Question au Gouvernement n° 1280 :
politique de l'eau

11e Législature

Question de : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (3e circonscription) - Radical, Citoyen et Vert

Question posée en séance, et publiée le 8 avril 1999

M. le président. La parole est à Mme Chantal Robin-Rodrigo.
Mme Chantal Robin-Rodrigo. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
L'eau est aujourd'hui l'objet de toutes les convoitises. La libéralisation de ce service essentiel ne bénéficie pas toujours à nos concitoyens, qui ne sont donc, de ce fait, pas égaux devant le prix et la qualité de l'eau.
Je suis souvent amenée à rencontrer des gens démunis auxquels on vient de couper l'eau parce qu'ils n'ont pu régler leurs factures successives. La loi de lutte contre les exclusions règle en partie ce problème en leur permettant de bénéficier d'une prestation minimale. Pour autant, il y a lieu de s'interroger sur ce qu'est devenue la gestion de l'eau en France.
L'actualité récente démontre que les grands groupes tels que Suez, Lyonnaise des Eaux ou Vivendi, pour ne citer que les principaux, se sont fixé pour objectif le contrôle de la gestion et de la distribution de l'eau à l'échelle internationale, sans que les intérêts des usagers soient pris en compte.
Puisqu'il n'est certainement plus l'heure de songer à la création d'un grand service public de l'eau, ce que je regrette vivement, n'a-t-on pas intérêt aujourd'hui à encourager, face à cette dérive, les municipalités qui le souhaitent à revenir à une gestion en régie ? Le prix de l'eau serait alors sûrement inférieur à celui pratiqué par les grands groupes privés.
Quelle action le Gouvernement compte-t-il mener afin de limiter les abus dans ce domaine et de garantir l'accès égalitaire de tous les citoyens au service de l'eau ?
De même, ne serait-il pas souhaitable d'encourager, voire d'obliger les grandes multinationales à réinvestir une grande partie de leurs bénéfices afin, au moins, d'améliorer la qualité de l'eau ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Madame la députée, des scandales au cours des années passées ont mis en évidence la grande hétérogénéité du prix de l'eau sur le territoire national. En moyenne, il est aujourd'hui de 16,50 francs du mètre cube, avec de grandes distorsions liées au choix qui a été fait il y a des décennies. L'eau paie l'eau et, selon la proximité et la qualité de la ressource et la qualité du service rendu aux usagers, il peut exister de grandes différences.
La hausse annuelle moyenne du prix du mètre cube entre 1993 et 1997 a été de 8 % par an. Elle s'est ralentie depuis: 4 % par an en moyenne. Cela correspond, bien sûr, à une stabilisation du montant des travaux engagés par les collectivités locales, mais aussi à une stabilisation de la redevance perçue par les agences de l'eau.
La différence entre le prix de l'eau selon le système de gestion reste notable. En gestion déléguée, il est en général supérieur de 20 % à ce qu'il est en régie directe. Cette différence tend à s'estomper. Elle était de 20 % à 22 % en 1995, 1996 et 1997 et de 15 % seulement en 1998.
Des efforts ont été réalisés ces dernières années pour améliorer la transparence du prix de l'eau et aider les élus et les collectivités locales à s'y retrouver dans le maquis des dispositifs. Je pense, bien sûr, au rapport annuel sur la qualité et le financement de l'eau. Je pense aux efforts faits pour clarifier la facture d'eau, aux dispositions de la loi du 29 juillet 1993 relative à la prévention de la corruption, qui donne un cadre légal pour les procédures de délégation. Je pense encore à la commission consultative des services publics locaux mise en place par la loi du 6 février 1992.
Cet arsenal nous paraît encore insuffisant et, lors d'une communication au conseil des ministres au mois de mai dernier, j'ai annoncé la mise en place prochaine d'un haut conseil du service public de l'eau et de l'assainissement. Le décret est pratiquement prêt aujourd'hui. Ce haut conseil devrait non seulement émettre des avis sur l'évolution du prix de l'eau, sur les composantes de la facture d'eau et notamment sur la part qu'y prend de plus en plus souvent la part fixe, ce qui est un élément essentiel si l'on veut une approche sociale du prix de l'eau, mais aussi formuler des propositions pour améliorer encore la transparence dans ce secteur. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Données clés

Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Eau

Ministère interrogé : aménagement du territoire et environnement

Ministère répondant : aménagement du territoire et environnement

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 avril 1999

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