Question au Gouvernement n° 1384 :
politique fiscale

11e Législature

Question de : M. Marc Laffineur
Maine-et-Loire (7e circonscription) - Démocratie libérale et indépendants

Question posée en séance, et publiée le 27 mai 1999

M. le président. La parole est à M. Marc Laffineur.
M. Marc Laffineur. Monsieur le Premier ministre, la semaine dernière vous avez décidé d'augmenter l'impôt sur les entreprises et de créer une écotaxe. Ces nouveaux impôts vont financer l'augmentation du coût du salaire lié au passage aux 35 heures. Vous avez ainsi créé de nouvelles charges pour les financer. Tout cela parce que les 35 heures sont un échec: 15 000 emplois créés dans le secteur privé,...
M. Yves Cochet. Non ! 57 000 !
M. Marc Laffineur. ... sur les 400 000 prévus. Echec car le Gouvernement avait promis que les 35 heures ne coûteraient rien aux Français. Or c'est faux puisque les accords dans le secteur public donnent lieu à l'octroi de 500 millions de francs pour EDF. Le prix d'un «emploi Aubry» revient, dans ce secteur, à 110 000 francs pour les contribuables.
Deux ans après votre arrivée au pouvoir, vous avez augmenté l'impôt sur le revenu des retraités, vous avez augmenté la fiscalité de l'épargne, qui touche essentiellement les retraités, vous avez augmenté la CSG, vous avez augmenté les prélèvements qui pèsent sur les entreprises, et vous n'avez pas respecté votre promesse de baisser le taux normal de TVA.
M. Jean-Pierre Baeumler. Et la TVA Juppé ? 2 % d'augmentation !
M. Marc Laffineur. Pourtant, en ce moment, tous nos partenaires décident de baisser leurs dépenses publiques et leurs impôts: au Royaume-Uni, le gouvernement travailliste a baissé trois fois l'impôt sur les sociétés; en Suède, les syndicats militent pour une réduction de la fiscalité des entreprises pour éviter des délocalisations; en Allemagne, un projet de baisse de l'impôt sur les sociétés est en discussion.
Alors que vous avez décidé de différer le débat d'orientation budgétaire après les européennes afin d'éviter tout débat avant cette date, on ne peut que se demander si le Gouvernement entend abandonner sa politique de création et d'augmentation sans fin des impôts. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-alliance.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le député, le premier des engagements du Gouvernement était de faire de l'emploi sa priorité numéro un. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Nous l'avons fait et les premiers résultats sont là. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Nous l'avons fait en relançant la croissance. Pour cela, il fallait éviter ce que vous avez fait en quatre ans, à savoir un prélèvement de 200 milliards sur les ménages.
Nous l'avons fait en préparant les emplois de demain - nouvelles technologies, emplois-jeunes - et en réduisant la durée du travail.
M. Arnaud Lepercq. Parce que les emplois-jeunes sont les emplois de demain ?
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Lors de l'examen du budget du ministère de l'emploi et de la solidarité pour 1999, j'avais annoncé que la réduction de la durée du travail pouvait permettre la création de 40 000 emplois. Vous conviendrez avec moi que réduire la durée du travail nécessite une négociation ample et, pour donner des fruits, prend du temps. Eh bien, huit mois après le vote de la loi, nous comptons déjà 57 000 emplois («Ce n'est pas vrai !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et je m'étonne que vous mettiez en cause les 4 000 accords déposés dans mes services par les entreprises.
Je tiens à vous rassurer: je n'ai pas écrit ces accords moi-même. Et si vous avez besoin, comme le président du MEDEF, d'être renseignés, ces 4 000 accords sont à votre disposition au ministère de l'emploi et de la solidarité.
M. Jean-Michel Ferrand. Et tout cela dit sans même sourire !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Nous avions dit aussi - et j'avais cru comprendre que vous étiez d'accord avec l'objectif que nous nous fixions - que nous souhaitions réduire le coût du travail pour les salariés non qualifiés, afin de «boucler», si je puis dire, l'ensemble des réformes permettant d'accroître structurellement la création d'emplois dans notre pays. Nous avions annoncé, l'année dernière, que nous le ferions selon certaines conditions, c'est-à-dire dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale. Je peux vous dire aujourd'hui que le Gouvernement a respecté ses engagements.
M. Lucien Degauchy. Et les impôts !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Nous avions dit que nous souhaitions ne pas faire financer cette réduction des charges par les salariés, comme vous l'aviez fait avec la ristourne dégressive. («Et les impôts ?» sur les mêmes bancs.)
Nous avions dit que nous ne souhaitions pas une création globale complémenaire de prélèvements sur les entreprises. Or c'est bien à prélèvement global constant que nous faisons aujourd'hui la réforme: il n'y a pas de prélèvement complémentaire sur les entreprises.
M. Laurent Dominati et M. Francis Delattre. C'est faux !
M. Arnaud Lepercq. Mensonge !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Comme une directive européenne imposera une écotaxe d'ici quelques mois - les Allemands et les Anglais l'ont d'ailleurs mise en place - nous aurions très bien pu envisager un prélèvement complémentaire sur les entreprises. Nous avons préféré utiliser le montant de cette taxe pour réduire les charges sociales et donc pour aider les entreprises créatrices d'emplois par rapport à celles qui sont les plus capitalistiques.
M. Lucien Degauchy. Où est-ce qu'elle a vu ça ?
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. C'est pour mettre en place l'ensemble de ces dispositifs, et non pas, comme vous le dites, pour financer le coût de la réduction de la durée du travail, que nous faisons cette réforme.
M. Richard Cazenave. Qu'est-ce que cela veut dire ?
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Je vous donne rendez-vous à la fin de l'année, (Exclamations sur les mêmes bancs.)...
M. Charles Cova. Vous ne serez plus là !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. ... comme je l'avais fait en février dernier sur les emplois-jeunes. Six mois après le vote de la loi, vous nous disiez: «Vous n'y arriverez jamais !» Je ne vous ai pas entendu, au mois de novembre, dire que nous avions réussi, en nous donnant un mois de plus, à créer les 150 000 emplois-jeunes auxquels nous nous étions engagés.
Je vous donne donc rendez-vous pour voir ce que donnera la réduction de la durée du travail ! Une négociation exceptionnelle a lieu dans les entreprises. Les chefs d'entreprises et les salariés cherchent à concilier les problèmes de compétitivité et de conditions de vie au travail d'une façon tout à fait exemplaire. Et, surtout, 85 % des salariés sont aujourd'hui heureux d'avoir réalisé cette réduction de la durée du travail et des emplois sont créés.
M. Franck Dhersin. Quelle formation les emplois-jeunes offrents-ils aux jeunes ?
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Nous ferons donc le bilan fin décembre, mais indépendamment de cela, les Français jugeront («En effet !» sur les mêmes bancs) et feront la différence entre ceux qui ont des idées sur l'emploi et qui les mettent en oeuvre et ceux qui passent leur temps à critiquer sans jamais rien proposer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Données clés

Auteur : M. Marc Laffineur

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Impôt sur les sociétés

Ministère interrogé : emploi et solidarité

Ministère répondant : emploi et solidarité

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 mai 1999

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