Question au Gouvernement n° 2044 :
sécurité des biens et des personnes

11e Législature

Question de : M. Éric Doligé
Loiret (2e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 3 mai 2000

M. le président. La parole est à M. Eric Doligé.
M. Eric Doligé. Monsieur le Premier ministre, la semaine dernière vous nous avez fait un très grand numéro d'autosatisfaction.
M. Thierry Mariani. Comme d'habitude !
M. Eric Doligé. Vous nous avez dit: «Nous, nous sommes capables de régler les problèmes.» Or, c'est totalement faux, c'est un mensonge, et je vais vous le démontrer en ce qui concerne la sécurité dans ma question qui rassemble les trois groupes de l'opposition.
M. Edouard Landrain. Très bien !
M. Eric Doligé. Semaine après semaine, nous vous posons des questions sur ce sujet et, avec suffisance, il nous est répondu : «Tout va bien. Dormez tranquilles bonnes gens !» C'est faux ! Avant, seules les grandes villes étaient touchées. Aujourd'hui, le monde rural est atteint. Après les tags, chers à l'un de vos ministres, la drogue est arrivée dans pratiquement tous les établissements scolaires. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Selon les statistiques 59 % des garçons de moins de dix-huit ans et 43 % des filles ont fumé des joints (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Cest inadmissible !
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie, laissez parler M. Doligé !
M. Eric Doligé. Ca les amuse beaucoup, mais moi, en tant que père de famille, ça ne m'amuse pas du tout ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Dans les petites communes, la police et la gendarmerie travaillent bien. Elles arrêtent régulièrement les dealers, les vendeurs de drogue, ceux qui mettent le feu aux véhicules. Le seul problème, c'est que le lendemain, par laxisme du Gouvernement, les dealers, les sauvageons, les voyous sont relâchés. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Lorsqu'un père de famille nous dit que son fils s'est fait agresser dans la rue et qu'il a été recousu à l'hôpital,...
M. Christian Bourquin. La question !
M. Eric Doligé. ... on ne peut que répondre: le Gouvernement ne fait rien et ne me donne pas les moyens d'agir. C'est inadmissible. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Christian Bourquin. La question !
M. Eric Doligé. Vous pouvez toujours râler, tous les maires savent comment ça se passe dans leur commune ! La semaine dernière, c'était dans le département de M. Fromion et, hier, à Suèvres près de Blois, il y a eu une rave party où 15 000 personnes se sont réunies en toute illégalité et où l'on a constaté, bien sûr, des violences et des overdoses. Mais rien n'est fait, rien n'est dit en la matière !
J'en viens à ma question.
M. Christian Bourquin. Enfin !
M. Eric Doligé. Quand un citoyen ordinaire pourra-t-il se dire: «Cet après-midi, je peux laisser sortir ma femme ou ma fille avec son sac à main.» (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Quand pourra-t-il se dire: «Je peux laisser mon enfant aller au collège sur sa mobylette sans se faire agresser.» (Même mouvement.) Apparemment, toute la majorité trouve très bien que l'on se fasse agresser dans la rue. Moi je considère, et je pourrais vous citer des exemples personnels, que c'est insupportable et inadmissible ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Huées sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, votre question pèche soit par excès de généralité, soit par excès de précision.
M. Guy Teissier. Et le Gouvernement par excès de faiblesse !
M. le ministre de l'intérieur. Par excès de généralité, parce que nul ne peut dire que ce gouvernement fait preuve de complaisance à l'égard de la délinquance. («Si !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ce gouvernement a affirmé clairement la nécessité de la répression quand la prévention échouait. (Exclamations sur les mêmes bancs.) Et d'une répression aussi systématique que possible, à chaque délit une réponse devant être apportée.
M. Thierry Mariani. Baratin !
M. le ministre de l'intérieur. De même, ce gouvernement a affirmé qu'aucun conditionnement social ne justifiait une quelconque infraction.
M. Lucien Degauchy. Qu'est-ce que ça veut dire ?
M. Thierry Mariani. Traduction !
M. le ministre de l'intérieur. Ces affirmations de principe ont été suivies de politiques concrètes, qu'il s'agisse du développement des contrats locaux de sécurité ou de la réforme de la police de proximité.
M. Thierry Mariani. Vous répondez à côté !
M. le ministre de l'intérieur. J'en viens à votre question précise. Franchement, les rave parties sont un phénomène de société qui ne se développe pas seulement depuis le 4 juin 1997. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Les études du ministère de l'intérieur montrent qu'elles étaient déjà depuis longtemps source de préoccupations pour ses services.
Car je ne nie pas que les rave parties puissent être l'occasion de dérapages, et en tout cas de nuisances, soit par le bruit qu'elles génèrent, soit par les effets qu'elles peuvent avoir sur l'environnement. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
Je me suis saisi de ce dossier dès mon arrivée. Une circulaire interministérielle a été publiée le 29 décembre 1998, sous la signature du ministre de l'intérieur, du ministre de la culture et de la communication et du ministre de la défense, demandant que tout soit fait pour encadrer et canaliser autant que possible ces manifestations. De la sorte, si ses organisateurs sollicitent, comme nous le souhaitons, une autorisation, une commission de sécurité peut intervenir et les dispositions nécessaires peuvent être prises pour éviter les dérapages.
Maintenant, si ces manifestations sont organisées de manière clandestine, comme cela arrive malheureusement - et le cas que vous citez en est un exemple - ...
M. Eric Doligé. 15 000 clandestins !...
M. le ministre de l'intérieur. ... si ces manifestations ne sont pas déclarées, elles sont donc interdites. La police ou la gendarmerie, puisque cela se déroule plus généralement en campagne, doivent ou bien les disperser si elles le peuvent, mais c'est très difficile quand des milliers de jeunes sont rassemblés, ou bien constater les infractions commises soit à la législation sur les stupéfiants, soit au code des débits de boissons, soit simplement par manquement à la règle de l'autorisation préalable. Dans ce cas il y a des poursuites pénales, il y a une obligation de réparation, et la loi doit être appliquée.
M. Lucien Degauchy. Elle ne l'est jamais !
M. le ministre de l'intérieur. Il appartient aux élus de faire en sorte que des plaintes soient déposées, que des poursuites soient intentées et que les sanctions tombent. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

Données clés

Auteur : M. Éric Doligé

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Sécurité publique

Ministère interrogé : intérieur

Ministère répondant : intérieur

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 3 mai 2000

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