jeunesse et sports : publications
Question de :
M. François Léotard
Var (5e circonscription) - Union pour la démocratie française-Alliance
Question posée en séance, et publiée le 26 avril 2000
M. le président. La parole est à M. François Léotard.
M. François Léotard. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le Premier ministre, en vertu des responsabilités que lui confère l'article 21 de notre Constitution.
Les faits sont simples, et je les rappellerai brièvement.
Un jeune appelé à la Journée d'appel de préparation à la défense dans un régiment de l'armée de terre a exprimé récemment son étonnement quant à la nature des documents qui lui ont été remis à cette occasion. On y apprend - et je cite ce jeune garçon qui a le courage de signer sa protestation - comment avorter sans prévenir papa et maman, (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), comment occuper un logement sans payer son loyer (mêmes mouvements sur les mêmes bancs), comment faire la chasse au racisme - là, c'est très bien -, comment refuser de présenter ses papiers à un agent qui vous les demande, et j'en passe.
On y trouve aussi des opinions aussi intéressantes que celle-ci: «il faudrait supprimer le mariage pour que tous les couples soient égaux». («Oh !» sur les mêmes bancs.)
Je tiens, monsieur le Premier ministre, ce document à votre disposition. Il est édité par le ministère de la jeunesse et des sports. (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Lucien Degauchy. C'est scandaleux !
M. Charles Cova. Le ministère est infiltré !
M. François Léotard. Entre 1991 et aujourd'hui, pendant neuf années, sous l'autorité de deux Présidents de la République et sous la responsabilité de quatre gouvernements différents, notre pays a eu le courage d'envoyer en Croatie, en Bosnie, au Kosovo, plusieurs milliers de jeunes gens au nom d'une certaine conception des droits de la personne et non de leurs propres droits. Soixante-dix de ces jeunes sont morts.. ;
Un député du groupe socialiste. Amalgame !
M. François Léotard. ... entre 500 et 600 sont revenus blessés de ce qui fut une guerre, marqués profondément et durablement dans leur chair.
Ma question est donc celle-ci: n'y a-t-il pas un décalage, voire une contradiction, entre cet engagement qui honore notre pays et la façon dont votre gouvernement s'adresse aux jeunes en les flattant plus qu'en les informant ?
M. Lucien Degauchy. Oui !
M. François Léotard. Deuxièmement, si les jeunes Français ont naturellement des droits - et, bien entendu, ceux qui sont issus de l'immigration comme les autres - n'ont-ils pas aussi à entendre ce jour-là, qui sera peut-être le seul dans leur vie, qu'ils ont aussi des devoirs envers leur pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Enfin, et plus précisément, monsieur le Premier ministre, puisque vous êtes, en vertu des fonctions que vous confère l'article 21 de la Constitution, responsable de la défense nationale, vous semble-t-il utile de continuer à diffuser ce jour-là un tel document dont on peut douter qu'il réponde à l'objectif fixé par la loi de préparation à la défense ? («Très bien !» et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la défense. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Un député du groupe Démocratie libérale et Indépendants. Quelle lâcheté ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le député, je crois que vous avez bien compris quel est l'objectif principal de la Journée d'appel de préparation à la défense. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Cette journée vise à informer et à sensibiliser les jeunes à leurs responsabilités de futurs citoyens en matière de défense. (Mêmes mouvements sur les mêmes bancs.)
Vous savez très bien, puisque nombreux sont les parlementaires qui ont fait l'effort de se rendre dans les centres de JAPD, que du bon travail y est fait.
Mme Odette Grzegrzulka. Exact !
M. le ministre de la défense. Je suis sûr, monsieur Léotard, que cela a aussi été votre cas et que vous avez pu constater que, lors de cette journée, les notions de devoir, de solidarité entre l'ensemble des Français et d'engagement pour une cause nationale sont très largement abordées. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. Jean-Luc Préel. Et le document en question !
M. le président. Mes chers collègues, si vous posez des questions, essayez d'écouter les réponses qui leur sont faites. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le ministre de la défense. Ceux qui avaient voté le principe du rendez-vous citoyen avaient bien prévu que les jeunes bénéficieraient d'initiations et de transmissions d'informations très éloignées des questions de défense. Nous nous sommes concentrés, avec l'approbation de la majorité de l'Assemblée nationale, sur une journée de sensibilisation aux enjeux de défense, assortie d'une détection de l'illettrisme, question qui a d'ailleurs fait l'objet d'une unanimité. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Afin de mieux informer les jeunes, un certain nombre de documents leurs sont distribués. Celui que vous avez cité comporte, j'en conviens absolument, des mentions qui appellent des commentaires. Mais, naturellement, vous n'en avez extrait que des citations incomplètes. (Protestations sur les mêmes bancs.) Les jeunes sont en train de devenir majeurs quand ils lisent ces documents et ils savent «en prendre ou en laisser». Du reste, il ne s'agit pas d'un message de l'Etat. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants; claquements de pupitres.)
M. Jean-Luc Préel. Lamentable !
Auteur : M. François Léotard
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Ministères et secrétariats d'etat
Ministère interrogé : défense
Ministère répondant : défense
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 avril 2000