étiquetage informatif
Question de :
M. Philippe de Villiers
Vendée (4e circonscription) - Députés n'appartenant à aucun groupe
Question posée en séance, et publiée le 3 juin 1999
M. le président. La parole est à M. Philippe de Villiers.
M. Philippe de Villiers. Monsieur le Premier ministre, après le scandale européen de la vache folle et au moment où les Français assistent, horrifiés, au développement quotidien de la crise européenne du poulet à la dioxine, une découverte capitale vient de démontrer ce que nous savions déjà mais que le Gouvernement feignait d'ignorer: les organismes génétiquement modifiés font courir à la santé publique des risques énormes.
Mme Odette Grzegrzulka. Ecolo de la dernière heure !
M. Philippe de Villiers. A partir de ces révélations, je voudrais, monsieur le Premier ministre, vous poser trois questions.
Première question: compte tenu de la lumière apportée sur le problème très grave des organismes génétiquement modifiés par cette découverte récente, pouvez-vous dire devant la représentation nationale que vous estimez, aujourd'hui encore, avoir pris la bonne décision en autorisant en France la culture du maïs transgénique ? N'avez-vous pas, comme beaucoup d'entre nous, le sentiment que votre ministre de l'environnement a cédé un peu vite à la pression de la Commission de Bruxelles...
M. Jacques Myard. Une fois de plus !
M. Philippe de Villiers. ... et donc aux multinationales agrochimiques américaines ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Jacques Myard. Cela vous gêne !
M. Philippe de Villiers. Deuxième question: pourquoi les lieux où se pratique en France la culture du maïs transgénique sont-ils aujourd'hui dissimulés à la population française, y compris aux élus que nous sommes, à commencer par mon département ? («Oh !» sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. Un peu de silence, s'il vous plaît !
M. Philippe de Villiers. Soyez assez aimables pour attendre la fin de ma question avant de protester. Je comprends qu'elle vous gêne. Vous savez que les députés non inscrits n'ont droit qu'à une question par an ! J'essaie de poser la mienne de manière non polémique. Elle requiert de notre part à tous, sous le regard des Français, un peu de patience et d'attention.
Plusieurs députés du groupe socialiste. La télé n'est plus là !
M. Philippe de Villiers. Naturellement ! La conférence des présidents s'est arrangée pour que cette question ne soit plus télévisée. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Pour les non-inscrits, c'est comme pour la campagne européenne: les grands partis, les grands appareils se partagent le temps de parole. Et là, on nous met à la fin pour ne pas retransmettre nos interventions !
M. le président. Monsieur de Villiers, vous cherchez un incident, vous ne le trouverez pas. Je suis là pour appliquer le règlement de l'Assemblée nationale. Il prévoit que, dans certaines conditions, les non-inscrits peuvent s'exprimer après les groupes. Vous avez demandé à poser une question, la conférence des présidents vous y a autorisé. Elle l'a fait dans le respect des droits et des devoirs de l'Assemblée nationale, qui valent pour tous les démocrates, c'est-à-dire, me semble-t-il, pour vous aussi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - M. Pierre Lellouche applaudit également.)
Terminez votre question, on va vous répondre, il n'y a pas de dialogue entre vous et le président.
M. Philippe de Villiers. Monsieur le président de l'Assemblée nationale, je n'accepte pas ce sous-entendu (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert) et je tiens à vous dire qu'il est scandaleux de renvoyer les questions des non-inscrits à la fin. Une démocratie adulte ne pratique pas ce genre de méthode. (Protestations sur les mêmes bancs.)
M. Christian Bataille. Inscris-toi chez les fachos !
M. Yves Fromion. Et toi chez les bolchos !
M. le président. Un peu de silence !
M. Philippe de Villiers. Trouvez-vous ces réactions normales, monsieur le président ?
M. le président. Terminez, s'il vous plaît, votre question.
M. Philippe de Villiers. Je terminerai lorsqu'il n'y aura plus de quolibets sur les bancs du Parti socialiste. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Troisième question: monsieur le Premier ministre, pourquoi le Gouvernement se montre-t-il incapable d'imposer un étiquetage précis sur les produits dérivés des OGM, qui entrent pour 60 % d'entre eux dans nos aliments quotidiens ?
Je comprends que ces questions vous gênent. La gauche se prétend écologique, mais la ministre de l'environnement restera dans l'histoire comme la ministre qui s'est tue sur la levée de l'embargo sur la vache folle, la ministre qui se tait sur la viande aux hormones, la ministre qui se tait sur la dioxine, la ministre qui a elle-même autorisé la culture des plantes transgéniques en France.
Monsieur le Premier ministre, quand allez-vous, une fois pour toutes, abroger les autorisations en faveur des aliments trafiqués ? (Applaudissements sur divers bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le député, sur la cohérence des décisions gouvernementales relatives aux organismes génétiquement modifiés, je vous renvoie au passé qui vit un gouvernement autoriser les importations et interdire la production, ce qui était, vous l'avouerez, d'une cohérence folle !
Ce gouvernement, quant à lui, a pris une décision cohérente, et il a toujours affirmé que la décision politique était soumise à l'évolution de la connaissance scientifique. Ma collègue Dominique Voynet et moi-même avons saisi la commission du génie biomoléculaire pour savoir si les éléments nouveaux auxquels vous faites allusion étaient susceptibles de modifier la connaissance scientifique et donc, éventuellement, la position du Gouvernement. C'est aussi simple que cela; nous interrogeons les scientifiques, et ils vont nous répondre.
Pour ce qui concerne votre deuxième question, je viens de donner des consignes très strictes aux directions départementales de l'agriculture pour que la plus grande transparence possible soit faite sur les parcelles cultivées en organismes génétiquement modifiés. Nous n'avons pas lieu d'entretenir une psychose par l'opacité, et il faut satisfaire la soif d'information de la population et des élus.
Enfin, s'agissant de l'étiquetage, il n'est pas si simple de déterminer si tel produit est OGM ou non, et ce pour des raisons scientifiques que je vous expliquerai, si nous en avons le temps, dans les couloirs. (Exclamations sur divers bancs.) En tout état de cause, nous ne pouvons pas prendre ce genre de décision au niveau national. Nous devons le faire au niveau européen, parce que l'Europe, vous le savez sans doute, monsieur de Villiers, est un marché unique où circulent librement les biens et les personnes. Nous sommes engagés dans des discussions au niveau communautaire pour essayer d'harmoniser les étiquetages OGM et non OCM. Cela prendra du temps, je ne le cache pas, mais ce travail est entamé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Philippe de Villiers
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Consommation
Ministère interrogé : agriculture et pêche
Ministère répondant : agriculture et pêche
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 juin 1999