secteur public
Question de :
M. Olivier de Chazeaux
Hauts-de-Seine (5e circonscription) - Rassemblement pour la République
Question posée en séance, et publiée le 1er avril 1999
M. le président. La parole est à M. Olivier de Chazeaux.
M. Olivier de Chazeaux. Monsieur le président, mes chers collègues, je souhaiterais avant toute chose revenir sur la question qu'a posée le président Douste-Blazy. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Lorsqu'un président de groupe pose une question aussi grave que celle qui a été posée,...
M. Daniel Marcovitch. Et pas politicarde, sans doute !
M. Olivier de Chazeaux. ... celle-ci mérite nettement mieux qu'une réponse du ministre des affaires européennes («Oh», sur les bancs du groupe socialiste), à l'heure où l'armée française est engagée dans un conflit important et alors qu'une vaste part de votre majorité plurielle manque gravement à ce devoir de solidarité qu'a rappelé le président Douste-Blazy. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Christian Bergelin. Bravo !
M. Daniel Marcovitch. Lamentable !
Un député du groupe du Rassemblement pour la République. C'est cela la majorité plurielle !
M. Olivier de Chazeaux. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la culture et de la communication.
Madame la ministre, la semaine passée, vous avez évoqué ici même le retour du plus beau serpent de mer de notre législature en parlant - je vous cite - de l'«ambitieuse réforme pour le service public audiovisuel» que vous préparez. Pourtant, force est de constater que, depuis de nombreux mois, cette ambition n'a guère débouché que sur une retraite de Russie.
Mme Odette Grzegrzulka. Nous n'êtes donc au courant de rien ?
M. Olivier de Chazeaux. A la lecture de la presse - nous en sommes réduits à y glaner des informations, madame la ministre, puisque nous n'en recevons pas de votre part -, ce qui semble être votre projet paraît plutôt brouillon et manquer cruellement de cohérence. Pour ma part, je crois qu'il s'agit davantage de la loi Murdoch que de la vôtre, ce qui est plutôt consternant. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Un député du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. Qu'en pense M. Dumas ?
M. Olivier de Chazeaux. Je souhaiterais, madame la ministre, vous interroger sur trois points.
Du point de vue de la méthode, tout d'abord, puisque j'ai cru comprendre que vous prépariez encore une nouvelle réforme du service public audiovisuel. Est-ce à dire que le projet de loi que vous avez déposé à l'Assemblée nationale le 10 novembre 1998 n'est plus d'actualité ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Si tel est le cas, quand vous déciderez-vous à en informer l'Assemblée nationale plutôt que les médias ?
Par ailleurs, notre collègue Anicet Turinay vous a posé la semaine dernière une excellente question sur le sort de RFO. Vous lui avez répondu que la représentation nationale devra se prononcer. Je n'oserai vous rappeler que c'est là une évidence. La question doit plutôt être formulée ainsi: sur quelle politique devrons-nous nous prononcer ?
Si je reprends le texte du 10 novembre 1998, j'avoue que je ne vous comprends pas très bien puisque votre projet de loi...
Plusieurs députés du groupe socialiste. La question !
M. Olivier de Chazeaux. Mes chers collègues, la moindre des courtoisies serait de laisser s'exprimer un des membres de cette assemblée. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Madame la ministre, votre projet de loi, disais-je, prévoyait la possibilité de créer une filiale RFO. De deux choses l'une: soit vous avez l'intention de vous en tenir à ce texte, et je vous remercie d'avance de nous le préciser; soit vous présenterez un amendement à la sauvette pour éviter le contrôle du CSA et du Conseil d'Etat, ce qui serait particulièrement grave.
L'outre-mer est en droit de connaître votre position prétendue ambitieuse sur ce sujet.
M. Didier Boulaud. Mais c'est Pic de la Mirandole !
M. Olivier de Chazeaux. Je souhaiterais évoquer un troisième point: le Premier ministre, à grand renfort de publicité et de communiqués, avait annoncé, au mois de septembre dernier,...
Mme Odette Grzegrzulka. La question !
M. Olivier de Chazeaux. ... une réduction importante du temps publicitaire sur les chaînes publiques, puisqu'il s'agissait de le ramener à cinq minutes par heure.
