Question au Gouvernement n° 1379 :
politique de l'emploi

11e Législature

Question de : M. Patrick Delnatte
Nord (9e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 26 mai 1999

M. le président. La parole est à M. Patrick Delnatte.
M. Patrick Delnatte. Monsieur le président, ma question s'adresse au remplaçant de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Dominique Strauss-Kahn a brossé ici même, la semaine dernière, un tableau idyllique de l'économie française. On avait rarement fait mieux dans l'autosatisfaction !
Pourtant, dans un pays confronté à une rude concurrence en Europe et dans le monde, on peut s'inquiéter que nos coûts salariaux restent parmi les plus élevés d'Europe. («C'est faux !» sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) Nos investissements productifs stagnent. La France est également le pays où les prélèvements fiscaux et sociaux des entreprises sont supérieurs de moitié à la moyenne européenne. («C'est faux !» sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
A cela, vous ajoutez votre priorité sur la politique des 35 heures. En créations nettes d'emplois, le bilan s'annonce, de l'avis même des plus optimistes, «mitigé»; pour les plus lucides, c'est un véritable ratage. L'avenir tranchera. Quoi qu'il en soit, c'est un nouveau carcan social très coûteux que vous voulez imposer.
Sur le plan des licenciements enfin, les syndicalistes nous confient sur le terrain combien la loi sur la réduction du temps de travail a des effets pervers en servant les plans de restructuration. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Yves Durand. Vous écoutez les syndicalistes maintenant ?
M. Patrick Delnatte. Après avoir durement critiqué vos prédécesseurs, vous vous décidez à reprendre une politique d'allégement des charges sociales. Mais, en fait, l'appellation est trompeuse, puisqu'il s'agit de compenser le surcoût des 35 heures, que vous financez non par des économies, mais par de nouveaux impôts sur les entreprises.
Pour nous, élus de bassins d'emploi à dominante textile,...
M. Maxime Gremetz. Et des quartiers défavorisés !
M. Patrick Delnatte. ... nous sommes confrontés à l'une des plus graves crises de l'histoire du textile, qui touche maintenant l'ensemble de la filière. On compte 230 000 emplois menacés en France. Dans le Nord - Pas-de-Calais, 1 830 salariés sont concernés par un plan de restructuration depuis le début de l'année.
Mme Odette Grzegrzulka. C'est la faute à Borotra !
M. Patrick Delnatte. En l'espace d'un mois et demi, 510 emplois ont été perdus à Roubaix et Tourcoing. Et c'est, à Roubaix, la fin du peignage Amédée, qui fut le plus grand peignage du monde.
Pour survivre, les entreprises se voient obligées de délocaliser leurs fabrications. Les autorités de Bruxelles tardent à mettre en oeuvre les clauses de sauvegarde.
Devant l'urgence, j'ai une double question à poser. (Exclamations sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.) Avant même l'application de la deuxième loi sur les 35 heures,...
M. Christian Bourquin. La question !
M. Patrick Delnatte. ... le Gouvernement entend-il mettre en oeuvre un plan d'allégement des charges sociales sur les emplois peu qualifiés, sans surcoût pour les entreprises concernées, avec pour objectif le maintien de l'emploi ?
M. Christian Bourquin. La question !
M. Patrick Delnatte. Ce plan doit concerner l'industrie textile, habillement et cuir, mais aussi d'autres industries de main-d'oeuvre pour être conforme à la réglementation européenne. Le succès peut être assuré. Vous avez eu un exemple grandeur nature avec le plan Borotra. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)
Deuxième question: à terme, lorsque Mme Aubry présentera sa deuxième loi sur les 35 heures, acceptera-t-elle de reprendre l'ensemble des dispositions contenues dans les accords de branche, en particulier celui du textile, signé par tous les syndicats ? Faute de quoi le dialogue social et la politique contractuelle n'auraient plus de sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat au budget.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le député, vous avez commencé votre intervention en énonçant plusieurs contrevérités. Je rappellerai que la croissance française, l'an dernier, a été la plus forte. Pour cette année, les organismes internationaux prévoient une croissance de 2,3 % en France, soit près d'un point de plus que pour l'Allemagne et l'Italie,...
M. Yves Nicolin. Arrêtez votre cirque !
M. le secrétaire d'Etat au budget. ... et nous comptons bien poursuivre dans cette voie.
La dernière enquête parue aujourd'hui fait état de 4 % de hausse des investissements productifs. Nous ne sommes donc pas dans la stagnation que nous avons éprouvée entre 1991 et 1997.
J'en viens à votre question précise sur l'industrie textile. Je ne reviendrai pas sur le fait que les dispositifs du plan Borotra, que vous avez évoqué, étaient consciemment incompatibles avec les règles européennes. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Bernard Accoyer. Et vos 35 heures, elles sont compatibles ?
M. Philippe Vasseur. Les salariés du textile apprécieront !
M. le secrétaire d'Etat au budget. Martine Aubry et Christian Pierret se battent depuis deux ans pied à pied pour éviter que les entreprises ne soient obligées de rembourser à la Commission de Bruxelles alors qu'elles ont été entraînées dans l'erreur.
Nous allons proposer, pour les entreprises qui le souhaitent, un plan de passage aux 35 heures qui sera particulièrement avantageux pour celles du secteur textile, lesquelles emploient beaucoup de main-d'oeuvre.
Nous allons, je vous le confirme, alléger les charges sur le travail non qualifié, fréquent dans l'industrie textile et les services, sans accroissement global du prélèvement sur les entreprises.
Les entreprises de main-d'oeuvre, particulièrement les petites et moyennes, paieront moins. Celles qui paieront un peu plus seront celles qui seront assujetties à la contribution sociale sur les bénéfices - contribution modérée -, ainsi que celles qui se verront soumises à un prélèvement fiscal au titre de la pollution.
Au total, nous allons, vous le voyez, dans le sens de la sauvegarde de l'emploi dans le textile, par des moyens qui soient corrects et dont les entreprises, et surtout les salariés, verront les bénéfices à terme. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Yves Nicolin. Personne ne vous croit !

Données clés

Auteur : M. Patrick Delnatte

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Emploi

Ministère interrogé : budget

Ministère répondant : budget

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 26 mai 1999

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