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Question de :
M. Dominique Baert
Nord (8e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 27 avril 2000
M. le président. La parole est à M. Dominique Baert.
M. Dominique Baert. Madame la secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation, les banques françaises fonctionnent sur le principe du «ni-ni»: ni facturation des chèques, ni rémunération des dépôts de leurs clients. Les discussions qu'elles ont conduites depuis plusieurs mois avec les consommateurs pour faire évoluer cette situation sont dans l'impasse et certains en appellent maintenant au Gouvernement. Le groupe socialiste tient à vous faire part de son extrême préoccupation. En effet, une évolution mal maîtrisée de ce dossier peut non seulement être porteuse d'exclusion pour les plus modestes de nos concitoyens, mais aussi créer une charge nouvelle pour ceux qui devraient payer leurs chèques sans bénéficier d'une confortable rémunération de leurs dépôts, parce que leur revenu est faible ou même moyen.
En matière de relations avec les banques, la gauche a toujours défendu une position d'équité et de solidarité. Rappelons la loi contre le surendettement que nous a présentée Véronique Neiertz. Rappelons l'instauration du droit au compte. Rappelons la loi contre les exclusions que nous a présentée à Martine Aubry.
Aussi vous poserai-je deux questions. Quel dispositif le Gouvernement compte-t-il prendre pour éviter que ne progresse l'exclusion bancaire ? Accepteriez-vous de réduire le délai d'interdiction bancaire, aujourd'hui fixé à dix ans ? En effet, ne plus pouvoir signer de chèque pendant dix ans, c'est se voir interdire de vivre normalement. Cela revient même, pour bon nombre de nos concitoyens, à se voir interdire de vivre, tout simplement. C'est inacceptable. Porter ce délai à moins de cinq ans nous paraît indispensable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.
Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation. Monsieur le député, vous avez eu raison de me poser cette question en ces termes, parce que les médias évoquent trop souvent le paiement des chèques - un, deux, trois, quatre ou cinq francs -, sans parler du service bancaire. Or je rappelle qu'à la demande du Premier ministre, en 1998, dans le cadre de la loi contre les exclusions, vous-même, avec Véronique Neiertz, Jean Le Garrec et d'autres, avez défendu le droit au compte pour les exclus. Un pas politique fondamental a été accompli ce jour-là.
Le droit au compte existe donc. Mais qu'en est-il du service bancaire ? Il ne faut pas se focaliser sur les chèques, car aujourd'hui le service bancaire est payant. Et certains ont encore droit au carnet de chèques - gratuit, en France depuis 1935 - mais ils n'ont pas droit à d'autres moyens de paiement, comme la carte de crédit, ils doivent payer la connexion téléphonique pour consulter leur compte, ils doivent payer pour avoir droit à plus d'un relevé de compte par mois, ils doivent payer pour régler l'eau ou l'électricité par virement. Bref, le service bancaire de base, aujourd'hui, n'existe pas.
Il faut que le débat aille au-delà du chèque payant. Il faut parler de service bancaire de base et c'est pourquoi nous avons demandé à M. Jolivet, président du comité des usagers de la banque, avec l'ensemble des associations de consommateurs, de tenter ce que nous préférons toujours, à savoir la médiation entre deux parties: la banque, entreprise privée, qui défend ses intérêts, d'une part, et les consommateurs, qui défendent l'ensemble des citoyens, d'autre part.
Ces négociations ont échoué essentiellement sur un mot, me semble-t-il: faut-il un service de base gratuit pour les plus démunis, pour ceux dont les revenus sont équivalents au RMI ou en tout cas inférieurs au SMIC, ou bien faut-il un service universel de base ?
Au vu du rapport Jolivet, le Gouvernement saura tirer les conséquences de tous les arguments avancés et trouver la meilleure solution, avant tout pour les plus défavorisés.
En revanche, vous avez raison, on a oublié de parler des dates de valeur. Cela dit, un pas a été franchi et je pense que nous allons enfin obtenir que la date de valeur coïncide avec la date de dépôt.
Mme Véronique Neiertz. Très bien !
Mme la secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation. Nous avons aussi oublié de parler des pénalités pour chèque sans provision. Or, il me semble fondamental qu'elles soient revues lorsque de tels chèques sont émis de bonne foi, par exemple le 30 du mois, avant le virement du salaire qui peut avoir lieu cinq jours plus tard.
Mme Véronique Neiertz. Très bien !
Mme la secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation. Enfin, s'agissant des interdits bancaires, il faut absolument s'adresser à Mme la garde des sceaux, à la chancellerie, parce qu'il ne faudrait pas que, au nom des exclus - deux millions de personnes font aujourd'hui l'objet d'un interdit bancaire, c'est beaucoup ! - puisse s'opérer petit à petit un glissement d'un comportement de bonne foi chez des personnes en grande difficulté qui peuvent revenir à meilleure fortune vers un comportement frauduleux.
M. Jean-Paul Charié. Très bien !
Mme la secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation. Nous devons faire confiance à notre justice pour élargir la gamme des réponses, notamment en faveur des jeunes qui représentent une part importante des deux millions d'interdits bancaires. En effet, les jeunes de moins de vingt-cinq ans sont souvent concernés par le surendettement en raison de la prolifération des cartes de paiement de magasins ou de structures de vente par correspondance mises à leur disposition. Voilà ce que nous voulons faire, voilà ce que nous ferons ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Dominique Baert
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Banques et établissements financiers
Ministère interrogé : PME, commerce et artisanat
Ministère répondant : PME, commerce et artisanat
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 27 avril 2000