Question au Gouvernement n° 2108 :
transport de fonds

11e Législature

Question de : M. Christian Estrosi
Alpes-Maritimes (5e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 18 mai 2000

M. le président. La parole est à M. Christian Estrosi.
M. Christian Estrosi. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Après quinze jours d'agonie, un convoyeur de fonds est décédé hier.
Mme Nicole Bricq. Charognards !
M. Christian Estrosi. Mes pensées se tournent d'abord vers sa famille, ensuite vers l'ensemble de ses collègues. Ce drame est particulièrement révélateur du climat d'insécurité qui n'a cessé de s'alourdir ces dernières années dans notre pays. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Les violences se généralisent, les zones de non-droit se développent et, au-delà des menaces qui pèsent sur l'ensemble de nos concitoyens, tous les jours celles et ceux qui ont à assurer la protection de nos concitoyens sont menacés, que ce soient nos gendarmes, nos policiers nationaux, nos policiers municipaux, quelquefois même nos sapeurs-pompiers, qui ne peuvent même plus entrer dans les zones de non-droit sans se faire «caillasser», et enfin les convoyeurs de fonds.
Il ne nous semble pas que les trois «mesurettes» proposées ce matin en Conseil des ministres compenseront l'absence d'un grand projet de lutte contre l'insécurité qui rétablirait la paix civile et sociale dans notre pays.
Et comme un mal ne vient jamais seul, le conflit engagé par les convoyeurs de fonds...
M. Didier Boulaud. Vous êtes contre ?
M. Christian Estrosi. ... premières victimes de cette insécurité, risque d'avoir des conséquences économiques importantes. La pénurie de billets, qui s'étend un peu partout (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), pénalise les citoyens et les commerçants. On ne peut malheureusement faire du «comonnayage» comme on fait du covoiturage.
Ma question sera double.
Quelles mesures le Gouvernement entend-il mettre en oeuvre pour que les Français puissent disposer des moyens de paiement nécessaires à leurs transactions courantes ?
La sécurité étant la première des libertés, quand admettra-t-il la nécessité de mettre en oeuvre une vraie politique qui assure des garanties suffisantes aussi bien à l'ensemble des citoyens qu'à tous ceux chargés de leur protection ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, au nom du Gouvernement et, j'en suis sûr, de toute la représentation nationale, je tiens à saluer le sacrifice de ce convoyeur de fonds qui est malheureusement décédé et à exprimer à sa famille notre sympathie. (Applaudissements sur tous les bancs.)
Le métier de convoyeur de fonds est difficile, dangereux. J'ai eu l'occasion de le dire, cette profession comporte effectivement des risques, qui doivent être rémunérés à leur juste mesure. (Très bien ! sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Le problème n'est pas nouveau. J'ai avec moi un certain nombre de statistiques (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République) qui vont me permettre de vous dire ce qu'il en est exactement des attaques de fourgons blindés. En 1997: treize, en 1998: dix, en 1999: sept...
M. Jean-Michel Ferrand. Tout va bien !
M. le ministre de l'intérieur. Pour l'année 2000, nous en sommes à quatre et j'espère que nous n'irons pas au-delà.
Nous nous sommes saisis du problème dès l'an dernier. En janvier 1999, nous avons engagé une concertation avec les transporteurs de fonds, avec les syndicats. Des mesures réglementaires ont été prises. Le récent décret du 28 avril 2000 prévoit le renforcement des blindages, le port des gilets pare-balles,...
M. Arnaud Lepercq. Et quand ils attaquent au bazooka ?
M. le ministre de l'intérieur. ... une amélioration de l'armement. D'autres mesures concerneront l'interdiction du travail de nuit.
J'ai envoyé des instructions aux préfets pour que, avant la fin de mai, soient réunies les commissions départementales de sécurité des transports de fonds afin que toutes les mesures concrètes soient prises sur le terrain. Mais, pour cela, des dispositions législatives étaient nécessaires. Le projet de loi que j'ai présenté ce matin en Conseil des ministres prévoit précisément une possibilité de réglementation pour les maires en matière de stationnement et de circulation et, surtout, l'obligation pour les banques et les grandes surfaces d'aménager des «trappons», c'est-à-dire des sas, pour limiter au maximum l'insécurité au cours des transferts de fonds.
Ces dispositions étaient nécessaires, mais ce n'est qu'un aspect de la question. Car un problème social évident se pose par ailleurs. De considérables avancées ont eu lieu, sous l'égide de la médiation exercée par le ministère de l'équipement et des transports. Actuellement, le patronat propose 1 000 francs par mois. Les syndicats en réclament 1 500.
Il faut dire clairement que les donneurs d'ordres devront répercuter dans leurs prix l'augmentation des coûts normaux de rémunération du personnel affecté au convoyage des fonds. Cela dit, la décision devrait pouvoir intervenir très rapidement, comme nous le souhaitons. Pour cela, il faut exercer les pressions nécessaires.
Monsieur Estrosi, vous enfourchez régulièrement le cheval de l'insécurité. Or, la délinquance globale est contenue dans notre pays. («C'est faux !» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Les enquêtes de victimation, dont je viens d'avoir connaissance et qui sont diligentées par l'Institut des hautes études de sécurité intérieure, montrent que les Français se sentent aujourd'hui moins menacés qu'il y a une dizaine d'années. («Ce n'est pas vrai !» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Des mesures concrètes sont prises dans tous les domaines afin que les attentes de nos concitoyens trouvent des réponses au niveau de la puissance publique. Je vous invite donc à ne pas faire de démagogie sur un tel sujet ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Données clés

Auteur : M. Christian Estrosi

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Services

Ministère interrogé : intérieur

Ministère répondant : intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 mai 2000

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