Question au Gouvernement n° 1619 :
magistrats

11e Législature

Question de : M. Rudy Salles
Alpes-Maritimes (3e circonscription) - Union pour la démocratie française-Alliance

Question posée en séance, et publiée le 4 novembre 1999

M. le président. La parole est à M. Rudy Salles.
M. Rudy Salles. Monsieur le président, avant de commencer mon propos, et afin de détendre l'atmosphère, j'indique à M. le Premier ministre, qui a donné tout à l'heure des leçons de grammaire à notre ami Patrick Ollier, que je tiens à sa disposition le fac-similé d'un manuscrit qu'il a distribué à la presse lorsqu'il était ministre de l'éducation nationale, lors du congrès de Rennes, et qui ne compte pas moins de cinq fautes d'orthographe. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. Monsieur Salles, ce n'est pas ce qu'on a retenu pour l'essentiel du congrès de Rennes. (Sourires.) Veuillez poser votre question.
M. Rudy Salles. En tout cas, monsieur le Premier ministre, le groupe RPR pourra assurer la correction de vos écrits...
Madame la garde des sceaux, je reviendrai sur une question essentielle, abordée par plusieurs de mes collègues mais à laquelle vous n'avez pas apporté de réponse suffisamment claire pour être convaincante: je veux parler de votre rôle de garde des sceaux à l'égard d'événements récents qui alimentent abondamment la presse aujourd'hui.
J'évoquerai le cas de Mme Anne-José Fulgeras. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Elle était chef de la section financière du parquet de Paris. Son changement de poste aussi brutal qu'inattendu, dans un contexte fort peu opportun, reconnaissez-le, ne manque pas de semer le trouble.
D'autant qu'il semble, d'après les informations publiées aujourd'hui dans la presse, que Mme Fulgeras, très affectée par cette mesure, n'avait ni demandé ni souhaité ce changement. Il s'agit donc bien d'une mise à l'écart. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) On ne peut en effet pas parler de promotion: elle ne sait pas elle-même le poste qu'elle va occuper.
Vous avez d'ailleurs dit, dans votre réponse à notre collègue Pascal Clément, qu'il y avait un classement vertical et un classement territorial des magistrats. Mme Fulgeras a donc été victime d'un classement vertical !
On ne peut pas non plus invoquer la mobilité nécessaire. Nous avons tous en tête les noms de magistrats instructeurs qui exercent leur mission dans la même section depuis longtemps. Avez-vous un avis du Conseil supérieur de la magistrature sur ce sujet ? Cette question est, elle aussi, restée sans réponse.
En tout cas, cette procédure contrevient totalement et fâcheusement aux usages et aux traditions concernant le remplacement de titulaires de postes sensibles. Où est donc passée l'indépendance des magistrats, qui figure sans cesse dans vos discours mais qui s'évapore dans vos actes ?
Nous vous avons demandé quelle signification pouvait revêtir un tel changement ? Nous n'avons évidemment pas reçu de réponse acceptable.
Je voudrais aussi revenir sur les réactions qui ont été les vôtres ces dernières quarante-huit heures, depuis la démission de votre collègue Dominique Strauss-Khan.
Quand on vous entend dire que l'affaire n'est en aucun cas une affaire de financement d'un parti politique, alors même que nombre de responsables socialistes sont impliqués, faut-il conclure, si l'on vous suit, que les personnes mises en cause le sont pour des raisons d'enrichissement personnel ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Je conçois très bien la sympathie que vous pouvez éprouver à l'égard de votre ancien collègue. Mais comment accepter que le garde des sceaux aille jusqu'à clamer sur les plateaux de télévision l'innocence d'un témoin impliqué dans une affaire judiciaire ? Il y a là une nouvelle atteinte à l'indépendance de la justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Madame la garde des sceaux, quand allez-vous enfin apporter à la représentation nationale, c'est-à-dire aux Français, des réponses claires en forme d'actes et non de simples discours, à ces questions fondamentales, pour nous permettre de croire encore à l'indépendance de la justice ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, le Premier ministre a répondu sur la MNEF, et je crois qu'il n'y a rien à ajouter à sa réponse. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Quant à Dominique Strauss-Kahn, s'il est mis en cause par la justice, il est présumé innocent. Je tiens à redire ici, en tant que garde des sceaux, qu'il a le droit, comme chacun d'entre nous, à la présomption d'innocence. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Quant au reste, je ferai appel, puisque vous avez commencé votre propos en faisant référence à des règles grammaticales et à des fautes d'orthographe, à vos souvenirs de collégien et peut-être de latiniste, en vous répondant: bis repetita non placent. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Données clés

Auteur : M. Rudy Salles

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 novembre 1999

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