Question au Gouvernement n° 1250 :
poids lourds

11e Législature

Question de : M. Noël Mamère
Gironde (3e circonscription) - Radical, Citoyen et Vert

Question posée en séance, et publiée le 31 mars 1999

M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.
M. Noël Mamère. Au nom du groupe Radical, Citoyen et Vert, très peiné par la disparition de son président, je veux d'abord remercier le président de l'Assemblée nationale et le Premier ministre des mots qu'ils ont su trouver pour évoquer la mémoire de Michel Crépeau.
Après le délai de décence qui s'imposait à la suite de la catastrophe de Chamonix, je voudrais revenir sur la question de l'équilibre entre transport par rail et transport par route. En effet, depuis vingt ans, nous avons assisté à un développement exponentiel du second au point que 88 % des marchandises sont transportées par camion. Paradoxalement, la SNCF, qui fait partie des tout premiers transporteurs routiers de France...
M. Laurent Dominati. Le premier !
M. Noël Mamère. ... n'est pas étrangère à cette hégémonie du camion.
Au-delà, il faut savoir que, selon une enquête du ministère de l'environnement, le coût externe de ce mode de transport qui n'est pas inclus dans les calculs, est de 2 000 francs par camion. Et je ne reviens pas sur les détestables conditions sociales des chauffeurs de camion. De ce fait, le camion est à même d'exercer une concurrence déloyale. Nous craignons donc que d'autres tragédies se reproduisent.
En effet, le tunnel du Somport dans la vallée d'Aspe, dans les Pyrénées, va permettre le passage, d'ici à une dizaine d'années, de 2 000 camions par jour, et l'on risque fort d'être confronté au même problème que celui que l'on vient de connaître à Chamonix.
Voici quelques chiffres concernant le tunnel du Mont-Blanc: 766 000 camions l'empruntent tous les ans, et, depuis les six dernières années, il y a eu vingt-cinq morts et 250 blessés à la suite d'accidents impliquant des poids lourds sur la rampe de dix-sept kilomètres qui mènent au tunnel.
Compte tenu de tous ces éléments, j'avais quelques questions à poser à M. le ministre des transports, qui ne semble pas être là...
Un député du groupe du Rassemblement pour la République. La présence des ministres est sans doute facultative !
M. Noël Mamère. Mais un membre du Gouvernement répondra à sa place. Le Gouvernement est-il prêt à donner une priorité absolue au transport ferroviaire en montagne ? Va-t-il appliquer un moratoire sur tous les aménagements routiers dans le massif des Pyrénées ? Compte-t-il ratifier le protocole relatif aux transports de la convention alpine ?
M. le président. Monsieur Mamère, je vous invite à conclure.
M. Noël Mamère. Le Gouvernement entend-il promouvoir une fiscalité écologique, qui permettrait, par exemple, de revoir le montant de la taxe à l'essieu ? Lorsqu'en France un camion paie 400 francs de taxe à l'essieu, il doit s'acquitter de 31 000 francs en Grande-Bretagne ou en Allemagne. Il faut savoir ce que nous voulons faire en faveur d'un rééquilibrage rail-route.
Enfin, le projet de l'autoroute A51 à Grenoble, qui risque de devenir très vite un itinéraire de délestage pour les camions, n'est pas encore totalement enterré. Le ministre des transports compte-t-il y mettre un terme définitif ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. secrétaire d'Etat au logement.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le député, c'est évidemment avec la plus vive émotion que le Gouvernement considère l'épouvantablecatastrophe qui a endeuillé la France et l'Italie. Les pensées et la compassion du pays tout entier sont tournées vers les victimes. En se rendant hier sur place le Premier ministre et son homologue italien, le président d'Alema, ont rendu hommage aux victimes, témoigné aux familles la solidarité de leur gouvernement, et salué le courage et du dévouement exceptionnel des services de secours, eux-mêmes durement éprouvés en la personne de l'adjudant-chef Tosello.
Monsieur le député, le problème que vous posez est sérieux pour notre pays, et M. Gayssot aura à coeur de reprendre les divers points que vous avez soulevés.
M. Jean-Louis Debré. S'il reste ministre !
M. le secrétaire d'Etat au logement. Il est exact que le tunnel du Mont-Blanc a connu, au cours des dix dernières années, une progression de 25 % du trafic poids lourds. Et celle-ci a été de 83 % pour le tunnel du Fréjus. Le problème est donc majeur pour notre pays. Mais il est aussi beaucoup plus large et se présente, comme vous l'avez indiqué, à l'échelle européenne puisque nos massifs de montagne sont essentiellement frontaliers.
M. Richard Cazenave. Répondez à la question !
M. le secrétaire d'Etat au logement. Au regard du transport international des marchandises, et compte tenu de cette échelle, les principaux passages, du Brennet au Fréjus, sont forcément solidaires puisque les mesures de régulation prises sur l'un débouchent sur des reports de trafic sur les autres. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. Jean-Louis Debré. Répondez à la question !
M. le secrétaire d'Etat au logement. Il importe donc de développer à l'échelle européenne une politique de transport ferroviaire combiné. Cela implique la constitution d'un véritable réseau européen de fret et suppose un dévelopement de l'interopérabilité et, bien sûr, des investissements pour améliorer les infrastructures. (Exclamations sur les bancs du Rassemblement pour la République.)
De façon plus générale, une meilleure répartition modale suppose, à côté du développement de l'offre ferroviaire, des mesures de régulation qui peuvent passer par l'harmonisation fiscale des produits énergétiques et par l'internationalisation des coûts externes du transport routier à travers le péage, ainsi que l'harmonisation par le haut des règles sociales et de sécurité.
Le Gouvernement, monsieur le député, portera tous ces sujets auprès de l'Union européenne, responsable aujourd'hui des conditions économiques du fonctionnement des transports. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Données clés

Auteur : M. Noël Mamère

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Sécurité routière

Ministère interrogé : logement

Ministère répondant : logement

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 31 mars 1999

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