mutuelles
Question de :
M. Jacques Desallangre
Aisne (4e circonscription) - Radical, Citoyen et Vert
Question posée en séance, et publiée le 27 avril 2000
M. le président. La parole est à M. Jacques Desallangre.
M. Jacques Desallangre. Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, après la sécurité sociale, la mutualité constitue le deuxième intervenant dans la vie sanitaire et sociale des Français. Les mutuelles mettent en pratique la solidarité. Elles n'ont pas d'actionnaires à rémunérer. Or la Commission européenne presse la France de transposer en droit interne deux directives qui tendent à assimiler les mutuelles à des sociétés d'assurance. Voilà une contribution originale à l'édification de l'Europe sociale !
Si ces directives étaient intégralement appliquées, le mouvement mutualiste, ses oeuvres sociales et ses réseaux solidaires seraient à terme (Brouhaha)...
M. le président. Mes chers collègues, voulez-vous prendre place, s'il vous plaît et écouter M. Desallangre qui pose une question fort importante.
Poursuivez, monsieur Desallangre.
M. Jacques Desallangre. Si ces directives étaient intégralement appliquées, disais-je, le mouvement mutualiste, ses oeuvres sociales et ses réseaux solidaires seraient à terme condamnés au profit, à la sélection par l'argent, l'âge ou l'état de santé. Le scandaleux comportement d'AXA à l'égard des familles d'enfants handicapés est encore présent dans nos mémoires. Si le Gouvernement ne prend pas de mesures législatives pour promouvoir la mutualité, les directives européennes «fabriqueront» alors d'autres affaires AXA.
Madame la ministre, le mouvement mutualiste a manifesté récemment son inquiétude quant aux intentions du Gouvernement sur ce dossier. Quelles orientations comptez-vous fixer, et selon quel calendrier, pour assurer la stabilité et la sécurité juridique nécessaires aux mutuelles afin qu'elles poursuivent leur action au service de la solidarité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le député, vous avez raison d'insister sur le rôle irremplaçable et tout à fait particulier du mouvement mutualiste dans notre pays. Nous savons tous qu'il rassemble des milliers de militants qui ont décidé de se regrouper pour apporter des réponses aux difficultés que rencontrent nos concitoyens, notamment en matière de santé. Mais nous savons surtout, comme vous l'avez rappelé, que la mutualité est fondée sur les valeurs que sont la solidarité, la responsabilité, la démocratie et la liberté.
A ce jour, plus d'un français sur deux est protégé par les mutuelles, lesquelles gèrent 13 000 établissements sanitaires et sociaux et emploient 58 000 salariés. Il s'agit donc d'une contribution économique et sociale irremplaçable pour notre pays.
Aussi, lorsque la Commission européenne a demandé la transposition dans notre droit interne des directives auxquelles vous avez fait allusion et qui tendent à assimiler le secteur mutualiste aux sociétés d'assurance, il faut bien reconnaître que de nombreuses inquiétudes se sont fait jour, y compris dans nos rangs, pour sauvegarder le coeur des valeurs de la mutualité française et cette idée majeure qu'elle met tous les jours en pratique, à savoir que la santé n'est pas une marchandise.
Le Premier ministre a chargé Michel Roccard de mener une mission de concertation dans le dessein de faire des propositions nous permettant de respecter nos obligations communautaires, tout en garantissant les principes qui fondent l'action du mouvement mutualiste dans notre pays. M. Rocard a rendu son rapport en mai 1999, et le Gouvernement élabore actuellement un texte de loi qui sera déposé rapidement devant le Parlement. Ce projet permettra de dégager les axes d'une transposition qui ne remettra pas en cause les principes mutualistes. De la sorte, et vous avez eu raison d'insister sur ce point, monsieur le député, les mutuelles pourront poursuivre la gestion de leurs oeuvres sanitaires et sociales. Les réalisations du monde mutualiste sont très souvent exemplaires et innovantes. Elles fondent la prévention plus que tout autre. Elles pourront demeurer ainsi.
Etant donné la sensibilité de ce dossier, que nous avons trouvé en suspens en 1997 et qui comportait un risque énorme pour la survie des mutuelles, le Gouvernement a été conduit à préparer un texte pour nous mettre en conformité avec le droit communautaire, mais un texte qui soit aussi un texte d'avenir pour la mutualité, porteur de ses valeurs, mettant en place un véritable statut de l'élu mutualiste et organisant la transparence dans le fonctionnement des mutuelles, conformément à leurs valeurs démocratiques.
Des inquiétudes se sont exprimées. Mais elles relevaient davantage des incompréhensions ou des malentendus. J'ai reçu, avec Guy Hascoët, M. Davant, président de la Fédération nationale de la mutualité française, la FNMF, et je reçois cet après-midi M. Le Scornet de la Fédération des mutuelles de France, la FMF. Le président Davant a très clairement indiqué que les propositions du Gouvernement l'agréaient. Je crois finalement que la transposition de directives européennes va nous donner l'occasion deconstruire un avenir pérenne pour la mutualité et pour les valeurs qui la fondent et auxquelles nous croyons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Jacques Desallangre
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Économie sociale
Ministère interrogé : emploi et solidarité
Ministère répondant : emploi et solidarité
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 avril 2000