Question au Gouvernement n° 1680 :
relations entre le Parlement et le Gouvernement

11e Législature

Question de : M. Dominique Dord
Savoie (1re circonscription) - Démocratie libérale et indépendants

Question posée en séance, et publiée le 25 novembre 1999

M. le président. La parole est à M. Dominique Dord.
M. Dominique Dord. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Plusieurs députés du groupe Démocratie libérale et Indépendants. Il n'est pas là !
M. Dominique Dord. Alors que notre pays traverse, avec l'affaire corse, une crise institutionnelle grave, que des conflits internes paralysent les services de police, que des hauts magistrats en appellent au Président de la République, hier, à l'occasion de la séance des questions au Gouvernement, notre collègue Philippe Houillon a interrogé solennellement le Premier ministre sur les propos blessants et méprisants de Jean-Pierre Chevènement à l'encontre de la représentation nationale. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.) Mais, alors que la question lui était adressée personnellement, il a préféré désigner Mme la garde des sceaux pour y répondre, et c'est d'ailleurs à elle que le président avait donné la parole, comme en atteste le Journal officiel. Quelle ne fut donc pas notre surprise - et celle du Premier ministre - de voir M. le ministre de l'intérieur se ruer sur le micro. (Rires sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Ce curieux scénario - je salue votre arrivée dans l'hémicycle, monsieur le Premier ministre - montre que les dysfonctionnements atteignent désormais tous les rouages de l'Etat. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Malgré son empressement, contre votre volonté, monsieur le Premier ministre, Jean-Pierre Chevènement n'a pas cru devoir répondre à notre collègue Houillon. Il a jugé bon de ne rien dire sur les conflits internes au sein même de son ministère et a tenté un dégagement sur une autre vraie question d'ailleurs, celle de la séparation des pouvoirs judiciaire et législatif. Cette question légitime est aujourd'hui soulevée, en effet, par un certain nombre de magistrats, notamment antiterroristes, mais n'était pas celle de Philippe Houillon.
Aussi, monsieur le Premier ministre, c'est à vous et à vous seul que je repose la même question à laquelle Jean-Pierre Chevènement n'est évidemment pas qualifié pour répondre. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) A moins qu'il ne souhaite, par hasard, présenter quelques excuses aux parlementaires de la majorité et de l'opposition qui ont siégé au sein des commissions d'enquête et qu'il a insultés dimanche sur TF 1. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Monsieur le Premier ministre, sans argumenter à votre tour sur la séparation des pouvoirs judiciaire et législatif - encore une fois, c'est une autre question que ne manqueront sans doute pas de soulever nos collègues au cours de cette séance de questions - dites-nous très simplement si vous regrettez et condamnez les propos méprisants et, pour tout dire, pas du tout à la hauteur de la crise, de votre ministre de l'intérieur à l'égard de nos collègues de la majorité et de l'opposition, propos qui nourrissent l'antiparlementarisme et portent atteinte à la crédibilité et à la respectabilité de notre assemblée. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur divers bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux. (Exclamations sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, je suis très heureuse de répondre à votre question. Sachez d'abord que Jean-Pierre Chevènement et moi travaillons ensemble (Rires et exclamations sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance) et que, lorsqu'un membre du Gouvernement s'exprime, c'est au nom de l'ensemble du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
S'agissant du travail des commissions parlementaires, je veux souligner, ce qui n'a peut-être pas été suffisamment fait, notamment par la presse dont on sait qu'elle ne signale jamais les trains qui arrivent à l'heure (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste), que le fonctionnement des services publics, et, en particulier, du service public de la justice, faisait l'objet de louanges dans ces deux rapports.
M. Dominique Dord. Ce n'est pas la question !
M. Michel Meylan. Baratin !
Mme la garde des sceaux. Le rapport du Sénat, où la majorité n'est pas favorable au Gouvernement et dont je loue l'objectivité, fait observer que, dans le domaine de la justice en Corse, on est passé de «l'inertie» au «sursaut».
M. Michel Meylan. Ces propos sont inadmissibles !
Mme la garde des sceaux. Il souligne encore un changement bienvenu dans l'attitude des juges depuis deux ans.
M. Dominique Dord. Ce n'est pas la question !
Mme la garde des sceaux. Il constate aussi une fermeté nouvelle de la justice en Corse.
M. Michel Meylan. Baratin !
Mme la garde des sceaux. Aucun des deux rapports parlementaires ne met en cause la centralisation du traitement des affaires terroristes à Paris. Et tous deux soulignent à quel point la répartition du travail se fait harmonieusement entre les magistrats corses et les magistrats parisiens.
Bien entendu, monsieur le député, le Gouvernement tiendra le plus grand compte des propositions des rapports parlementaires car certaines choses peuvent être améliorées.
Sachez que j'ai demandé pour le début de l'an prochain un rapport au procureur général de Corse sur le fonctionnement de la justice criminelle en Corse. J'ai également demandé aux magistrats parisiens et corses de réfléchir, au vu des suggestions du rapport de l'Assemblée nationale, sur la façon d'améliorer encore la répartition des compétences entre magistrats parisiens et corses. Enfin, sur la question très importante de la criminalité organisée qui est abordée dans le détail par le rapport de l'Assemblée, j'ai demandé que soit mise en place une commission de réflexion comprenant des magistrats corses et des représentants des services fiscaux, des douanes, des banques ainsi que du TRACFIN, afin de cerner de plus près les contours de la criminalité organisée en Corse. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Données clés

Auteur : M. Dominique Dord

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Parlement

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 novembre 1999

partager