mer et littoral
Question de :
M. Bernard Grasset
Charente-Maritime (2e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 22 décembre 1999
M. le président. La parole est à M. Bernard Grasset.
M. Bernard Grasset. Sans qu'on sache avec précision où et quand elle frappera, la marée noire menace les rivages atlantiques et notamment ceux de Vendée et de Charente-Maritime. Non seulement, elle risque de souiller les plages et de causer la mort de nombreux oiseaux de mer mais elle menace aussi les ressources halieutiques - je pense au plateau de Rochebonne. Elle peut également empêcher les actions de pêche et endommager gravement les chaluts. Elle risque, et pour longtemps, de porter un immense préjudice aux bassins mytilicoles et ostréicoles.
Certes, il faut le souligner, la qualité des huîtres et des moules pour ces fêtes de fin d'année n'est pas mise en cause: elle reste excellente puisqu'elles sont déjà en bassins, prêtes à l'expédition.
Les services de l'Etat, notamment ceux de l'équipement, de la protection civile et de la marine nationale, les administrations et les autorités locales déploient des efforts considérables mais ils risquent de se révéler dérisoires quelle que soit la bonne volonté de tous.
Au nom des professionnels de la mer et des élus du littoral concernés, je voudrais poser quatre questions.
Premièrement, toutes les mesures de sauvegarde ont-elles été prises dès les signes d'avarie et de détresse du pétrolier Erika ?
Deuxièmement, la société TotalFina, qui s'est montrée plus brillante en bourse et en fusions d'entreprises, a publié à propos de cette pollution, dont elle semble se laver les mains, un communiqué scandaleux. N'est-il pas nécessaire de lui rappeler les responsabilités qu'elle semble fuir ?
Troisièmement, avant qu'une autre catastrophe ne se produise, quelles mesures, internationales, européennes et nationales, convient-il de prendre pour éviter le passage à proximité de nos côtes de telles épaves encore flottantes ?
Quatrièmement, quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre afin d'indemniser, le cas échéant, les ostréiculteurs, les mytiliculteurs et les marins, et de venir en aide aux élus locaux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Pour ce qui est de l'information, monsieur le député, depuis une semaine, à ma demande, les services de l'Etat publient deux fois par jour tous les éléments dont ils disposent concernant le risque de pollution sur les côtes et la dérive de la marée noire.
Le bulletin le plus récent prévoit un risque de contact à l'ouest de l'île d'Yeu dans la nuit du 24 au 25 décembre, entre minuit et 6 heures du matin. Bien entendu, les services de Météo-France, de l'IFREMER et du CEDRE, affinent ces prévisions de telle sorte que nous puissions déployer tous les dispositifs de protection à l'endroit le plus précis possible.
Les marins pêcheurs et la marine nationale sont, en toute hypothèse, mobilisés pour protéger l'île d'Yeu.
Bien entendu, toutes les dépenses encourues par les marins pêcheurs du fait de leur participation à la prévention mais aussi des conséquences éventuelles de la catastrophe seront prises en charge par l'Etat.
Hier, nous n'avons pu pomper que 50 à 60 tonnes de mazout. Aujourd'hui, le pompage se fait avec neuf bateaux, français et étrangers, dans le cadre de la convention qui régit ce genre de situation, et, ce soir, entre 800 et 1 000 tonnes de mazout devraient avoir été pompées. La fragmentation des nappes ne facilite pas les choses mais le pompage des nappes visibles est actuellement assez efficace.
Une enquête technique et administrative a été ouverte, ainsi qu'une enquête judiciaire. Il est hors de question que quiconque puisse y échapper. Les responsabilités de chacun seront établies, et ce n'est bien sûr qu'à la suite de ces enquêtes que des décisions seront prises.
Des initiatives particulières ont été prises ces dernières années. Je citerai simplement le renforcement des dispositifs de surveillance des côtes, avec un budget en augmentation de plus de 15 %. Beaucoup de choses pourraient être dites sur ce point, notamment la nécessité d'augmenter les capacités de contrôle des navires, avec l'objectif de doubler le nombre d'inspecteurs en France d'ici à l'an 2002.
Au-delà, une campagne internationale est absolument nécessaire, parce qu'il s'agit d'un trafic international pour l'essentiel. Nous proposons qu'une charte d'efficacité pour la sécurité des navires soit acceptée par tous. La constitution de bases de données que la France a proposée dans le cadre du projet EQUASIS devrait y contribuer. L'Europe est d'accord, d'autres pays également. Dans le même esprit, nous poursuivons une action très vigoureuse au sein de l'OMI. Il est totalement aberrant, alors qu'on n'a plus le droit de construire des pétroliers sans double coque, que l'on tolère une seule coque jusqu'en 2008 ou 2010.
M. Jean-Claude Beauchaud. Absolument !
M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement. Je dois dire ma colère. Je l'avais exprimée la semaine dernière. Je trouve qu'en termes de sécurité, à la fois pour les équipages et pour l'environnement, la complaisance ne doit pas être de mise dans le transport maritime. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Bien entendu, nous déployons des moyens budgétaires pour que le plan Polmar-mer, qui est actuellement mis en oeuvre, et le plan Polmar-terre, qui le sera dès demain, permettent d'éviter le plus de préjudices possible. Le Gouvernement fera en sorte que les questions d'indemnisation, si cela se révèle nécessaire, soient traitées de façon telle que personne ne voie sa situation aggravée par cette marée noire. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Bernard Grasset
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Déchets, pollution et nuisances
Ministère interrogé : équipement et transports
Ministère répondant : équipement et transports
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 22 décembre 1999