SNCF
Question de :
M. Pierre Méhaignerie
Ille-et-Vilaine (5e circonscription) - Union pour la démocratie française-Alliance
Question posée en séance, et publiée le 6 mai 1999
M. le président. La parole est à M. Pierre Méhaignerie.
M. Pierre Méhaignerie. Ma question ne s'adresse pas au Premier ministre («Ah !» sur divers bancs du groupe socialiste), bien que la réponse du ministre de la défense nous fasse craindre le contenu du dossier de la Corse. Elle s'adresse à Mme la ministre de l'emploi, car des centaines de milliers de Français souffrent aujourd'hui, une nouvelle fois, de la détérioration de la qualité du service public. Les grèves à répétition conduisent à une incompréhension des Français. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. Mes chers collègues, une règle dans cette assemblée veut que l'on écoute celui qui parle. M. Méhaignerie a la parole; je prie les autres de faire silence ! Veuillez poursuivre, monsieur Méhaignerie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. Pierre Méhaignerie. Merci, monsieur le président ! Je crois que cette question intéresse les Français.
Ces grèves à répétition conduisent non seulement à une incompréhension des Français, mais aussi à une exaspération croissante des usagers, à une détérioration de l'image de la France à l'étranger et à un accroissement de la fracture sociale entre ceux qui peuvent faire céder l'Etat et les millions de salariés qui, eux, ne le peuvent pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Madame la ministre, je voudrais vous poser trois questions simples.
Première question: l'application des trente-cinq heures à la SNCF représente-t-elle vraiment un coût supplémentaire de 1,5 milliard, comme l'a dit son président ?
Deuxième question: l'application des trente-cinq heures dans le secteur public, et particulièrement à la SNCF, conduit-elle, comme le disent certaines organisations syndicales, à une régression sociale ?
Troisième question: pour éviter une augmentation supplémentaire des dépenses publiques pour les contribuables, une insatisfaction des personnels de la fonction publique et une détérioration des services au public, ne faudrait-il pas, madame la ministre, remettre en question l'application des trente-cinq heures dans la fonction publique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Vous posez une bonne question («Ah !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance), celle de l'application des trente-cinq heures dans notre pays, et j'ai le plaisir de vous faire je ne dirai pas une bonne réponse, mais une réponse qui nous satisfait puisque, depuis quinze jours, nous avons déjà dépassé le million de salariés travaillant sous le régime des trente-cinq heures et ainsi créé, ou préservé, plus de 50 000 emplois. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Nous en discuterons d'ailleurs ensemble lors du bilan de la loi que nous ferons en commun. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Personne n'a dit que la mise en place des trente-cinq heures était facile. Mais personne non plus sur ces bancs n'a trouvé la façon miracle de régler le problème du chômage. Pour ma part, je me réjouis que depuis près de deux ans le chiffre du chômage se soit réduit de 260 000 («Pas grâce à vous !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République), ce qui est sans précédent depuis trente ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Les trente-cinq heures, je crois pouvoir le dire, n'y sont pas pour rien, non plus que la relance du pouvoir d'achat, de la consommation et de la croissance, que les emplois-jeunes et l'aide à l'innovation technologique. («La question !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Je vais y venir, mais permettez-moi d'y répondre plus globalement, car la situation de l'emploi mérite que toutes les pistes soient ouvertes. C'est ce que nous avons fait et c'est pourquoi les résultats sont là.
J'en arrive à la SNCF et aux entreprises publiques. («Ah !» sur les mêmes bancs.) Il serait particulièrement malvenu de penser qu'une partie du pays pourrait rester à l'écart des trente-cinq heures, d'abord parce que c'est une aspiration des Français (Exclamations sur les mêmes bancs), ensuite parce que l'emploi est notre priorité numéro un; enfin, parce que dans les entreprises ces négociations permettent un vrai dialogue social prenant en compte, en termes de souplesse, tant les besoins de l'entreprise pour faire face à la concurrence que les souhaits des salariés pour mieux articuler leur vie professionnelle et leur vie familiale.
Les discussions dans les grandes entreprises publiques ne sont jamais faciles - vous êtes bien placés pour le savoir -, parce que ces entreprises jouent un rôle majeur pour notre pays. Nous le voyons lorsque surviennent des troubles et je regrette que cela soit le cas aujourd'hui, car cela perturbe la vie d'un grand nombre de Français.
M. Charles Ehrmann. Tout à fait !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Cela dit, les négociations en cours ont donné lieu à des centaines d'heures de travail.
M. Lucien Degauchy. Et les Français qui marchent à pied, on n'en parle pas !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Les principales organisations syndicales ont déclaré que les propositions faites méritaient d'être prises en considération,...
M. François d'Aubert. Et les clients de la SNCF ?
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. ... même si elles doivent être précisées et amendées. Comme l'a indiqué le ministre de l'équipement, des transports et du logement, et comme c'est le cas aujourd'hui en France dans une entreprise sur deux où se négocient les trente-cinq heures, la négociation va se poursuivre. Dans les heures qui viennent, nous allons trouver une solution permettant à la SNCF d'être plus productive, de mieux rendre un service de qualité à ses usagers, d'améliorer les conditions de travail et surtout de préserver l'emploi, car cela reste l'objectif numéro un du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Pierre Méhaignerie
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Transports ferroviaires
Ministère interrogé : emploi et solidarité
Ministère répondant : emploi et solidarité
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 6 mai 1999