Question au Gouvernement n° 1576 :
durée du travail

11e Législature

Question de : M. Thierry Mariani
Vaucluse (4e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 27 octobre 1999

M. le président. La parole est à M. Thierry Mariani.
M. Thierry Mariani. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Madame la ministre, vous avez, pendant deux semaines, tenté de nous expliquer que votre réforme sur la réduction autoritaire du temps de travail à 35 heures était financée.
Mme Odette Grzegrzulka. Et elle a formidablement réussi !
M. Thierry Mariani. On avait du mal mais on finissait par avoir un doute.
Pendant deux semaines, malgré nos protestations, malgré le refus des partenaires sociaux de contribuer à ce qui constituait un véritable hold-up sur les fonds sociaux, vous vous êtes obstinée et vous nous avez répondu quelquefois avec mépris, souvent avec mauvaise foi, toujours avec l'autosatisfaction qui caractérise votre Gourvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Aujourd'hui, sous la pression unanime et légitime des partenaires sociaux, vous renoncez à faire appel aux organismes paritaires pour financer votre projet.
M. Jacques Myard. Ca s'arrose !
M. François Goulard. Elle a cédé !
M. Thierry Mariani. Mais ce recul - cette retraite -...
M. Jacques Myard. La Bérézina !
M. Thierry Mariani. ... tout comme votre financement, n'est que virtuel.
En effet, vous allez prélever 5,6 milliards de droits sur les alcools qui étaient jusqu'à présent versés au fonds de solidarité vieillesse pour compenser directement le coût de la réduction du temps de travail, mais, dans le même temps, vous prélevez la même somme à la sécurité sociale pour alimenter le fonds de réserve des retraites, qui devrait être pour partie financé par les excédents du fonds de solidarité vieillesse.
En bref, au lieu de financer les 35 heures, les partenaires sociaux financeront directement le fonds de réserve sur les retraites. Le problème reste donc entier. Votre loi n'est toujours pas financée. Les 35 heures, comme tous vos projets, semblent reposer sur des fondations de papier.
Ma question est donc très simple. Comment comptez-vous financer concrètement le coût du passage aux 35 heures autrement qu'en taxant davantage les entreprises, les partenaires sociaux, les retraités et les classes moyennes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le député, je constate que la visite d'un haut dignitaire chinois vous inspire et je m'en réjouis, mais vous verrez que notre financement n'est pas de papier mais beaucoup plus dur qu'un grand nombre de ceux que vous avez mis en place pendant que vous étiez au pouvoir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste. - Protestations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Vous avez l'air de vous réjouir que nous ayons modifié notre dispositif après discussion avec les partenaires sociaux. Je l'avais annoncé dès le 7 septembre à la commission des affaires sociales et nous en avons parlé à plusieurs reprises, monsieur Mariani, vous le savez bien, lors de l'examen de la loi sur la durée du travail. Je n'ai jamais dit pendant les débats, tout le monde peut en lire le compte rendu, que tout était financé. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Jean-Louis Debré. Quel aveu !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. J'ai expliqué que nous continuerions à discuter et je vous en apporterai tout à l'heure la preuve. Vous avez d'ailleurs vous-même fait référence la semaine dernière, à l'occasion d'une question, au fait que les discussions n'étaient pas terminées.
J'en viens au fond.
Nous allons discuter dans quelques instants du projet de loi de financement de la sécurité sociale qui continue à permettre l'engagement de deux grandes réformes que le Gouvernement réalise avec sa majorité: la réduction de la durée du travail et la baisse des charges sociales. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Ne vous en déplaise, grâce à ces grandes réformes, la confiance revient, la croissance est là (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), le chômage recule (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste), et, bien que certains l'aient souhaité, nous ne renonçons pas, car cela aurait été alors une reculade politique, à ces réformes qui vont dans le sens de la réduction du chômage et qui sont attendues pas nos concitoyens.
M. Lucien Degauchy. Elle n'y croit plus !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Lorsque nous avons proposé aux partenaires sociaux il y a quelques mois de faire ce qu'eux-mêmes avaient fait en finançant l'ARPE ou les conventions de coopération, ce que mon prédécesseur a fait en finançant les AFR, sur le dos de l'UNEDIC, allais-je-dire, ils n'ont pas accepté une telle activation des dépenses passives, comme ils l'appelaient. Nous avons donc remis le travail sur la table et nous avons discuté avec eux pour trouver de nouvelles modalités.
M. Lucien Degauchy. C'est de l'improvisation !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Où en sommes-nous aujourd'hui ? Notre réforme, sur quatre à cinq ans, coûtera environ 105 milliards de francs et nous savons comment en financer 85 %. J'aurais aimé qu'il en soit ainsi an lorsque M. Juppé a fait voter la ristourne dégressive. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) Lorsque je suis arrivée en 1997, première année d'application, il manquait déjà 7 milliards ! Nous avons dû les trouver ! (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Que dire de la baisse de l'impôt sur le revenu pour laquelle nous avons dû trouver 40 milliards. Certains expliquent même que nous sommes là aujourd'hui parce que le Président de la République avait peur qu'on ne puisse pas participer à l'euro faute d'avoir financé cette grande réforme !
M. Lucien Degauchy. C'est nul !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Et que dire, enfin, de cette grande loi sur la famille que M. Balladur a fait voter, qui a entraîné 14 milliards de déficit de la branche famille (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et qui, si elle avait été appliquée, aurait entraîné un déficit de 25 milliards ? (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Finalement, ce qui vous intéresse aujourd'hui, c'est de commenter les commentaires, de savoir qui sort gagnant de telles ou telles discussions. Nous, ce qui nous intéresse, ne vous en déplaise, c'est de voir que le chômage recule, que les Français vivent mieux, et de nous dire que c'est peut-être un peu grâce à nous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Vives exclamations et huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Données clés

Auteur : M. Thierry Mariani

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Travail

Ministère interrogé : emploi et solidarité

Ministère répondant : emploi et solidarité

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 octobre 1999

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