Question au Gouvernement n° 1679 :
relations entre le Parlement et le Gouvernement

11e Législature

Question de : M. Philippe Houillon
Val-d'Oise (1re circonscription) - Démocratie libérale et indépendants

Question posée en séance, et publiée le 24 novembre 1999

M. le président. La parole est à M. Philippe Houillon.
M. Philippe Houillon. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, mais elle interpellera également, je le crois, M. le président de notre assemblée, que je prends à témoin, ainsi que l'ensemble de mes collègues. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Monsieur le Premier ministre, il y a plusieurs jours, le ministre de l'intérieur affirmait, en marge d'une procédure judiciaire en cours, que les griefs faits à votre précédent ministre de l'économie et des finances, et issus pour partie des travaux de la police scientifique, ne reposaient sur aucune réalité.
Aujourd'hui, à la suite du dépôt de deux rapports parlementaires sur la Corse, et bien que vous ayez curieusement demandé le silence à vos ministres (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste) tout en parlant de transparence - un mot dont je rappelle qu'il ne figure pas moins de quatre fois dans votre discours de Strasbourg -, le même ministre de l'intérieur s'en prend avec mépris au Parlement et aux parlementaires, et en l'occurrence à des députés de votre majorité, ce qui indique que ce mépris s'adresse à l'institution et non pas à un adversaire politique. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
Ces rapports dressent des tableaux accablants, à divers titres. Sur le fond, le ministre de l'intérieur prétend que tout est faux, ce qui devient une habitude, ou encore que l'affaire Marion est «une affaire de corne-cul».
Mais au-delà du fond, le plus grave demeure l'atteinte vulgaire portée à la dignité et au travail de notre assemblée et du Parlement, travail qualifié de «tempête ridicule qui ne repose sur quasiment rien» ...
M. Yves Nicolin. Les propos du ministre sont honteux !
M. Philippe Houillon. ... ou «de ragots ordinaires» ou encore «de commérages».
Cet antiparlementarisme non seulement est inacceptable, mais il remet également en cause la légitimité même du contrôle du Parlement et, au total, le fonctionnement de nos institutions. C'est la raison pour laquelle, nous allons saisir de cette question M. le président de l'Assemblée nationale.
Que pensez-vous, monsieur le Premier ministre, des déclarations de votre ministre de l'intérieur sur le travail parlementaire ?
Quelle est votre conception de la fonction de contrôle du Parlement et de la séparation des pouvoirs ?
Selon vous, le Parlement doit-il servir à quelque chose ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. le président. Madame la ministre...
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le député («Pas vous !» et vives protestations sur les bancs du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), je voudrais vous faire remarquer plusieurs choses.
Tout d'abord, ce que j'aurais affirmé sur un certain nombre de documents qui avaient été publiés par la presse a été démenti par cette même presse...
M. Maurice Leroy. C'est faux !
M. le ministre de l'intérieur. ... avant que je ne confirme que ces documents n'avaient pas de réalité, ou tout au moins que ces assertions n'avaient pas de réalité.
M. Maurice Leroy. C'est faux !
M. le ministre de l'intérieur. S'agissant de l'affaire de la commission d'enquête parlementaire,...
M. François d'Aubert. Ah non, ce n'est pas une affaire !
M. le ministre de l'intérieur. ... j'ai fait un certain un nombre de commentaires...
M. Arnaud Lepercq. Il n'y a pas à en faire !
M. le ministre de l'intérieur. ... bien que, naturellement, le sujet soit, je vous le rappelle, couvert en principe par le secret de l'instruction judiciaire. (Protestations sur les mêmes bancs.)
M. Jean Bardet. C'est comme le secret médical !
M. le ministre de l'intérieur. La critique est très facile, monsieur le député, l'action est plus difficile.
Je rappelle que des règles s'imposent,...
M. Arnaud Lepercq. Lesquelles ?
M. le ministre de l'intérieur. ... par exemple en matière de dévolution des affaires aux différents juges, qu'ils soient les juges antiterroristes ou les juges du siège (Exclamations sur les mêmes bancs),...
M. Dominique Dord. Répondez à la question !
M. le ministre de l'intérieur. ... ou en matière de dévolution des enquêtes aux différents services: DNAT, SRPJ, gendarmerie.
M. Francis Delattre. Ce n'est pas la question !
M. le ministre de l'intérieur. De même, j'indique que des pièces de procédure sont communiquées aux parties civiles, ce qui favorise les indiscrétions.
Je rappelle que dans l'affaire qui nous occupe, l'affaire Erignac, le rapport Marion a été rendu public en décembre. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
M. Michel Hunault. Ce n'est pas une réponse !
M. Dominique Dord. Cela n'a rien à voir !
M. le ministre de l'intérieur. Une enquête de gendarmerie a été rendue publique par un journal du soir le 3 février, compromettant la marche de l'enquête, qui a cependant abouti, grâce aux efforts de la DNAT.
Je ne peux pas accepter que l'on puisse, sans connaître le fond d'une affaire, qualifier de «personnage» quelqu'un qui a mené à bien, lui et ses équipes,...
M. Franck Dhersin. Ce n'est pas la question !
M. le ministre de l'intérieur. ... l'élucidation d'une affaire aussi difficile ! (Exclamations sur les mêmes bancs.)
J'ajoute que je suis prêt à faire confiance à tous ceux qui comprennent que, dans une affaire aussi difficile que celle de la Corse, seul le sens de l'Etat, au-dessus des passions partisanes,...
M. Yves Nicolin. Hors sujet !
M. le ministre de l'intérieur. ... qu'elles soient de droite ou de gauche, peut nous permettre de remonter le courant et de rétablir la sécurité dans les deux départements de cette région. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
M. Lucien Degauchy. Vous avez répondu à côté de la question !

Données clés

Auteur : M. Philippe Houillon

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Parlement

Ministère interrogé : intérieur

Ministère répondant : intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 novembre 1999

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