plusieurs centaines de femmes représentant la majorité des associations féminines et de la gauche plurielle étaient rassemblées devant le Sénat - s'élèvent avec force contre cet archaïsme et ces idées d'une autre époque.
Madame la ministre, quelle initiative le Gouvernement compte-t-il prendre pour lever le blocage de la commission des lois du Sénat et pour faire adopter aux sénateurs le texte voté par les députés, afin que le Congrès puisse se tenir à Versailles, le 8 mars ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, malheureusement pour une réponse courte.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la députée, ce matin, Nicole Péry et moi-même étions au Sénat, et ce dernier nous a fait savoir qu'à la révision de l'article 3 de la Constitution, qui avait été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale, il préférait un amendement à l'article 4.
J'ai d'abord fait observer au Sénat que le Gouvernement estimait essentiel, sur le plan symbolique, que la notion de parité soit introduite à l'article 3, car c'est celui qui traite de la souveraineté nationale.
L'article 4 concerne les partis politiques. En réalité, le Sénat veut laisser aux partis politiques l'appréciation des mesures incitatives en faveur de la parité, plutôt que d'en confier la responsabilité au législateur. J'ai donc dit au Sénat, comme je vous le dis maintenant: cela signifie qu'on ne change rien !
Mme Nicole Bricq. C'est une manoeuvre du Sénat !
M. Pierre Carassus. Qui est un ramassis de conservateurs !
Mme la garde des sceaux. D'ailleurs, on voit où cela nous a menés: 5 % de femmes seulement au Sénat, 11 % à l'Assemblée nationale - mais justement parce que les partis de gauche ont décidé de mettre en oeuvre la parité en respectant des quotas -...
Mme Christine Boutin. Sans la loi !
Mme la garde des sceaux. ... une seule femme présidente de conseil général, deux femmes présidentes de conseil régional.
Par conséquent, le Gouvernement a décidé de ne pas accepter l'amendement de la commission des lois du Sénat. Si cet amendement est néanmoins adopté, le Gouvernement fera tout ce qui est en son pouvoir pour qu'une navette soit organisée au plus vite. Le Sénat dispose du pouvoir de bloquer un projet de loi. S'il l'exerce, nous espérons que le blocage qu'il aura décidé ne durera pas, parce que cette loi est attendue par l'ensemble de notre pays et nous ne pouvons nous satisfaire de la situation actuelle dans laquelle une infime minorité de femmes ont accès aux mandats et aux fonctions électifs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance).

Données clés

Auteur : Mme Muguette Jacquaint

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Femmes

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 janvier 1999

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