centres pénitentiaires
Question de :
M. Guy Teissier
Bouches-du-Rhône (6e circonscription) - Démocratie libérale et indépendants
Question posée en séance, et publiée le 1er juillet 1999
M. le président. La parole est à M. Guy Teissier.
M. Guy Teissier. Ma question s'adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Le 4 mars 1998, j'interrogeais ici même Mme la garde des sceaux, dans le cadre des questions au Gouvernement, sur sa politique pénitentiaire. A cette époque, j'avais en particulier attiré son attention sur la situation du centre de détention des Baumettes, à Marseille, dont le manque chronique d'effectifs perturbe d'une manière non négligeable le fonctionnement.
Malgré ses engagements et ses propos, qui, à l'époque, se voulaient rassurants, malgré la mobilisation active des syndicats pour dénoncer, à juste titre, leurs conditions de travail, je me dois de vous signaler qu'un an plus tard aucune évolution n'a été constatée. Au contraire: sur trente-cinq départs cette année, seulement dix-sept ont donné lieu à un remplacement.
Devant tant de désinvolture et d'attentisme de la part du Gouvernement, il fallait s'attendre à ce qu'un drame survienne. C'est ainsi que, samedi dernier, cinq détenus ont tenté de recouvrer la liberté, au nom sans doute du fameux droit à l'évasion que certains de vos amis réclament de-ci de-là (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert),...
M. François Goulard. Eh oui !
M. Guy Teissier. ... et cela malgré la vigueur de la riposte des gardiens et l'efficacité des services de la police !
Cette sanglante évasion n'est certes pas la première et elle ne sera sans doute pas la dernière. D'ailleurs, tous les gardes des sceaux ont été confrontés à ce genre de situation. Cela dit, il n'est pas acceptable qu'un seul gardien soit chargé de la surveillance de 300 détenus.
Par ailleurs, il est inadmissible que des détenus connus pour leur dangerosité et leur caractère asocial puissent bénéficier, sans aucune précaution supplémentaire, des mêmes avantages que leurs congénères, alors que le code de procédure pénale dispose pourtant qu'il faut séparer les prévenus.
Ces faits devraient amener Mme la garde des sceaux à réexaminer les conditions de sécurité des centres pénitentiaires, à renforcer le nombre des gardiens en prison et à appliquer la loi avec rigueur. Ils doivent surtout la conduire à rééquilibrer sa politique en faveur des gardiens au lieu d'agir exclusivement en faveur des détenus. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
La pénitentiaire ne doit plus être considérée comme le parent pauvre du ministère.
Quel est donc le plan d'action du Gouvernement et, accessoirement, que prévoit-il pour la maison d'arrêt des Baumettes ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, Mme la ministre de la justice, garde des sceaux, est retenue au Sénat. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. André Santini. Ne pouvait-elle s'évader ?
M. le président. S'il vous plaît !
M. le ministre de l'intérieur. Je vous incite, mesdames et messieurs les députés, en cette veille de vacances, à modérer quelque peu votre expression.
Il y a eu, c'est vrai, une évasion par hélicoptère de cinq détenus à la prison des Baumettes. Ce n'est pas la première évasion réalisée par ce moyen.
Des dispositifs anti-évasion par filins ou filets de sécurité ont été mis en place pour un montant de 76 millions de francs, ce qui est loin d'être négligeable; et 38 millions de francs étaient inscrits dans les budgets 1998 et 1999.
Sur ces cinq détenus, deux ont été blessés par les gardiens de la pénitentiaire, qui ont fait feu à trente-trois reprises. Un autre est mort. Le quatrième a été rattrapé par un policier auquel je tiens à rendre hommage et qui, alors qu'il était sous la menace d'une arme, a fait feu et blessé son agresseur au genou. Cet agresseur a pu être arrêté. Le cinquième a réussi à prendre la fuite.
Néanmoins, le ministère de la justice et l'administration pénitentiaire font l'objet d'une réelle priorité. Monsieur le député, pour parler avec un peu d'objectivité sans faire au Gouvernement ou à sa majorité des procès d'intention qui seraient scandaleux s'ils n'étaient d'abord ridicules (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste. - Exclamations sur quelques bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants), je vous rappelle que le taux d'évasion en France est le plus faible de tous les pays d'Europe: 6,2 évasions pour 10 000 détenus, contre 18 en Allemagne, 25 en Angleterre, 16 aux Pays-Bas et 120 en Suède. C'est donc que les dispositifs adoptés sont beaucoup plus efficaces que vous n'avez l'air de le considérer.
M. Guy Teissier. Tout va bien !
M. le ministre de l'intérieur. Quant aux revendications, toujours légitimes, dont vous vous faites le porte-parole, il en sera débattu notamment à l'occasion de la préparation du budget. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Guy Teissier
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Système pénitentiaire
Ministère interrogé : intérieur
Ministère répondant : intérieur
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 1er juillet 1999