personnel
Question de :
M. Didier Julia
Seine-et-Marne (2e circonscription) - Rassemblement pour la République
Question posée en séance, et publiée le 29 juin 2000
M. le président. La parole est à M. Didier Julia.
M. Didier Julia. Monsieur le ministre de l'intérieur, le 21 décembre 1997, une policière, îlotière dans un quartier en difficulté, observe de son balcon sa voiture qui a été cassée et qui est en train de brûler. Elle descend. Elle est immédiatement identifiée. Les jeunes la rouent de coups, la jettent au sol et lui prennent son arme de fonction, laquelle sera d'ailleurs retrouvée quelques semaines plus tard dans les caves d'un grand ensemble.
Votre hiérarchie félicita cette policière pour son courage et sa maîtrise d'elle-même. Malheureusement, plus tard, nous apprenions qu'un jeune s'était fait hospitaliser sous une fausse identité pour avoir reçu, par ricochet, une balle dans la fesse. Que s'était-il passé ? Peut-être un jeune a-t-il tiré ? Rien, dans l'expertise, ne permet d'établir de façon formelle que la policière a tiré avec son arme. Mais le jeune concerné, incité à cela par quelques associations, porta plainte plusieurs semaines après et la policière fut condamnée à six mois de prison ferme.
M. Jean-Paul Charié. Scandaleux !
M. Didier Julia. Mes questions sont très simples et coulent de source. Monsieur le ministre de l'intérieur, qu'allez-vous faire pour aider ce policier ? Avez-vous discuté avec votre cabinet et sa hiérarchie pour lui apporter votre concours et prendre en charge ses frais d'avocat ? Allez-vous les prendre en charge en cas d'appel ? Sinon, autant donner la consigne à vos policiers de rester chez eux, de ne pas venir en aide aux personnes en difficulté et de tourner le dos à la délinquance et à la violence ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
S'il est vrai que nous constatons parfois une fracture entre la justice et le peuple français au nom duquel elle est censée être rendue, cette fracture trouble l'image de la justice dans le pays. Elle interpelle le législateur, mais, surtout, elle est en train de réduire à néant votre politique de sécurité publique et de police de proximité. Alors, monsieur le ministre de l'intérieur, dites-moi très concrètement ce que vous allez faire («Démissionner !» et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République) pour soutenir vos représentants, dans l'intérêt de la sécurité publique et de l'ensemble des citoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, je ne manque jamais de rappeler combien la tâche de la police est difficile, et de rappeler les risques que prennent les policiers, dont plusieurs milliers sont blessés chaque année au cours de leur service. Dans votre département, pas plus tard qu'il y a deux jours, j'ai baptisé la promotion Laurent Delos, du nom du capitaine tombé en 1998 à la suite d'un incendie consécutif lui-même à un différend familial et au geste d'un forcené.
Je suis le gardien de la déontologie policière, qui est au service des policiers autant que des citoyens. Et il appartient à la police nationale, à sa hiérarchie comme à chacun de ses fonctionnaires, de l'être avec moi.
Vous avez rappelé, sous une forme qui vous appartient, certains faits, sur lesquels je n'ai pas tout à fait les mêmes informations. Quoi qu'il en soit, à la suite des véritables émeutes consécutives à la mort du jeune Bouziane, en 1997, ces faits ont donné lieu, par le tribunal correctionnel de Melun, à une condamnation allant au-delà du réquisitoire du procureur.
M. Jacques Myard. Scandaleux !
M. le ministre de l'intérieur. Cette décision appartient à la justice et il ne m'appartient de la commenter. Il est en revanche de l'appréciation du fonctionnaire, et plus précisément de Mme Debarnat, en liaison avec son conseil, de choisir de faire appel ou non de cette décision. Je crois savoir qu'elle s'apprête à le faire.
Les faits étant en relation avec l'exercice de ses fonctions, l'Etat a pris en charge les frais d'avocat de Mme Debarnat. Celle-ci a obtenu, quand elle l'a souhaité, une nouvelle affectation en Guadeloupe. Maintenant, pour le reste, vous le comprendrez, la décision appartient à la justice.
Je constate qu'à l'occasion de nos questions d'actualité, presque chaque semaine, revient une question concernant la sécurité, question qui n'est pas toujours bien fondée. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Dans le département de la Seine-et-Marne, monsieur Debré, vous qui faites la moue,...
M. Jean-Louis Debré. Oui, parce que cela concerne tout le monde !
M. le ministre de l'intérieur. ... il y avait 1 700 fonctionnaires. Et depuis trois ans que je suis en fonctions, ce département a gagné plus de 200 fonctionnaires.
M. Jean-Louis Debré. Et combien de départs à la retraite !
M. le ministre de l'intérieur. L'an dernier, la délinquance générale a été stabilisée et la délinquance de voie publique a considérablement chuté, y compris dans votre circonscription, monsieur Julia. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Vous feriez mieux, en conséquence, de choisir plus précisément les faits qui méritent d'être soulignés. Je n'ai jamais prétendu que le dossier était facile. Mais je pense qu'il n'est pas bon de mener une politique toujours teintée de catastrophisme et d'alarmisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Auteur : M. Didier Julia
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Police
Ministère interrogé : intérieur
Ministère répondant : intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 juin 2000