Corse
Question de :
M. Philippe Houillon
Val-d'Oise (1re circonscription) - Démocratie libérale et indépendants
Question posée en séance, et publiée le 20 mai 1999
M. le président. La parole est à Mme Philippe Houillon.
M. Philippe Houillon. Monsieur le ministre de la défense, nous aurons mardi prochain un débat sur la politique du Gouvernement en Corse et un vote sur la motion de censure déposée par l'opposition.
Nous n'avions donc pas l'intention d'aborder ce sujet aujourd'hui (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert),...
M. le président. Un peu de silence ! Ne reprenons pas de mauvaises habitudes !
M. Philippe Houillon. ... mais force est de constater que l'actualité nous y ramène.
Sous le titre «Des gendarmes bien informés», un grand quotidien affirme ce matin qu'«une partie de la hiérarchie parisienne du colonel Mazères n'ignorait rien de ses actions illégales».
Selon ses sources, des informations «remontaient régulièrement du sein même du GPS», dont les actions clandestines étaient «assez librement évoquées» entre hauts gradés. On aurait, ajoute l'auteur de l'article, «observé à distance» et laissé «une grande latitude pour programmer et parfois exécuter des opérations illégales de déstabilisation».
Il précise que «la direction de la protection et de la sécurité de la défense aurait été informée à deux reprises» des opérations du GPS.
A l'issue d'une procédure d'instruction, a fortiori lorsque plusieurs personnes y sont impliquées, il est rare que la vérité ne finisse pas par apparaître.
Pour l'instant, nous n'en sommes qu'au début, c'est-à-dire au stade des versions qui changent, au stade des contradictions: Mme Bonnet fait des déclarations précises et substantielles qui sont immédiatement démenties par son mari dans un communiqué diffusé par son avocat.
Au stade des invraisemblances: personne n'a alerté personne et personne n'est au courant de rien.
Au stade des craintes: ce matin, en commission, la majorité a refusé la création d'une commission d'enquête spécifiquement consacrée au GPS. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. Un peu de silence, s'il vous plaît ! Veuillez conclure, monsieur Houillon !
M. Philippe Houillon. Monsieur le ministre, au-delà des actes incroyables commis par des fonctionnaires assermentés, au-delà de la vérité, que nous connaîtrons forcément, au-delà des responsabilités, que personne ne veut assumer, ce qui nous importe, c'est votre parole devant la représentation nationale, c'est celle d'un ministre de la République devant les représentants du peuple.
Ma question est très simple: pouvez-vous affirmer solennellement à la représentation nationale que jamais la hiérarchie de la gendarmerie que vous dirigez n'a été informée des opérations du GPS, et que, par conséquent, les informations diffusées ce matin sont totalement erronées ?
Comme le rappelait lors d'un colloque ancien M. Kiejman, ancien ministre délégué à la justice de votre majorité, «dire la vérité quoi qu'il en coûte, c'est le fonctionnement de base». (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour le République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, M. le ministre de la défense, souffrant, vous prie de bien vouloir excuser son absence.
M. Yves Nicolin. Il s'est fait porter pâle !
M. le ministre de l'intérieur. Je vous répondrai avec tout le calme et la sérénité nécessaires. Votre question véhicule une rumeur colportée par un journal et somme le Gouvernement d'y répondre. Je pense que vous ne sauriez faire preuve de trop de prudence et de circonspection dans ce genre d'affaire.
J'ai déjà eu l'occasion de vous le dire et je le répète: il n'est pas décent de vouloir incriminer toute la hiérarchie de la gendarmerie nationale dans une affaire où il apparaît que les défaillances constatées sont celles de quelques-uns. Il n'est pas sain, il n'est pas normal de vouloir mettre en cause l'arme de la gendarmerie tout entière. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour le République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Gérard Saumade. Tout à fait !
M. le ministre de l'intérieur. Vous n'avez aucun autre élément que celui qui vous est fourni par des racontars colportés sans le moindre élément de preuve.
Une enquête judiciaire est actuellement en cours.
M. Guy Teissier et M. Franck Dhersin. Répondez à la question !
M. le ministre de l'intérieur. En outre, la commission d'enquête parlementaire pourra poser toutes les questions qu'elle voudra aux ministres qu'elle jugera concernés.
M. Pierre Carassus. Chirac aussi devrait permettre qu'on enquête sur lui !
M. le ministre de l'intérieur. Le Gouvernement n'a rien à craindre. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Il a dit toute la vérité. A chaque moment, il a dit tout ce qu'il savait, et il fait confiance aussi bien à la bonne marche de la justice qu'aux travaux des commissions parlementaires pour déterminer les responsabilités effectives.
Par contre, il n'accepte pas, sur un sujet qui intéresse l'unité de la République, que vous vous saisissiez à des fins politiciennes (Exclamations sur les mêmes bancs)...
M. Jean Pontier. Tout à fait !
M. le ministre de l'intérieur. ... d'une affaire que l'intérêt de tous commande de circonscrire à ce qu'elle est réellement. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Auteur : M. Philippe Houillon
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Collectivités territoriales
Ministère interrogé : intérieur
Ministère répondant : intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 mai 1999