Question au Gouvernement n° 1848 :
pouvoir d'achat

11e Législature

Question de : M. Renaud Dutreil
Aisne (5e circonscription) - Union pour la démocratie française-Alliance

Question posée en séance, et publiée le 9 février 2000

M. le président. La parole est à M. Renaud Dutreil, pour une question très courte.
M. Renaud Dutreil. Monsieur le Premier ministre, quoi qu'en disent vos ministres avec un entêtement qui ne convainc plus personne, votre politique aboutit à une réduction des gains de pouvoir d'achat auxquels les Français pourraient prétendre aujourd'hui du fait de la croissance mondiale, européenne et par conséquent française. (Rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)
M. Yves Nicolin. Il a raison !
M. Renaud Dutreil. Nous le constatons - les propos qui viennent d'être tenus nous le confirment - en vous voyant rechigner à rendre aux contribuables les impôts qu'ils ont payés et repousser cette échéance aux calendes grecques, ou du moins, aux calendes électorales.
Mais nous le voyons surtout avec les 35 heures, qui se font sur le dos du pouvoir d'achat des salariés.
M. Dominique Dord et M. Marc Laffineur. C'est vrai !
M. Renaud Dutreil. Les Français, qui ont davantage de bon sens que vous, l'ont compris. Ils voient, comme le nez au milieu de la figure, que les 35 heures, c'est le blocage des salaires.
Ouvrez les yeux ! Les salaires ont augmenté de 2 % en 1999 contre 2,5 % environ en 1998 et les prévisions pour l'an 2000 sont comprises entre 1,4 et 1,7 %. Réduction du pouvoir d'achat, vous dis-je !
Voilà à quoi on en arrive ! Plus on applique les 35 heures, moins les salaires augmentent !
C'est injuste parce qu'il fallait laisser le choix aux Français entre réduction du temps de travail et augmentation du pouvoir d'achat, dans le cadre d'une libre négociation au sein des entreprises.
C'est injuste parce que les gains de productivité très importants réalisés aujourd'hui par les entreprises auraient dû bénéficier aux salariés. Mais votre politique, conçue dans la pénurie, applique la pénurie.
M. le président. Veuillez conclure, s'il vous plaît !
M. Renaud Dutreil. Vous n'avez pas encore compris le changement qu'apporte la croissance. Encore ce matin, votre majorité a repoussé une proposition de loi sur le partage de la croissance qui était pourtant une ouverture sur la modernité.
Monsieur le Premier ministre, entre M. Zuccarelli, qui se livre à une négociation laborieuse avec les syndicats de fonctionnaires, votre majorité, qui a montré ce matin comme elle était frileuse et rétrograde, M. Sautter qui, tel Harpagon, ne cesse de répéter: «Ma cassette, ma cassette !» (Rires sur plusieurs bancs), alors que sa cassette, c'est l'argent des Français qu'il refuse de leur restituer, et Mme Aubry, qui a fait des 35 heures une monomanie, nous vous demandons simplement de rendre aux salariés le pouvoir d'achat qu'ils ont mérité en travaillant. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, pour une réponse qui devra malheureusement être très courte.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. C'est toujours un grand plaisir de voir l'opposition s'intéresser aux salaires des travailleurs (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste), alors même qu'en 1996 et 1997, la progression nette du pouvoir d'achat des salariés a été proche de zéro dans notre pays. Comme vous l'avez fort justement rappelé, monsieur le député, cette progression avoisine les 2 % en moyenne depuis trois ans. Voilà la différence entre ce qu'a fait l'actuelle opposition et ce que nous faisons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
J'ajoute que si nous n'avions pas relancé le pouvoir d'achat, et notamment celui des plus défavorisés par le transfert des cotisations vers la CSG et par l'augmentation des minima sociaux, de l'APL, de l'allocation de rentrée scolaire, etc., la consommation n'aurait pas augmenté comme elle a augmenté, et la croissance française ne serait pas aujourd'hui la première d'Europe. Avec vous, nous étions au contraire en queue de peloton, car vous aviez prélevé sur les ménages 200 milliards d'impôts et de taxes en quatre ans. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Richard Cazenave. Pour payer vos dettes !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Voilà la réalité ! Et tous les économistes s'accordent à dire que la France n'aurait pas surmonté les difficultés nées des crises asiatique et russe comme elle l'a fait si le pouvoir d'achat des Français n'avait pas soutenu la consommation interne, ce qui nous a permis d'avancer.
Puis-je me permettre de vous dire que les 160 000 emplois créés par la réduction de la durée du travail (Exclamations sur les mêmes bancs), c'est du pouvoir d'achat en plus, c'est une masse salariale qui s'accroît ! Croiriez-vous que les entreprises françaises iraient aussi bien aujourd'hui si les Français ne consommaient pas ? Et s'ils consomment c'est parce qu'ils vont beaucoup mieux, grâce à la conjoncture internationale, certes, mais aussi, j'ose le dire, grâce à la politique menée par le Premier ministre et son gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Données clés

Auteur : M. Renaud Dutreil

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique économique

Ministère interrogé : emploi et solidarité

Ministère répondant : emploi et solidarité

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 février 2000

partager