Question au Gouvernement n° 1317 :
Corse

11e Législature

Question de : M. Dominique Perben
Saône-et-Loire (5e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 6 mai 1999

M. le président. La parole est à M. Dominique Perben.
M. Dominique Perben. Monsieur le Premier ministre, la vraie question qui se pose aujourd'hui à propos de la Corse, indépendamment du déroulement de l'enquête judiciaire, est celle de l'autorité de l'Etat, de son fonctionnement et donc de son image. Or ce qui s'est passé est évidemment le résultat d'un processus de dérapage progressif dans le fonctionnement de la préfecture de Corse et dans ses relations avec les forces de l'ordre.
Un tel événement, monsieur le Premier ministre, quelles que soient la faiblesse ou les erreurs des hommes, n'arrive pas par hasard. Il arrive d'autant moins par hasard que les auteurs présumés de ces actes criminels sont membres d'un corps militaire discipliné, exigeant et digne d'éloges: la gendarmerie. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Pour qu'un tel acte soit commis, il y faut un contexte favorable qui pousse à travailler en marge de la loi, puis qui pousse à la transgresser. Et c'est cela, monsieur le Premier ministre, qui vous concerne directement, en tant que responsable de l'administration.
Il est clair, en effet, que la création du Groupe de pelotons de sécurité a joué un rôle déterminant dans cette dérive progressive. Vous l'avez d'ailleurs reconnnu, après huit jours d'hésitation, puisque vous avez décidé hier de le dissoudre. Vous devez dire au Parlement les raisons qui vous ont amené à autoriser sa création. Vous devez nous dire avec quelles orientations et quelles instructions il a été mis en place. Vous devez aussi nous dire pourquoi vous n'avez pas agi avant l'affaire de la paillote.
M. Thierry Mariani. Très bien !
M. Dominique Perben. Vous ne pouviez pas ignorer les difficultés de relation entre les différents services de police et de gendarmerie en Corse.
M. Arnaud Montebourg. Comme Chirac !
M. Dominique Perben. Vous ne pouviez pas ignorer les circonstances parfois troublantes de certaines arrestations ou de certaines filatures dont la presse s'est fait l'écho. Des questions vous avaient été posées ici même à ce sujet, monsieur le Premier ministre, il y a quelques mois. J'ajoute qu'au moins trois de vos ministres ne pouvaient qu'avoir été alertés sur le mode de fonctionnement de cette unité: la ministre de la justice, car le Parquet ne pouvait pas ignorer les actions du GPS,...
M. Yves Fromion. Très bien !
M. Dominique Perben. ... le ministre de l'intérieur, en charge de l'ordre public, et le ministre de la défense, de qui dépend la gendarmerie.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Et le chef des armées ?
M. Dominique Perben. Monsieur le Premier ministre, pourquoi n'avez-vous pas réagi ?
M. Christian Bataille. Et le chef des armées ! (Protestations sur les mêmes bancs.)
M. Dominique Perben. Pourquoi avez-vous toléré de telles méthodes, inévitablement porteuses de difficultés et de dérapages ? Vous ne pouvez pas me répondre que vous ne saviez pas, ou alors ce serait encore plus grave quant à votre méthode de gouvernement ! (Applaudissements sur les mêmes bancs.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la défense.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Vous savez, monsieur le député, que vos questions portent sur des faits qui font l'objet d'une enquête judiciaire qui se poursuit. (Exclamations sur les mêmes bancs.) Restez maîtres de vous-mêmes, messieurs, quand on parle de la justice; cela semble vous exciter ! Voyez-vous un hélicoptère dans cet hémicycle ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Pierre Lellouche. C'est trop facile !
M. le ministre de la défense. Puis-je répondre maintenant devant quelque chose qui ressemble à un Parlement ? (Vives protestations, huées et claquements de pupitres sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants se lèvent.)
M. le président. Un peu de calme, je vous prie !
M. le ministre de la défense. D'abord, la gendarmerie nationale assure en direct l'ensemble des missions d'enquête. Elle est au service de la justice et, minute après minute, elle lui fournit toutes les données dont elle a besoin pour éclaircir les faits.
M. François Rochebloine. C'est lamentable !
M. le ministre de la défense. Ensuite, s'agissant du Groupe de pelotons de sécurité (Exclamations sur les bancs du gorupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), les missions qui lui ont été assignées à la suite de l'observation de la situation en Corse étaient des missions d'intervention parce que les interpellations et les arrestations se déroulent souvent là-bas dans des conditions dangereuses. Ces missions seront reprises par les formations de la gendarmerie. Elles restent nécessaires. En Corse, beaucoup d'arrestations sont en effet des épisodes dangereux.
Le GPS exerçait aussi une mission de protection qui sera également reprise par un peloton dépendant du groupement de gendarmerie.
M. Michel Herbillon. Les ministres perdent leur sang-froid !
M. le ministre de la défense. Cette protection est, hélas, nécessaire...
M. Jean Ueberschlag. Donc, vous saviez !
M. le ministre de la défense. ... pour garantir la sécurité des autorités.
Enfin, le GPS avait une mission de surveillance liée aux enquêtes judiciaires qui sont nombreuses et qui donneront des résultats en Corse. Vous allez le voir, mesdames, messieurs les députés ! (Exclamations sur les mêmes bancs.)
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Ca, on l'a vu !
M. le ministre de la défense. Le contrôle régulier des activités du GPS a été effectué par la direction de la gendarmerie nationale et toute investigation qui portera sur ce point démontrera sa vigilance. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
M. Jean Ueberschlag. Vous le saviez !
M. le ministre de la défense. L'Etat de droit a subi des atteintes du fait de manquements individuels qui seront réprimés conformément à la loi.
M. Jean Ueberschlag. Et vous le saviez !
M. le ministre de la défense. L'opposition, dans une telle affaire, fait son travail comme elle croit devoir le faire. La controverse politique fait partie de la démocratie. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
M. Franck Borotra. Les responsabilités aussi !
M. le ministre de la défense. Mais, que notre diligence et notre compétence soient discutées par ceux qui ont suivi fougueusement dans leurs actions, avec les résultats que l'on connaît,...
M. Jean Ueberschlag. Et le Rainbow Warrior !
M. le ministre de la défense. ... - M. Jean-Louis Debré et M. Charles Millon - n'est pas pour nous une épreuve insurmontable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Données clés

Auteur : M. Dominique Perben

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Collectivités territoriales

Ministère interrogé : défense

Ministère répondant : défense

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 6 mai 1999

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