Question au Gouvernement n° 1773 :
mer et littoral

11e Législature

Question de : Mme Marie-Hélène Aubert
Eure-et-Loir (4e circonscription) - Radical, Citoyen et Vert

Question posée en séance, et publiée le 22 décembre 1999

M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Aubert.
Mme Marie-Hélène Aubert. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement. Elle concerne le naufrage du navire Erika et la marée noire qui menace. Comme toujours en de pareilles circonstances, la dilution des responsabilités est «totale», si je peux me permettre. (Sourires.) Entre l'affréteur, l'armateur, le capitaine, l'Organisation maritime internationale, l'Etat, la compagnie pétrolière, ce n'est la faute de personne et c'est la faute de tout le monde, voire la faute à pas de chance. Au nom du principe de responsabilité, cher aux Verts, nous refusons l'invocation de cette prétendue fatalité, qui fait silence sur les véritables responsables et coupables. S'en tenir, comme on l'entend partout, à la mise en valeur du courage et de l'héroïsme, certes bien réels, des secours n'est pas une réponse suffisante pour éviter que ne se renouvellent de telles catastrophes. Il faudra bien répéter encore et toujours les mêmes questions - auxquelles vous n'avez que partiellement répondu, monsieur le ministre - jusqu'à ce qu'elles trouvent une réponse précise et concrète.
L'entreprise TotalFina n'est-elle pas responsable du pétrole qu'elle exploite et transporte, du gisement à la pompe ? Que fait-elle aujourd'hui pour assumer concrètement ses responsabilités, alors qu'elle dispose de moyens considérables, bien plus considérables que ceux des pêcheurs ou ostréiculteurs ? Pourquoi le capitaine du navire est-il, lui, incarcéré, alors que son équipage est sauf et que sa mise en liberté n'entraverait pas l'établissement des responsabilités ? Que fait le Gouvernement pour veiller à ce que les compagnies pétrolières françaises, qui ne seront peut-être bientôt plus qu'une, respectent les engagements contenus dans les grandes conventions internationales sur les risques de pollution maritime par les hydrocarbures ? Enfin, quelles initiatives comptez-vous prendre avec nos partenaires européens pour que, d'une part, il ne soit plus possible d'utiliser des navires en mauvais état, lesquels obtiennent bizarrement les certificats demandés sous pavillon de complaisance - et à cet égard, l'échéance de 2008 ou de 2010 que vous nous proposez nous paraît beaucoup trop lointaine - et, d'autre part, pour augmenter le nombre et la formation des inspecteurs et améliorer les techniques de lutte contre les marées noires ? Sur toutes ces questions, monsieur le ministre, nous attendons des réponses précises. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, et sur divers bancs du groupe socialiste et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Madame la députée, pour le Gouvernement comme pour vous, il est hors de question d'invoquer «la faute à pas de chance». Le Parlement a créé un bureau d'enquête accidents qui a été diligenté aussitôt après le naufrage. Cette enquête technique et administrative est en cours. Il y a, d'autre part, une enquête judiciaire. Les responsabilités seront ainsi déterminées et tout le monde sera appelé à assumer les siennes, de la compagnie à l'affréteur, en passant par l'armateur, et ce à tous les niveaux. Nous verrons bien quelles sont les responsabilités des uns et des autres.
Pour ce qui est de la compagnie Total Fina, elle a mis ses moyens à la disposition de ceux qui luttent contre la pollution.
Vous m'interrogez sur l'incarcération du capitaine du navire. Il s'agit là d'une décision judiciaire, qu'il ne m'appartient pas de commenter, vous le comprenez bien.
Au sujet des compagnies françaises, je suis de votre avis: non seulement elles doivent respecter, comme les autres, les réglementations internationales, ainsi que les engagements contenus dans les grandes conventions de l'Organisation maritime internationale, mais je considère qu'elles devraient donner l'exemple, vu la place qu'occupe la France et la circulation de transit très importante au large de nos côtes. Leurs navires doivent être utilisés dans les meilleures conditions de fiabilité, tant en ce qui concerne le matériel que les équipages.
L'application stricte du contrôle par tous les pays est absolument indispensable et j'ai décidé d'intervenir auprès de l'OMI pour que soient renforcées et accélérées ces procédures de réglementation.
Au plan national, il a été décidé lors de la réunion interministérielle sur la mer la création de pratiquement 150 postes, pour tenir compte de la pyramide des âges, et pour qu'au moins un navire sur quatre soit contrôlé dans les ports. Les effectifs ont déjà été augmentés en 1999 et, comme je l'ai dit tout à l'heure, ils seront doublés d'ici à 2002.
Le plus grand dispositif jamais utilisé en Europe est actuellement en oeuvre contre cette pollution. Et je pense comme vous, madame la députée, qu'il faut développer non seulement tous les éléments techniques, administratifs et réglementaires, mais aussi la recherche scientifique, tant en ce qui concerne la connaissance de l'état des navires que les moyens de lutte contre la pollution.
J'évoquerai, enfin, la question des secours. Face à un naufrage, la priorité des priorités, c'est d'éviter les pertes humaines. A cet égard, je dois saluer encore une fois le rôle joué par la marine nationale et par le CROSS, qui ont permis de sauver les vingt-six marins que comptait au total l'équipage. La deuxième priorité, c'est d'éviter que des produits polluants puissent atteindre les côtes: c'est ce que nous avons fait. Cela ne nous empêche pas, parallèlement de nous battre pour que de telles choses ne se reproduisent pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Données clés

Auteur : Mme Marie-Hélène Aubert

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Déchets, pollution et nuisances

Ministère interrogé : équipement et transports

Ministère répondant : équipement et transports

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 22 décembre 1999

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