Question au Gouvernement n° 2076 :
délinquance

11e Législature

Question de : M. Pierre Cardo
Yvelines (7e circonscription) - Démocratie libérale et indépendants

Question posée en séance, et publiée le 10 mai 2000

M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
M. Pierre Cardo. Ma question s'adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mais, avant de la poser, je voudrais revenir sur la réponse du Gouvernement sur le problème des pit-bulls. Elle ne m'a pas vraiment satisfait et un certain nombre de mes collègues sont dans le même cas que moi. Je trouve assez surprenant qu'il ait fallu moins de deux mois pour publier le décret d'application sur un texte aussi complexe que le PACS (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et plus de douze mois pour faire paraître le décret d'application sur les pit-bulls et les chiens dangereux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Patrick Lemasle. Pourquoi n'avez-vous pas voté le texte ?
M. Alain Calmat. Vous avez mis vingt ans pour ne même pas voter le texte !
M. Pierre Cardo. Cher monsieur, des textes existaient avant. Il suffisait de les appliquer. («Très bien» sur plusieurs bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. Monsieur Calmat, laissez M. Cardo poser la question qu'il souhaite, sans faire de commentaires.
M. Pierre Cardo. Merci, monsieur le président.
Mme Martine David. Sans faire de commentaires, c'est difficile !
M. Pierre Cardo. Ma question porte sur la délinquance des mineurs. Depuis vingt ans, les chiffres ont explosé et le phénomène s'est amplifié. Nous sommes en présence d'une délinquance beaucoup plus forte, beaucoup plus inquiétante, beaucoup plus violente. Depuis plusieurs années, elle s'est fortement rajeunie et est marquée par un phénomène de récidive accru.
Ce phénomène de société qui nous préoccupe tous est régi par un certain nombre de procédures et de textes qui me paraissent un peu dater. L'ordonnance de 1945, par exemple, a été fort peu réformée en cinquante-cinq ans.
Selon cette ordonnance, la responsabilité pénale des mineurs ne commence qu'à treize ans. C'était valable il y a cinquante-cinq ans. Ne devrions-nous pas abaisser cet âge compte tenu de ce que nous observons aujourd'hui quotidiennement ? Cela serait peut-être une première réponse au poblème de société qui se pose à nous.
Deuxièmement, il me semble que nous ne pouvons pas déplorer le rajeunissement de la délinquance sans, à un moment ou à un autre, parler de la responsabilité des parents. Sans vouloir relancer un débat qui a lieu depuis un certain temps, ne serait-il pas souhaitable de s'interroger sur les mesures dont nous disposons aujourd'hui pour mettre en oeuvre cette responsabilité ? Peut-on croire un seul instant que nous réglerons ce problème sans les parents ?
Les sanctions prévues dans le code pénal, à savoir deux ans de prison et 100 000 francs d'amende, ne nous paraissent pas adaptées ! Ne faudrait-il pas prévoir des mesures intermédiaires ?
Madame la ministre, j'aimerais connaître les propositions qu'envisage, à terme, le Gouvernement dans ce domaine ? Le dernier problème (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) concerne les contrats locaux de sécurité.
M. le président. Monsieur Cardo, il ne va plus rester de temps pour la réponse !
M. Pierre Cardo. Tout est lié. Les contrats locaux de sécurité sont des lieux partenariaux pour définir les procédures. Qu'en est-il actuellement ? Est-ce réellement à nous de nous adapter aux procédures de la justice ou à la justice de s'adapter aux réalités ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. le président. Mon cher collègue, un exposé, c'est toujours très intéressant, mais dans le cadre des questions d'actualité, il faut tout de même laisser le temps au ministre de répondre !
La parole est à Mme la garde des sceaux, pour une brève réponse, malheureusement.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Ma réponse sera d'autant plus brève que, l'année dernière, à peu près à la même époque, monsieur le député, vous m'aviez déjà posé la question de la réforme de l'ordonnance de 1945. («Eh oui» ! sur les bancs du groupe socialiste.) Je le répète, le Gouvernement considère que l'ordonnance de 1945 est une bonne loi...
M. Jacques Myard. Donc tout va bien ?
Mme la garde des sceaux. ... qu'il faut, sur la base de cette loi - excellente - développer une volonté politique nouvelle et de nouveaux moyens pour mieux lutter contre la délinquance inquiétante, en effet, de jeunes de plus en plus nombreux et de plus en plus jeunes, pour des actes de plus en plus graves. (Exclamations sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
Qu'a fait le Gouvernement ? («Rien !» sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
Il a d'abord défini trois axes pour sa politique, et il s'y tient.
Le premier veut que l'on apporte une réponse systématique, rapide et lisible à chaque acte de délinquance commis par des mineurs. («C'est faux !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) A cet effet, j'ai adressé aux parquets deux circulaires, en juillet 1998 et à l'automne 1999. Aujourd'hui, dans leur quasi-totalité, ils traitent la délinquance des mineurs en temps réel. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Deuxième axe, il fallait organiser une coproduction entre l'ensemble des services administratifs de l'Etat et des collectivités locales car la lutte contre la délinquance ne peut être que coordonnée dans des projets territorialisés; c'est le sens des contrats locaux de sécurité dont plusieurs centaines ont été signés. Le ministre de l'intérieur et moi, nous y sommes très attentifs.
Enfin, le troisième axe consiste à agir sur l'environnement des jeunes: responsabiliser les parents («Comment ?» sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance) qu'il faut aider à assumer ces responsabilités («Comment ?» sur les mêmes bancs), aider l'école à mieux remplir son rôle de prévention et, bien entendu, améliorer l'accès à l'emploi.
M. Jacques Myard. C'est du pipeau !
Mme la garde des sceaux. Quant aux moyens, ce gouvernement a fait des efforts sans précédent. Nous avons créé, en 1998 et 1999, pour la protection judiciaire de la jeunesse, 250 postes, c'est-à-dire plus que pendant les dix années précédentes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Nous avons décidé, pour la période 2000-2002, de créer 1 000 postes d'éducateurs (Applaudissements sur les mêmes bancs) - c'est une décision qu'a prise le Premier ministre en conseil de sécurité intérieure - dont 680 ont été prévus dans le budget pour 2000.
M. Jacques Myard. Quels résultats ?
Mme la garde des sceaux. Nous avons également décidé la création de 50 centres de placement immédiat pour accueillir des jeunes en situation d'urgence et de 100 centres éducatifs renforcés. Enfin, depuis que nous sommes au gouvernement, le nombre des Maisons de la justice et du droit, qui permettent ce traitement rapide, en temps réel, est passé de 17 à 60. Elles seront probablement une centaine l'année prochaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Données clés

Auteur : M. Pierre Cardo

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Jeunes

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 10 mai 2000

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