Mme Véronique Neiertz. La question !
M. Olivier de Chazeaux. Aujourd'hui, vous y renoncez et vous proposez huit minutes. Mais demain, qu'en sera-t-il ?
M. Arnaud Montebourg. La question !
M. Olivier de Chazeaux. Force est de constater que, là aussi, vous ne cessez de reculer.
J'en arrive à ma conclusion. («Ah !» sur les bancs du groupe socialiste.)
Soyez patients, chers collègues, et notamment vous, monsieur Montebourg.
Décidément, un constat s'impose, madame la ministre: comme certains membres de la majorité l'avaient constaté, vous n'êtes pas prête.
Dans ces conditions, ne serait-il pas plus sage, faute d'ambition, de faire l'économie d'un projet de réforme médiocre et coûteux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, je ferai moi aussi d'abord une remarque sur la méthode puisque vous avez commencé par faire allusion à la réponse de mon collègue Pierre Moscovici. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Je rappelle que le Premier ministre a rencontré les présidents des groupes. Il s'est expliqué ce matin en leur présence... (Vives exclamations sur les mêmes bancs. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Maurice Leroy. Justement !
Mme la ministre de la culture et de la communication. ... et s'est à nouveau exprimé il y a quelques instants.
J'en viens à votre question, concernant la méthode qui est la mienne. Je vous répondrai d'un mot: mieux vaut se préparer longuement pour un bon résultat plutôt que d'engager une réforme aussi insatisfaisante que celle que j'ai pu trouver à ma prise de fonctions. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
La réforme que je soumettrai au Parlement vous rassurera pleinement: elle est ambitieuse et repose sur le principe du gagnant-gagnant.
Gagnant pour le service public, qui gagnera en cohérence et en dynamisme par la création du groupe et par des moyens considérablement renforcés. L'audiovisuel public pourra enfin envisager le passage au numérique de terre avec un financement assuré.
Gagnant pour le téléspectateur, avec moins de publicité mais plus de programmes.
Gagnant pour les producteurs audiovisuels, qui verront, du fait de la simple application de la réforme, plusieurs centaines de millions de francs abonder le financement des programmes.
Gagnant aussi pour le secteur privé, qui disposera enfin de règles concurrentielles claires et justes, acceptables par tous, permettant de mieux maîtriser les phénomènes de concentration auxquels nous avons assisté.
La réforme du financement public qui a été déposée au Parlement reste valable. Elle sera complétée par une deuxième partie qui portera sur la régulation et sur quelques aspects relatifs à la transposition de la directive «Télévision sans frontières».
S'agissant de RFO, j'ai répondu la dernière fois, chiffres à l'appui, que nous souhaitions abonder et développer ses programmes de proximité dans les départements et territoires d'outre-mer et faire de RFO une tête de pont pour les programmes réalisés par le service public audiovisuel français. Il est clair que les parlementaires des DOM-TOM et l'ensemble de la représentation nationale devront se prononcer sur l'intégration de RFO dans le groupe. Nous aurons ce débat au moment de l'examen de la loi. Pour ma part, j'y suis favorable, car je crois que le bénéfice du financement, celui de l'organisation et la circulation des programmes seront meilleurs si RFO participe au groupe.
La dernière question que vous avez posée portait sur la réduction du temps de publicité. Oui, je propose aujourd'hui une réduction plus faible, parce que cela permettra d'accorder un milliard de francs supplémentaire au secteur public, ce qui ne serait pas possible avec une réduction du temps de publicité à cinq minutes.
On peut toujours ironiser, monsieur le député. J'aurai quant à moi la fierté de déposer un texte qui renforcera l'audiovisuel public et permettra de moderniser l'ensemble du secteur. Les gouvernements successifs que vous avez soutenus ont réduit les financements publics et restreint la capacité de ce secteur à financer des programmes. Je propose le contraire, et je peux m'appuyer sur l'ensemble de la majorité plurielle. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Cela me donnera la force, de présenter mon projet ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)
Auteur : M. Olivier de Chazeaux
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Audiovisuel et communication
Ministère interrogé : culture et communication
Ministère répondant : culture et communication
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 1er avril 1999