Question au Gouvernement n° 2185 :
PAC

11e Législature

Question de : M. François Colcombet
Allier (1re circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 8 juin 2000

M. le président. La parole est à M. François Colcombet.
M. François Colcombet. Les élevages hors-sol, et notamment les porcheries, ont connu un grand développement, contribuant sans doute à la prospérité de notre pays. Mais depuis quelque temps, ils présentent beaucoup d'inconvénients: crises de surproduction, qu'il nous faut calmer à grand renfort d'argent public, problèmes sanitaires, et surtout début de catastrophe écologique avec l'augmentation constante de la pollution de l'eau, et donc de son prix. Le rapport sur le programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole nous apprend, en effet, qu'un bon paquet de milliards d'argent public - pris en grande partie, via les agences de bassin, dans la poche des consommateurs et non pas des pollueurs - a été englouti en pure perte. Une nouvelle loi sur l'eau s'impose, mais elle s'annonce douloureuse.
Nous serions plus crédibles envers le monde agricole si nous nous attachions davantage à ne pas faire se développer chez nos proches voisins ce que nous critiquons chez nous. L'Allemagne et l'Angleterre ont fait des efforts, mais l'Espagne pas du tout. Dans ce pays, la production vient d'augmenter de 91 %. Alors que ce sont des fonds européens, gracieusement distribués, qui ont permis de moderniser les filières, aucune des directives communautaires n'a, jusqu'à présent, été transposée en droit national ou provincial. Bien mieux, d'après un rapport récent, il n'y a ni plan d'épandage, ni contrôles sanitaires, ni contrôles en abattoir. Farines de viande suspectes, activateurs de croissance, antibiotiques, tout est bon pour diminuer les coûts. Le résultat est qu'aujourd'hui une bonne part du marché français est captif. Nos centrales d'achat, nos grandes surfaces, nos abattoirs importent viande et porcs sur pied en provenance d'Espagne.
Dernière touche au tableau de ces cochonneries (Sourires): ce ne sont pas, comme chez nous, des paysans ou des coopératives qui profitent de ce système, mais des capitaux en partie spéculatifs, certains en provenance des Etats-Unis.
Ma question est simple: au moment où la France s'apprête à jouer un rôle de premier plan en Europe, que compte faire notre Gouvernement pour protéger nos consommateurs et faire respecter les règles d'une concurrence loyale envers nos agriculteurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche pour nous dire ce qu'il fait.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Non, monsieur le député, votre question n'est pas simple, puisqu'elle est au moins triple.
La première question que vous posez porte sur la crise européenne, une crise de surproduction porcine, dont nous commençons très lentement à sortir. Il est vrai que la production porcine continue à progresser partout en Europe - sauf peut-être au Royaume-Uni - et très faiblement en France, mais il y a des pays, notamment l'Espagne, puisque vous l'avez citée, où la production continue d'augmenter dans des conditions qui ne sont pas raisonnables. Je souhaite vous dire ce que j'ai déjà dit aux organisations professionnelles agricoles et au Conseil d'agriculture européen: la France compte faire de la maîtrise de la production porcine une des priorités de sa présidence européenne. Nous disposons d'une proposition de la Commission qui va dans ce sens. Elle est encore très timide mais pour timide qu'elle soit, elle est loin de recueillir l'assentiment d'une majorité au sein du Conseil d'agriculture. Nous voulons nous battre, c'est sûr, pour maîtriser cette production afin d'éviter que des crises conjoncturelles de ce type ne se répètent dans un ou deux ans.
Votre deuxième question est de savoir comment faire pour qu'un programme aussi coûteux que le PMPOA n'ait pas entraîné tant de dépenses pour rien. D'abord, je répète devant la représentation nationale que, contrairement à ce qu'affirment certains médias - et notamment des hebdomadaires, y compris satiriques -, ce programme n'a pas coûté 15 milliards de francs à l'Etat. Car les investissements de l'Etat ne représentent qu'un sixième de cette somme, le reste ayant été payé, notamment, par les agriculteurs, en autofinancement. Quant à l'efficacité de ce programme, je vous dirai qu'il est difficile de porter un jugement sur la qualité agronomique de nos sols. Tout le monde sait que la pollution d'un sol en profondeur est un problème qui ne se règle pas du jour au lendemain. Il faut inscrire cette action dans la durée. Je ne voudrais pas balayer d'un revers de main des critiques de ce type, mais, honnêtement, quand bien même ce plan aurait été inefficace, faudrait-il en conclure que les bâtiments d'élevage ne doivent pas être mis aux normes environnementales ? Non, et je sais que vous en êtes d'accord, monsieur le député, cette mise aux normes doit être faite, même s'il faut du temps avant que ses conséquences sur la qualité des nappes phréatiques se fassent sentir.
Votre troisième question concerne les dispositions que le Gouvernement compte prendre pour mieux maîtriser les installations et les agrandissements d'élevages hors-sol, notamment porcins. Vous savez très bien, puisque cette mesure résulte d'un amendement que vous avez déposé, que, depuis la loi d'orientation agricole, ces installations et ces agrandissements sont soumis à des autorisations et à des contrôles de structures, sans limite de taille pour l'élevage porcin sur caillebotis, avec un seuil à respecter pour les autres types d'élevage.
Désormais, contrairement à un passé récent, ces installations et agrandissements sont soumis aux commissions départementales d'orientation agricole.
Enfin, nous avons donné des consignes extrêmement fermes aux préfets et aux directeurs départementaux de l'agriculture pour que ce contrôle des structures soit exercé rigoureusement.
Telles sont, monsieur le député, les réponses que je pouvais apporter à vos trois questions qui n'étaient pas si simples. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Données clés

Auteur : M. François Colcombet

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Élevage

Ministère interrogé : agriculture et pêche

Ministère répondant : agriculture et pêche

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 juin 2000

partager