Question au Gouvernement n° 1072 :
mer et littoral

11e Législature

Question de : M. André Aschieri
Alpes-Maritimes (9e circonscription) - Radical, Citoyen et Vert

Question posée en séance, et publiée le 27 janvier 1999

M. le président. La parole est à M. André Aschieri.
M. André Aschieri. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères. Elle traite d'un problème qui concerne tous les pays riverains de la Méditerranée: la prolifération de la Caulerpa Taxifolia, une algue très dangereuse.
En 1984, on décelait la présence de cette algue sur quelques mètres carrés au pied du rocher de Monaco, sous le musée océanographique de Monaco, en liaison certainement avec ses laboratoires. Le professeur Alexandre Meinesz, directeur du laboratoire Environnement marin de l'université de Nice, évaluait en 1997 la couverture de la colonie Caulerpa Taxifolia à 4 630 hectares, ce qui est énorme, dont quelque 1 800 correspondant aux seules côtes françaises.
Cette algue se révèle dangereuse pour la biodiversité, les écosystèmes et les activités économiques liées à la mer. Pour reprendre l'expression des professeurs Boudouresque et Meinesz, «le risque de macdonalisation, c'est-à-dire de l'uniformisation planétaire des peuplements et des paysages [...] est important».
Seule une convention imposant des obligations aux Etats riverains et à tous les usagers de la Méditerranée permettra de lutter efficacement contre la prolifération de cette algue.
Plus de 300 études scientifiques ont été réalisées sur son sujet. Cependant, cet énorme travail doit avoir un prolongement politique.
Monsieur le ministre, il est temps d'agir.
Au musée de Monaco, on nous répète: «On ignore comment vont vieillir, en Méditerranée, les écosystèmes à Caulerpa Taxifolia.» C'est désolant. Pendant combien de temps allons-nous regarder vieillir les écosystèmes avant d'agir.
Il nous faut enfin une stratégie de contrôle et d'action.
Malgré la mise en garde des scientifiques, notre administration fait preuve d'inertie. Avec nos collègues Michèle Rivasi, Jean-Pierre Brard, Pierre Lellouche, nous venons de déposer une proposition de loi. Le Gouvernement pourrait très bien s'en saisir.
Quelles initiatives concrètes peut-on attendre du Gouvernement en vue d'une action concertée des pays de la Méditerranée ? La France, qui a participé à son élaboration, ratifiera-t-elle enfin la convention de Barcelone ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)
M. Pierre Carassus. Très bonne question !
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le député, l'introduction de Caulerpa Taxifolia a fait l'objet de vives controverses quant à l'origine du phénomène, son ampleur et son impact sur l'environnement. Caulerpa apparaît comme une des nombreuses espèces exotiques introduites par l'homme dans le milieu marin qui ont un comportement envahissant. Ces espèces sont susceptibles d'avoir un effet biologique ou économique sur le long terme. Il est difficile de prévoir son ampleur.
L'étude des empreintes génétiques de la caulerpe a permis de confirmer l'étiologie que vous évoquez dans votre intervention.
Mon ministère a soutenu, avec la Commission européenne, de nombreux travaux scientifiques et expérimentaux, entrepris notamment par le groupement d'intérêt scientifique Posidonie. Il a initié et appuyé la démarche de l'Académie des sciences pour confronter les points de vue au sein de la communauté scientifique.
Le comité interministériel de la mer a suscité en 1998 l'adoption d'un plan d'action, avec trois volets: recherche; observatoire pour le suivi de l'expansion de l'algue et de l'évolution des écosystèmes où elle est observée; prévention et lutte, avec des actions de sensibilisation des plaisanciers - qui colportent souvent l'algue avec leurs ancres -, et de vulgarisation des techniques de lutte, ainsi que la détermination des sites prioritaires pour une intervention.
Compte tenu des techniques disponibles, qu'il s'agisse de l'arrachage ou de l'utilisation de films plastiques au cuivre, une lutte efficace de retardement n'a été jusqu'à ce jour possible que sur des surfaces dérisoires, de l'ordre de quelques dizaines de mètres carrés à peine.
Le comité de pilotage du plan d'action se réunira le 18 février au ministère. La proposition de loi que vous avez déposée va dans le même sens que les propositions gouvernementales. Je vous invite donc à vous rapprocher de mon ministère pour que nous les examinions de façon approfondie.
Au plan européen, 11 millions de francs ont été engagés dans le cadre du programme LIFE. Quant au protocole relatif aux aires spécialement protégées et à la diversité biologique en Méditerranée, additionnel à la convention de Barcelone, il a été signé par la France en 1995. Il est en cours de ratification. Il permettra de protéger des aires spéciales, d'importance méditerranéenne, avec un plan d'action Méditerranée, allant de 1996 à 2005, qui constitue un cadre propre à la coordination des efforts des différentes parties contractantes. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

Données clés

Auteur : M. André Aschieri

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Déchets, pollution et nuisances

Ministère interrogé : aménagement du territoire et environnement

Ministère répondant : aménagement du territoire et environnement

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 27 janvier 1999

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