Question au Gouvernement n° 1947 :
Corse

11e Législature

Question de : Mme Catherine Tasca
Yvelines (11e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 16 mars 2000

M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca.
Mme Catherine Tasca. Monsieur le Premier ministre, depuis décembre, vous avez engagé avec les élus corses un processus sans précédent et qui a tout le soutien de la majorité. Pour la première fois depuis bien longtemps, les responsables politiques de l'île ont été incités, à votre initiative, à dialoguer. Ils ont accepté cette démarche et ils ont exprimé clairement et à visage découvert leur vision de l'avenir. C'est un tournant décisif. Chacun espère ici qu'il n'y aura pas de retour en arrière et qu'ils poursuivront tous dans cette voie, la seule acceptable, celle du dialogue démocratique. C'est l'intérêt de la République tout entière. En Corse, les jeunes, surtout, ont besoin d'être assurés de la paix et ils veulent savoir dans quel cadre s'inscrira leur avenir.
Or, le 10 mars, à l'assemblée de Corse, deux motions différentes ont été adoptées. Deux perspectives ont été tracées, deux conceptions de l'avenir de la Corse dans la République ont été envisagées, même si les deux textes comportent un certain nombre de points communs. Ce n'est donc qu'une étape.
Monsieur le Premier ministre, quelle suite comptez-vous donner maintenant à ce processus dont votre majorité souhaite vraiment la réussite ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Madame la députée, après un débat qui a duré trois mois, l'assemblée de Corse a en effet, comme j'y avais invité les élus de l'île réunis à Matignon le 13 décembre dernier, exprimé ses positions et présenté des textes. A cet égard, je ne partage pas l'analyse que j'ai lue parfois et selon laquelle l'assemblée de Corse s'en remettrait au Gouvernement. Je considère au contraire qu'elle a donné des réponses, qu'un travail de décantation politique a été opéré,...
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Un travail d'incantation plutôt !
M. le Premier ministre. ... et que celui-ci se révélera utile. Deux textes, c'est vrai, ont été adoptés: l'un à la majorité absolue avec vingt-six voix sur cinquante et une, l'autre à la majorité relative avec vingt-deux voix. Je constate d'ailleurs que quarante-six des membres de l'assemblée de Corse sur cinquante et un ont choisi de s'exprimer à travers l'un de ces deux textes.
M. Jean-Pierre Soisson. Ce n'est pas clair, je ne comprends rien !
M. le Premier ministre. Je note aussi que les élus ont choisi de ne pas émettre de vote négatif contre l'un ou l'autre texte, peut-être par respect de la position de chacun, peut-être aussi par finesse politique. En tout cas, sans doute, avec le souci qu'ainsi les deux textes, l'un à la majorité absolue, l'autre forcément avec une majorité relative, pourront être présentés au Gouvernement.
M. Bernard Accoyer. Il n'y a là rien de nouveau !
M. le Premier ministre. Ce sujet est sensible, et je remercie Mme Tasca de m'avoir interrogé. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Mesdames, messieurs les députés de l'opposition, si, comme vous l'avez fait dans le passé, vous m'aviez posé aujourd'hui une question, je vous aurais répondu. Sur ce sujet sensible, le plus important en tout cas est que les élus, qui ont débattu pendant trois mois, entendent de la part du Premier ministre un écho au travail qu'ils ont accompli.
M. Guy Hascoët. Très bien !
M. le Premier ministre. Ces deux textes présentent des différences sensibles. Vous l'avez noté, madame la députée.
M. Bernard Accoyer. Nous aussi !
M. le Premier ministre. Mais, et c'est tout aussi important, ils ont également de nombreux points communs. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Dans la nouvelle étape qui s'ouvre désormais, il me revient de prendre en compte les votes qui ont été exprimés. Je dois aussi avoir à l'esprit l'attitude que seraient susceptibles d'adopter, face à cette démarche, d'autres acteurs de la vie publique.
M. Dominique Dord. On ne comprend rien !
M. le Premier ministre. Au premier chef, le Président de la République, avec qui j'en ai d'ailleurs parlé ce matin, le Conseil constitutionnel, qui aurait à examiner des textes et, enfin, les forces politiques nationales telles qu'elles existent à l'Assemblée ou au Sénat. Par honnêteté, je ne saurais, en effet, dire aux Corses que j'ouvre une voie si je n'ai pas la conviction qu'il sera possible de conduire cette démarche à son terme.
Le moment venu, chacun aura donc à prendre ses responsabilités. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Je vais en tout cas poursuivre le dialogue engagé. C'est pourquoi je proposerai aux élus de Corse que j'avais invités le 13 décembre de me retrouver à Matignon le 6 avril prochain.
M. Lucien Degauchy. Quelle langue de bois !
M. le Premier ministre. Je souhaite que le travail qui a commencé à être effectué puisse se poursuivre dans un esprit constructif. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. On n'a rien compris !

Données clés

Auteur : Mme Catherine Tasca

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Collectivités territoriales

Ministère interrogé : Premier Ministre

Ministère répondant : Premier Ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 mars 2000

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