politique de la vieillesse
Question de :
Mme Paulette Guinchard
Doubs (2e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 29 mars 2000
M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.
Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, le vieillissement de la population préoccupe nos sociétés. Trois problèmes se posent: le financement et le niveau des retraites, la place des personnes âgées dans la société, mais aussi la prise en charge des personnes âgées que l'on appelle dépendantes. Ces problèmes sont intimement liés, mais c'est sur le dernier que je souhaite vous interroger.
La dépendance est devenue un enjeu majeur de solidarité. 1,3 million de personnes âgées sont actuellement concernées par la perte d'autonomie, en dépit de l'investissement des professionnels et surtout des familles. En effet, très nombreuses sont les familles qui sont confrontées à ces douloureuses situations et assurent seules l'accompagnement de leurs parents.
Les réponses apportées à ce problème sont aujourd'hui insatisfaisantes, tant au niveau financier qu'en termes de qualité de la prise en charge.
La prestation spécifique dépendance instaurée par le précédent gouvernement apparaît comme un échec. Elle ne bénéficie qu'à 120 000 personnes mais, surtout, elle est très inégalitaire. Fixé et servi par les conseils généraux, son montant, très insuffisant, varie notablement d'un département à l'autre, pour des situations pourtant très souvent comparables. De même, les aides apportées par les différentes caisses de retraite sont hétérogènes.
Les politiques de maintien à domicile méritent d'être réorganisées et soutenues. Les maisons de retraite, les centres de séjour manquent cruellement de moyens.
Face à ce constat, nous ne pouvons que nous réjouir des annonces du Premier ministre, qui témoignent de la volonté du Gouvernement d'agir très fermement dans ce domaine.
Madame la ministre, pouvez-vous nous renseigner sur les grandes orientations de cette réforme et, surtout, nous indiquer dans quel délai elle sera mise en oeuvre ? (Applaudissements sur divers bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Madame la députée, le Premier ministre vient de rappeler le défi que constitue, pour notre société, la prise en charge des personnes dépendantes.
Les décisions qu'il a été amené à prendre la semaine dernière ont été largement inspirées par le rapport que vous lui avez rendu sur la prise en charge des personnes âgées dépendantes. De fait, vous connaissez bien le sujet.
Vous avez dit que la prestation spécifique dépendance était un échec. C'en est effectivement un. Aujourd'hui, 120 000 personnes âgées seulement bénéficient de cette allocation, alors que 1,3 million sont au moins moyennement dépendantes. Comme vous venez de le rappeler, les niveaux d'aides sont insuffisants et extrêmement variables suivant les départements, d'où une véritable rupture d'égalité.
M. le Premier ministre a dit quels étaient les grands axes de la réforme que nous voulons mettre en place. Il s'agit de reconnaître un nouveau droit aux personnes en fonction de leur dépendance physique, psychique, en fonction de leur environnement mais aussi de leur situation financière. Ce droit doit être égal sur tout le territoire, bénéficier à davantage de personnes, notamment les personnes âgées moyennement dépendantes touchées aujourd'hui par le GIR 4. Bien évidemment, il doit s'étendre à toutes celles et tous ceux qui ont aujourd'hui des difficultés; or c'est loin d'être le cas.
Jean-Pierre Sueur travaille à la mise en place de cette nouvelle prestation. Nous avons réuni hier le comité national de gérontologie, qui a unanimement approuvé ces propositions de réforme.
Il est possible, selon moi, d'instituer un dispositif national qui n'entraîne pas de rupture d'égalité mais qui gagne, grâce à une mise en place par les départements, en proximité, en qualité de services, en coordination. Car la vraie décentralisation, c'est la proximité et la qualité.
Nous allons entamer la négociation avec les départements et avec les caisses. Mais si j'en crois nos différents interlocuteurs, le débat est aujourd'hui bien engagé. Nous espérons que le projet de loi sera prêt dans les plus brefs délais. Le Gouvernement souhaite en tout cas qu'il en soit ainsi.
Nous devons aussi trouver les moyens de renforcer les soins aux personnes âgées, comme vous l'aviez d'ailleurs rappelé dans votre rapport, madame Guinchard-Kunstler. Nous avons donc décidé de multiplier notre effort en faveur du maintien à domicile des personnes âgées avec 20 000 places de services de soins infirmiers, soit un doublement annuel pendant cinq ans.
Nous avons décidé de tripler l'effort fait sur la médicalisation des maisons de retraite pour passer, en cinq ans, de 160 000 à 200 000 lits. Cet effort représente 6 milliards de francs.
M. le président. Pouvez-vous conclure, madame la ministre, s'il vous plaît ? (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Vous avez raison ! Il faut respecter les délais. Mais c'est une question importante...
Enfin, nous allons mettre en place partout des comités de coordination gérontologique et des CLIC.
Monsieur le président, je rappellerai que c'est la semaine de la poésie. Cicéron disait, il y a déjà 2 000 ans, que le respect témoigné à la vieillesse était en proportion de la valeur morale propre à une nation. Tâchons, à cette occasion, d'élever encore la valeur morale de notre pays ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : Mme Paulette Guinchard
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Personnes âgées
Ministère interrogé : emploi et solidarité
Ministère répondant : emploi et solidarité
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 29 mars 2000