Question au Gouvernement n° 1558 :
politique fiscale

11e Législature

Question de : M. Gilles Carrez
Val-de-Marne (5e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 20 octobre 1999

M. le président. La parole est à M. Gilles Carrez.
M. Gilles Carrez. Monsieur le ministre de l'économie et des finances, au moment où s'engage la discussion du budget, vous continuez de promettre des baisses d'impôts, cette fois, bien entendu, pour l'an 2000, pour le troisième millénaire.
M. Patrick Ollier. Baisse virtuelle !
M. Gilles Carrez. Or toutes ces promesses sont contredites par les faits.
M. Dominique Dord. Exact !
M. Gilles Carrez. Ainsi, les statistiques internationales, établies de façon objective, démontrent que les prélèvements obligatoires continuent d'augmenter en France et que notre pays détient tous les records dans ce domaine.
Le président de notre assemblée, Laurent Fabius, ne manque pas une occasion de vous le rappeler. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Il a d'ailleurs dû convaincre les journalistes du journal Le Monde qui titre à la une de son édition de ce soir: «Pourquoi les impôts continuent d'augmenter.» (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Quant aux Français, nos concitoyens, ils ne sont pas dupes. Ils se sont bien rendu compte, avec l'avis d'imposition sur le revenu qu'ils ont reçu en septembre, avec l'avis de CSG, la contribution sociale généralisée, qu'ils reçoivent ces jours-ci, que, depuis que le gouvernement socialiste est au pouvoir, les impôts ne cessent d'augmenter, malgré toutes les promesses. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Pourtant, le Gouvernement bénéficie d'une situation économique favorable qui remplit les caisses de l'Etat. Mais, au lieu de rendre leur argent aux Français en abaissant leurs impôts, le Gouvernement préfère augmenter les dépenses publiques et le train de vie de l'Etat. Il préfère aussi, il faut le dire, se constituer une cagnotte, en vue des prochaines élections. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Quand le Gouvernement décidera-t-il enfin de passer des promesses non tenues aux actes et de diminuer les impôts, alors que la conjoncture le permet ? Monsieur le ministre, ne nous dites pas que la baisse est pour l'année prochaine. Plus personne ne vous croit. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. Vous savez que, de ce fauteuil, je ne peux pas vous répondre...
Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, vous avez la parole.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, si j'ai bien compris votre question - sinon vous me corrigerez -, vous avez dit que les prélèvements obligatoires augmentaient et, pourtant, que les recettes étaient plus importantes que prévu. Or il me semble que ce raisonnement manque de logique. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) En effet, si les prélèvements auront un peu augmenté cette année, c'est justement parce que les recettes auront été plus importantes que prévu. («Non ! Non !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) En disant vous-même, monsieur le député, que les prélèvements augmentent parce que les recettes sont plus importantes que prévu, vous exonérez la majorité et le Gouvernement. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
En effet, que se passe-t-il ?
A cet égard, vous devriez lire l'article du Monde dont vous n'avez cité que le titre. Si vous l'aviez lu, vous auriez eu la réponse à votre question et vous n'auriez pas eu besoin de me la poser. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Comme il est bon que nos concitoyens, qui ne lisent pas tous ce journal du soir, aient aussi cette réponse, je vais reprendre le contenu de ses colonnes.
Il y a deux raisons pour lesquelles, en 1999, le taux des prélèvements obligatoires aura été élevé. («Ah !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
La première tient au fait que l'inflation est plus faible que prévue.
M. Yves Nicolin. Et alors ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. En conséquence, pardonnez-moi cette explication technique, le dénominateur de la fraction qui donne le taux des prélèvements obligatoires est donc plus faible que prévu. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Parler de dénominateur est peut-être un langage technocratique dans cette assemblée. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Néanmoins, il me semble que vous pouvez aller jusque-là. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
La deuxième raison, monsieur le député, est que l'impôt sur les bénéfices va rapporter en 1999 plus que prévu. Il ne s'agit d'ailleurs pas d'une découverte puisque de hauts personnages de l'Etat l'ont annoncé aux Français dès le mois de juillet; le 14, si je me souviens bien. (Rires sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Il est vrai que mon ministère avait donné cette information dès le mois de janvier, mais il a fallu un certain temps pour la vérifier avant de la rendre publique. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert).
Les entreprises françaises ayant réalisé en 1998 plus de bénéfices que prévu, vont donc payer, en 1999, plus d'impôts que prévu. Cela engendrera, comme je l'ai indiqué dans les documents qui vous ont été remis il y a plus d'un mois, un excédent de recettes à la fin de l'année.
Avec cet excédent de recettes d'une dizaine de milliards et ce dénominateur de la fraction plus petit à cause d'une plus faible inflation, le taux des prélèvements obligatoires sera plus élevé que prévu.
Je sais combien vous taraude comme un regret cette hausse formidable du taux des prélèvements obligatoires de 1996. Je n'y reviens pas. C'est une vieille question qui vous concerne, vous et votre gouvernement de l'époque.
Enfin, monsieur le député, vous voulez savoir quand le Gouvernement fera baisser les impôts. («Ah !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
La réponse est extrêmement simple. Si vous nous faites l'honneur, après les questions au Gouvernement, d'assister au début de la discussion budgétaire, vous aurez l'information. En effet, le budget que vous allez voter, je l'espère, prévoit la plus forte baisse d'impôt dans notre pays depuis dix ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Vives exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Le fait que vous protestiez à ce point alors que les Français montrent clairement qu'ils en sont conscients (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...
M. le président. S'il vous plaît, mes chers collègues !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... montre bien votre déception. C'est en effet la gauche, mais sur les impôts qu'elle a choisis, notamment la TVA, qui aura le plus fortement réduit les impôts dans les années 90.
M. Philippe Auberger. C'est faux !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Vos électeurs le savent. Sans doute, vous le reprochent-ils, ce qui explique votre question. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Données clés

Auteur : M. Gilles Carrez

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 octobre 1999

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