euro
Question de :
M. François Loos
Bas-Rhin (8e circonscription) - Union pour la démocratie française-Alliance
Question posée en séance, et publiée le 19 octobre 2000
M. le président. La parole est à M. François Loos.
M. François Loos. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances et je la pose au nom des trois groupes de l'opposition, RPR, DL et UDF. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Elle porte sur un domaine qui va moins bien, puisqu'il s'agit de la dévaluation de l'euro.
L'euro vaut actuellement 0,85 dollar, contre 1,15 dollar environ à ses débuts. Les Français ont vu dans l'évolution du prix de l'essence la conséquence de cette dévaluation et l'extrême faiblesse des efforts du Gouvernement pour en tempérer l'effet, mais le problème est encore plus grave: 25 % de dévaluation pour l'euro, notre monnaie, conçue pour être forte, stable et garantir des taux d'intérêt bas. Tel est le jugement des opérateurs économiques internationaux sur la politique européenne !
On aurait pu penser que c'était pour stimuler le commerce extérieur qu'il fallait un «coup de gonflette» monétaire. Pas du tout ! Il était excédentaire avant, avec un euro fort. Il l'est aujourd'hui beaucoup moins avec un euro faible.
Pour tenir une monnaie, la politique monétaire de la Banque centrale européenne ne suffit pas, il faut aussi une politique budgétaire et fiscale...
M. Christian Bataille. Pourquoi ne l'aviez-vous pas fait ?
M. François Loos. ... et, dans ces domaines, le Gouvernement français donne un très mauvais exemple ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
En dépit de l'embellie économique, certes plombée par les 35 heures, et le fait que les recettes fiscales continuent d'augmenter en France, les déficits demeurent très importants alors que l'Espagne, par exemple, atteint l'équilibre. Y aurait-il donc une politique budgétaire européenne limitée à l'internationale socialiste ? («Très bien !» sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Monsieur le ministre, mes questions sont simples. Le Gouvernement français, qui assure la présidence de l'Union pour six mois, ne fait rien pour l'harmonisation fiscale. Pourquoi ? S'agissant des taux d'intérêts et de l'inflation qui menace, avez-vous autre chose à proposer que l'indépendance de la banque de M. Duisenberg ? Qu'allez-vous faire si l'inflation repart ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, votre question, si je l'ai bien comprise, comporte de nombreuses facettes. Je crains, dans le temps modeste qui m'est imparti, de ne pouvoir les saisir toutes.
D'abord, il est tout à fait exact que, au cours du dernier mois, la France, comme les autres pays d'Europe, a connu une remontée assez sensible du taux d'inflation mais, après avoir fait le point avec mes collègues ministres des finances hier même à Luxembourg, je peux vous dire que, par rapport aux pays que vous avez cités, notre pays a heureusement, grâce aux efforts de tous les Français, un niveau d'inflation plus faible.
Il est vrai que, sur un plan budgétaire, l'Espagne obtient des résultats très importants...
M. Thierry Mariani. Elle ne connaît pas les 35 heures !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... mais mon homologue espagnol est convenu que, pour l'inflation, ils étaient nettement au-dessus de 3 %. Mon homologue irlandais a remarqué qu'ils étaient au-dessus de 4 % et mon homologue belge qu'ils étaient au-dessus de 3,5 %. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. Jean Auclair. Le déficit est de combien ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous avons bon espoir de voir le taux redescendre à la fin de l'année.
En ce qui concerne l'euro, en norme annuelle autour de 1,6-1,7 %, et l'an prochain encore plus bas puisque c'est le centre de votre question, il est parfaitement exact qu'il s'est affaibli depuis quelques semaines. Grâce à des interventions, la présidence française, vous pouvez le penser, ayant joué un rôle, ce qui était normal, il a pu un moment remonter, puis a connu une nouvelle faiblesse, puis une légère remontée.
Les raisons pour lesquelles l'euro est faible sont très complexes. En tout cas, et nous sommes tous d'accord, ministres des finances, sur ce point, nous avons intérêt à ce que cette monnaie soit plus forte et même nettement plus forte qu'elle ne l'est aujourd'hui. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Si c'est aussi votre avis, je m'en félicite car c'est la position de fond du Gouvernement français et de celle de mes collègues.
J'ai cru comprendre que vous faisiez allusion à «la banque de M. Duisenberg». Ce n'est pas «sa» banque et je me garderai bien de commenter telle ou telle déclaration faite par celui-ci ou celui-là. Je pense que nous avons tous intérêt à ce que l'euro soit fort. Pour que l'euro soit fort, nous avons intérêt à avoir une coordination, y compris sur le plan fiscal. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et à améliorer notre coordination économique.
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Les 35 heures !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Dernier point, puisque votre information n'est peut-être pas parfaite. Hier même, nous avons adopté en commun une directive sur la TVA qui traînait depuis six ans ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Nous avons avancé sur la directive fiscale en ce qui concerne le commerce électronique, et nous avons bon espoir de progresser, avant la fin de l'année, sur le «paquet fiscal» de Feira.
Voilà, monsieur le député, si vous êtes européen comme moi, des éléments suceptibles de vous rassurer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. François Loos
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Union européenne
Ministère interrogé : économie
Ministère répondant : économie
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 19 octobre 2000