Question au Gouvernement n° 1329 :
Kosovo

11e Législature

Question de : M. Jean-Claude Sandrier
Cher (2e circonscription) - Communiste

Question posée en séance, et publiée le 12 mai 1999

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.
M. Jean-Claude Sandrier. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.
La guerre au Kosovo connaît aujourd'hui un tournant. Une issue au conflit apparaît désormais possible, pour peu que la recherche d'une solution politique prenne le pas sur la logique de guerre. Chaque jour qui passe accroît les risques de dérapage et le bombardement de l'ambassade de Chine en est la confirmation. Chaque jour qui passe accroît les risques d'un engrenage dont personne ne peut mesurer les conséquences.
Il y a quelques jours, l'accord intervenu lors du sommet du G8 laissait fortement entrevoir l'espoir d'avancées significatives dans le sens d'une solution politique. Sans rien lâcher sur le fond quant au respect des droits de l'homme, au retour des réfugiés et au nécessaire déploiement d'une force civile et de sécurité sous l'égide de l'ONU, il propose une porte de sortie à la partie serbe. Fort du soutien de la communauté internationale, validé juridiquement par les Nations unies, il pourrait permettre, en cas d'obstruction des autorités de Belgrade, d'isoler Milosevic et son régime, y compris dans son propre pays.
Deux éléments nouveaux offrent l'occasion d'élargir de façon décisive la voie entrouverte au G8: l'annonce d'un retrait partiel des forces armées yougoslaves du Kosovo et le soutien de la Chine au plan proposé par le G8 si l'OTAN arrête ses bombardements. Nous avons le devoir politique, devant toute la communauté internationale, de prendre au mot les auteurs de ces déclarations. Il convient donc, comme l'a d'ailleurs demandé le président de la République italienne, de suspendre les frappes de l'OTAN, permettant ainsi à la Chine d'apporter son soutien, au sein du Conseil de sécurité, au plan de paix proposé par le G8. Cela placerait Milosevic dans l'impossibilité de renier sa parole...
M. Christian Jacob. Ce ne serait pas la première fois !
M. Jean-Claude Sandrier. ... sur un retrait partiel, puis total, du Kosovo, sauf à se déconsidérer auprès de ses soutiens eux-mêmes.
Un député du groupe de l'Union pour la démocratie française. Il y a toujours des naïfs !
M. Jean-Claude Sandrier. Comme le souhaite aujourd'hui une majorité de nos concitoyens, la France doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour créer les conditions permettant que s'ouvrent enfin des négociations sous l'égide de l'ONU.
Monsieur le ministre, à partir de ces éléments nouveaux, quelles initiatives concrètes notre pays entend-il prendre pour parvenir à ce but ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)
M. Claude Hoarau. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le député, je voudrais d'abord revenir sur l'erreur tragique et meurtrière qui a conduit au bombardement de l'ambassade de Chine à Belgrade, pour redire, après le Président de la République et le Premier ministre, nos très profonds regrets. Le Chancelier Gerhard Schroder, qui préside à l'heure actuelle l'Union européenne, est en ce moment même à Pékin pour faire part à la Chine de ses regrets et lui rappeler que nous comptons sur elle dans la recherche d'une solution politique.
En effet, comme vous l'avez dit, ces derniers jours ont été marqués par une activité diplomatique intense et qui marque des progrès. Vous avez rappelé la réunion du G8 à Bonn le 6 mai, au cours de laquelle les alliés, mais aussi les Russes ont repris les cinq conditions proposées par la France et consacrées par le secrétaire général de l'ONU. De nombreux émissaires sont également à l'oeuvre: M. Bildt, M. Kukan, M. Tchernomyrdine et le Président finlandais M. Ahtisaari auquel le Président de la République a rendu visite hier et encore aujourd'hui. Tout cela a un but: trouver une résolution, dans le cadre du Conseil de sécurité des Nations unies, pour une solution politique au Kosovo.
Cela dit, je ne crois pas que l'on puisse prendre au mot M. Milosevic, pour reprendre votre expression. Il nous a appris au contraire qu'il fallait parfois, et même souvent, se défier de ce qu'il disait. C'est pourquoi nous prenons avec attention, mais aussi avec circonspection, l'annonce du retrait de certaines troupes au Kosovo. Nous ne disposons en effet d'aucune information vérifiable sur le retrait de ces troupes, qui, en toute hypothèse, resterait insuffisant par rapport aux cinq conditions dont je viens de rappeler le nécessaire respect.
A total, nous devons, me semble-t-il, poursuivre sur une double attitude: une très grande détermination dans l'action militaire, avec une vigilance accrue quant au choix des cibles et à la précision des tirs de l'OTAN, mais aussi dans la recherche d'une solution politique. La France y travaille: Hubert Védrine est aujourd'hui à Moscou - ce qui explique que je vous réponde à sa place - et le Président de la République s'y rendra le 13 mai, puis le Premier ministre, les 24 et 25 mai. Telle est la volonté de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Données clés

Auteur : M. Jean-Claude Sandrier

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : affaires européennes

Ministère répondant : affaires européennes

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 12 mai 1999

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