Question au Gouvernement n° 1563 :
politique de la santé

11e Législature

Question de : M. Michel Herbillon
Val-de-Marne (8e circonscription) - Démocratie libérale et indépendants

Question posée en séance, et publiée le 21 octobre 1999

M. le président. La parole est à M. Michel Herbillon.
M. Michel Herbillon. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Madame la ministre, votre projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 ne soulève pas l'enthousiasme, c'est le moins que l'on puisse dire. Vous avez d'ailleurs reconnu ce matin qu'il était bancal, puisque vous avez dû reculer et renoncer - comme le demandait l'ensemble des partenaires sociaux - à l'idée de ponctionner l'UNEDIC pour financer les 35 heures.
Mais votre projet est tout aussi bancal en matière d'assurance maladie. Plusieurs dizaines de milliers de professionnels de santé, médecins, dentistes, psychiatres, sages-femmes, kinésithérapeutes, podologues et j'en passe, ont manifesté dans la rue, dimanche dernier, pour vous le faire savoir.
M. Maxime Gremetz. Vous n'y étiez pas !
M. Michel Herbillon. Ils demandent que le Gouvernement cesse de les considérer comme des coupables, comme des fautifs, et de les présenter comme les responsables du dérapage des dépenses maladie.
Ils expriment leur inquiétude face à la dérive de notre système de santé et face à l'absence de projet à moyen et à long terme du Gouvernement pour réformer véritablement et efficacement notre système de protection sociale.
Comme sur le problème des retraites, le Gouvernement préfère jouer la carte de l'immobilisme, se cantonner dans une politique de gestion purement comptable et se raccrocher à l'espoir que la croissance et les recettes supplémentaires suffiront à elles seules à résoudre les difficultés.
Ce n'est pas ainsi, madame la ministre, que vous créerez les conditions nécessaires à l'élaboration d'une véritable politique de santé publique, garantissant des soins de qualité à nos compatriotes et associant, dans un esprit de concertation et dans un climat de confiance, l'ensemble des professionnels de la santé.
Ce que redoutent les Français, madame la ministre, derrière votre logique purement comptable, c'est l'arrivée d'une médecine à deux vitesses dont ils ne veulent pas. Ils constatent que, petit à petit, nous glissons vers un système où les besoins réels de santé s'effacent devant la priorité donnée à l'équilibre budgétaire. Les Français craignent que notre système de soins à la française soit en train de disparaître et que, à terme, ils ne puissent plus choisir librement leur médecin.
Madame la ministre, ma question sera double.
Quand le Gouvernement cessera-t-il de faire peser toujours plus de contraintes, toujours plus de réglementations, toujours plus de tracasseries sur les professionnels de santé ?
Quand, au lieu de l'immobilisme et de la logique purement comptable, mettrez-vous en oeuvre une véritable politique de santé qui offrira enfin aux acteurs de la santé, aux médecins, aux malades, aux gestionnaires d'hôpitaux des règles du jeu et des outils leur permettant de faire preuve, en toute liberté, de comportements responsables ?
Avant que vous ne me répondiez, madame la ministre, j'ai une requête à vous adresser. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) De grâce, épargnez-nous la sempiternelle réponse que le Gouvernement réserve à chacune des questions de l'opposition ! Nous en avons eu encore l'exemple hier, lorsque vous êtes remontée aux années soixante. Epargnez-nous ce couplet qui consiste à vous défausser systématiquement sur ce qu'auraient fait ou n'auraient pas fait les précédents gouvernements. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Madame la ministre, le coup de l'héritage, le coup du «c'est pas moi, c'est l'autre», ce n'est plus crédible ! Vous êtes au pouvoir depuis deux ans et demi maintenant et ce qu'attendent les Français, ce sont les réponses du gouvernement actuel à leurs préoccupations d'aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le député, bien sûr, je vais accéder à votre requête. («Ah» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
D'abord, je ne peux pas dire que l'excédent de la Sécurité sociale qui sera dégagé l'année prochaine, c'était vous. Puisque c'est nous ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Ensuite, la manifestation contre la gestion comptable à laquelle vous faites allusion, c'est celle d'il y a quatre ans. Ce n'est pas celle de dimanche dernier. Je l'ai suivie. Les professionnels de la santé n'étaient pas des dizaines de milliers, vous le savez. Les généralistes n'étaient pas là, de nombreux spécialistes non plus, les pharmaciens n'étaient pas là, pas plus que tous ceux qui, aujourd'hui, acceptent la politique du Gouvernement, une politique qui se fait avec les médecins et les professionnels de santé. Pourtant, c'est vrai, certains continuent à renâcler contre une politique qui vise à pérenniser la Sécurité sociale, à mieux allouer nos ressources et à améliorer la qualité des soins.
Depuis deux ans, nous avons signé un accord avec les généralistes qui respectent aujourd'hui les honoraires.
Nous avons mis en place des schémas régionaux d'organisation de la santé. Les hôpitaux et les cliniques respectent aujourd'hui leur budget.
Nous avons négocié avec les spécialistes qui - dérapaient - et nous avons conclu des accords avec les radiologues, les cardiologues, avec les pharmaciens, qui mettent en place aujourd'hui la substitution par les médicaments génériques, et même avec l'industrie pharmaceutique, à laquelle vous n'aviez jamais osé toucher.
Aujourd'hui, les Français sont heureux de savoir que les taux de remboursement des médicaments seront fixés en fonction de l'effet médical et non pas de tractations dans un bureau du ministère de la santé. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Jean Bardet. Cela ne veut rien dire !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Aujourd'hui, les Français constatent que, peu à peu, car ce n'est pas facile, les comptes de la sécurité sociale se redressent et que nous luttons contre les inégalités hospitalières.
M. Jean Bardet. Nous allons vers une médecine à deux vitesses!
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. A cet égard, je souhaite les rassurer, puisque c'est là aussi votre requête: il ne sera pas porté atteinte à la liberté de choix des médecins. Même les 6 millions de Français qui vont bénéficier de la couverture universelle, et qui seront donc soignés gratuitement, pourront choisir leur médecin, leur hôpital ou leur clinique.
Alors moi aussi, monsieur Herbillon, j'ai une requête à vous adresser: sortez des slogans, regardez les faits, les Français apprécieront. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Données clés

Auteur : M. Michel Herbillon

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Santé

Ministère interrogé : emploi et solidarité

Ministère répondant : emploi et solidarité

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 octobre 1999

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