élections législatives
Question de :
M. Pascal Clément
Loire (6e circonscription) - Démocratie libérale et indépendants
Question posée en séance, et publiée le 11 mars 1999
M. le président. La parole est à M. Pascal Clément.
M. Pascal Clément. Monsieur le Premier ministre, nous avons eu, au détour d'un entretien radiophonique, la surprise d'entendre le premier secrétaire du parti socialiste nous expliquer que les prochaines élections législatives seraient, pour l'essentiel, majoritaires. Si nous comprenons bien, il y aurait donc une dose de proportionnelle.
Cela nous rappelle 1985,...
Plusieurs députés du groupe socialiste. 1986 !
M. Pascal Clément. ... année où nous sommes passés de «l'instillation» d'une dose de proportionnelle, selon l'expression du Président de la République de l'époque, M. Mitterrand, à la proportionnelle intégrale.
Or, monsieur le Premier ministre, de tels propos sont en totale contradiction avec vos propres déclarations sur ce sujet dans cet hémicycle. Lors du débat sur la parité homme-femme, nous avons interrogé le Gouvernement, en particulier le ministre de l'intérieur et vous-même, monsieur le Premier ministre, pour savoir si ce projet n'en cachait pas un autre. Et vous nous avez assurés qu'il n'y avait aucune espèce de doute à avoir sur cette question, et que nous garderions le mode de scrutin majoritaire et uniquement majoritaire. Du reste, ces assurances ont permis de lever les réticences manifestées par nombre de parlementaires - députés et sénateurs -, lesquels ont alors voté la loi sur la parité homme-femme.
Si vous avez changé d'avis, monsieur le Premier ministre, nous vous serions reconnaissants de le dire. Ou alors êtes-vous contraint de contredire le premier militant de votre parti ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Monsieur le président, je salue votre retour au perchoir.
Monsieur Clément, il semble que, dans l'échange entre les formations politiques, vous vous sentiez un peu défaillant, puisque, le premier secrétaire du parti socialiste s'étant exprimé, vous n'éprouvez pas le besoin dans le débat public, démocratique, de débattre avec lui. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Francis Delattre. Et que fait-on en ce moment ?
M. le Premier ministre. Vous vous sentez gêné par son argumentation et vous voulez absolument interroger le Premier ministre à propos des déclarations du premier secrétaire du parti socialiste ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Charles Cova. Nous ne sommes pas gênés !
M. le Premier ministre. Mesdames et messieurs les députés, si, par hasard, le premier secrétaire du parti socialiste était sur ces bancs... mais je vois qu'il est là («Par hasard !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...
Voulez-vous que nous comparions la présence sur ces bancs du premier secrétaire du parti socialiste («Oui !» sur les mêmes bancs) et celle du président du RPR par exemple ? Nous risquons d'avoir de singulières surprises ! (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le Premier ministre. Il s'agissait, mais vous l'avez tous compris, non pas d'une interrogation sur la présence du premier secrétaire du parti socialiste, mais d'une fleur de rhétorique. (Sourires.)
Je vais répondre à la question posée en mon nom, et non pas au nom d'une formation politique dont je suis l'humble militant (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République), mais dont je ne m'inspire pas dans mes fonctions.
M. Pierre Lellouche. Quel cirque !
M. le Premier ministre. A l'occasion du débat sur la parité, j'ai, le 8 mars, devant des femmes et des hommes rassemblés à Matignon, confirmé ce que j'avais dit devant le Sénat, où l'on m'avait interrogé à ce sujet, à savoir que, pour ce qui me concernait, je n'établissais aucun lien entre l'inscription dans la Constitution du principe de parité, ou plus exactement de l'égal accès des hommes et des femmes aux mandats électoraux et fonctions électives, et la question des modes de scrutin.
Ainsi que je l'ai déjà déclaré clairement, je répète devant vous que, si les formations politiques de l'ensemble de ce pays et de la majorité sont libres d'exprimer leur point de vue, je n'ai pas, en tant que Premier ministre, l'intention de proposer pendant cette législature un projet de réforme du scrutin législatif intégrant la proportionnelle ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Pierre Lellouche. Alors, le premier secrétaire du parti socialiste dit des bêtises !
M. le Premier ministre. Je reste donc très clair. Laissez les formations politiques s'exprimer librement !
Pour conclure, je dirai qu'au-delà de ce qu'on peut penser sur le fond, si j'en juge par ce qui s'est passé en 1997, ni le parti socialiste, ni les formations de la majorité, ni moi-même, et peut-être pas non plus les Français, n'ont lieu de se plaindre du scrutin majoritaire. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Auteur : M. Pascal Clément
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Élections et référendums
Ministère interrogé : Premier Ministre
Ministère répondant : Premier Ministre
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 11 mars 1999