Canal Plus
Question de :
M. Didier Mathus
Saône-et-Loire (4e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 4 mars 1999
M. le président. La parole est à M. Didier Mathus.
M. Didier Mathus. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la culture et de la communication. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Madame la ministre, des discussions sont depuis quelques jours en cours entre Canal Plus et le groupe Murdoch pour étudier la fusion de Canal Plus et de BSkyB. Cette nouvelle a jeté le trouble et la consternation dans les milieux de la création en France.
Chacun a en mémoire les déclarations de M. Murdoch à la conférence de Birmingham, dans lesquelles il attaquait violemment l'exception culturelle européenne, affichant son mépris et son hostilité à l'égard des législations nationales favorables à la création cinématographique et audiovisuelle.
M. Murdoch est le propriétaire d'un groupe de presse mondial bâti sur l'absence de toute déontologie et sur une vision ultralibérale de la communication conçue comme un marché ordinaire. Son arrivée en France et sur le continent européen représente un grand danger pour l'ensemble des politiques européennes dans le domaine audiovisuel, pour les entreprises qui travaillent dans ce secteur et pour notre identité culturelle elle-même.
Quelles sont donc les intentions du Gouvernement face à cette menace et de quels moyens dispose-t-il pour s'y opposer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe communiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, les discussions actuellement en cours entre le groupe Murdoch et Canal Plus à propos du rapprochement entre Canal et la chaîne anglaise BSkyB préoccupent tout comme vous le Gouvernement. Vous avez rappelé les déclarations de M. Murdoch à la conférence de Birmingham où il critiquait effectivement, et dans des termes particulièrement violents, la défense de la souveraineté culturelle des Etats et de la souveraineté culturelle européenne, et où il s'opposait à tout système de régulation prôné par les pouvoirs publics sur le plan national ou sur le plan européen.
M. François d'Aubert. Expulsez-le !
Mme la ministre de la culture et de la communication. Seuls l'intéressent aujourd'hui les 40 % du marché européen qui permettraient à M. Murdoch et à son groupe de s'étendre sur le continent. C'est la raison pour laquelle ceux-ci ont lancé une très vive offensive pour prendre pied en Europe, par tous les moyens. Ils se sont heurtés jusqu'ici à de nombreuses difficultés, comme, récemment, l'opposition du gouvernement italien. Aussi se retournent-ils aujourd'hui vers la France. Rappelons toutefois que, lors de l'échec de la tentative de ce groupe en Italie, le président de Canal Plus, M. Lescure, avait parlé de «la pieuvre Murdoch» et de la culture monopolistique que celui-ci entend développer.
Pour sa part, le Gouvernement reste attaché à ce que les groupes français se renforcent et puissent passer des alliances positives au regard de leur activité de production.
M. Renaud Muselier. Elle parle, mais elle ne dit rien !
Mme la ministre de la culture et de la communication. Les dirigeants de Canal Plus doivent savoir que le Gouvernement examinera avec la plus grande vigilance un éventuel rapprochement (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), quelle qu'en soit la forme, avec le groupe Murdoch, au regard de ses conséquences sur les marchés européens de la télévision payante, les droits sportifs, audiovisuels et cinématographiques, au regard de ses conséquences sur les marchés européens, mais aussi de sa conception de la souveraineté culturelle, nationale et européenne.
Je crois nécessaire de rappeler que la position de Canal Plus en France reste fonction du maintien de ses devoirs spécifiques vis-à-vis de la production cinématographique. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Soyez enfin assurés, mesdames et messieurs les députés, que le Gouvernement veillera aussi à ce que toutes les autorités compétentes en matière de régulation soient saisies sur le plan national comme sur le plan européen. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Auteur : M. Didier Mathus
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Audiovisuel et communication
Ministère interrogé : culture et communication
Ministère répondant : culture et communication
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 mars 1999