Question au Gouvernement n° 2331 :
politiques communautaires

11e Législature

Question de : M. Éric Doligé
Loiret (2e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 19 octobre 2000

M. le président. La parole est à M. Eric Doligé, pour une brève question.
M. Franck Borotra. Pourquoi «brève» ? Arrêtez de donner des leçons !
M. le président. Du calme, monsieur Borotra ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Monsieur Doligé, vous avez la parole.
M. Eric Doligé. Monsieur le président, je pense que cela ne vous gênera pas que je pose ma question au nom des trois groupes RPR, UDF et DL (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste), auxquels je suis certain que beaucoup d'autres groupes aimeraient s'associer.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Tiberi, par exemple !
M. Eric Doligé. Hier, à propos de la baisse de la TVA sur la restauration traditionnelle (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), notre collègue Dominique Dord a brillamment mis en évidence qu'il y avait deux Laurent Fabius - nous venons d'ailleurs d'en voir un troisième.
Le premier, du haut de son perchoir, estimait nécessaire l'application de la TVA à 5,5 % dans la restauration.
Le second, de sa forteresse de Bercy, s'abrite derrière la directive TVA pour ne rien faire. C'est ce que nous a expliqué M. Pierret, hier.
Comptez-vous être également conservateur, monsieur le ministre, sur le dossier du prix des carburants, premier sujet de mécontentement de nos concitoyens, comme de l'ensemble des Européens ?
Ces prix continuent de croître et atteignent des niveaux tout à fait inacceptables, que ce soit pour les entreprises ou pour les ménages, voire les collectivités.
Alors que la fiscalité reste la composante majeure du prix des carburants, les Français attendent avec une impatience légitime que le Gouvernement baisse sérieusement les taxes, lesquelles, dois-je le rappeler, représentent près de 80 % du prix qu'ils paient, même après l'instauration de la TIPP flottante.
L'une des solutions que nous avions préconisées pour obtenir une baisse significative des tarifs était l'application du taux réduit de la TVA sur les carburants. Ainsi, sur un litre de supercarburant sans plomb à huit francs, la réduction de la TVA de 19,6 % à 5,5 % représenterait une baisse supérieure à un franc.
Comme toujours, par facilité, vous vous défaussez sur l'Europe en nous opposant la directive TVA. Dans le cadre de votre présidence du Conseil des ministres de l'économie de l'Union européenne, les Français qui nous regardent doivent savoir que vous avez pourtant le pouvoir de faire bouger les choses.
M. le Premier ministre vient de nous dire que les bonnes questions sont celles qui intéressent les Français dans leur vie de tous les jours.
M. Patrice Martin-Lalande. En voilà une !
M. Eric Doligé. Alors, je vais vous poser une bonne question («Ah !» sur les bancs du groupe socialiste): allez-vous proposer à vos collègues européens, qui ont tous à faire face au même mécontentement, une révision de cette directive permettant d'appliquer le taux réduit de la TVA aux produits pétroliers et bien sûr, ensuite, à la restauration ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, en vous remerciant de votre question, je confirme que nous avons effectivement, comme c'était notre rôle en tant que ministres des finances, représentant les gouvernements de nos différents pays, examiné la question que vous soulevez. Et nous nous sommes demandé, de façon ouverte, si, face à la hausse constatée des prix pétroliers, la bonne réponse était la baisse de la fiscalité.
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Oui !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Et la réponse unanime, alors même que les situations sont assez diverses dans les différents pays, a été de dire que telle n'était pas la voie à suivre.
M. Yves Fromion. Il faut encore l'augmenter !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Pourquoi ? Parce que tout le monde constate, dès lors que, comme c'est votre cas, l'on regarde honnêtement les choses, que, s'il y a eu une hausse massive du prix de l'essence au cours de ces derniers temps, c'est parce que les pays producteurs et les sociétés productrices ont massivement augmenté les prix. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Philippe Auberger. Et la baisse de l'euro ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. J'aimerais, mesdames, messieurs qui siégez sur les bancs de l'opposition et qui faites des gestes avec la main, que vous ne repreniez pas systématiquement les arguments des compagnies pétrolières ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Autant il est nécessaire, comme nous l'avons fait, d'écouter les demandes d'un certain nombre de professionnels et de faire ce qu'il est nécessaire de faire sur le fioul domestique ou pour telle ou telle catégorie, autant une mesure systématique de diminution de la fiscalité aboutirait exactement à l'inverse du but poursuivi. De grâce, sur ce point comme sur les autres, évitons la démagogie. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Yves Fromion. Ecoutez donc les Français !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, vous qui vous exclamez, comprenez avec moi, si possible, que si l'on branche un cordon direct entre les décisions des pays producteurs et les budgets publics, ce n'est pas trente-cinq dollars que vaudra le baril de pétrole mais soixante-dix dollars, et cela immédiatement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Yves Fromion. Ecoutez les Français !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Puisque je vois que vous vous exclamez, monsier le député,...
M. Yves Fromion. Les Français s'exclament aussi !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... je vous rappelle - mais vous le savez comme moi - qu'une baisse d'un franc sur le prix du carburant, cela représente une diminution de 50 milliards de francs des recettes fiscales.
M. Arnaud Lepercq. Vous les avez gaspillés avec les 35 heures !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Dès lors, si nous pouvions avoir cet exercice, je vous retournerais volontiers, monsieur Doligé, la question: sur quel budget proposez-vous cette diminution de 50 milliards ? Est-ce que vous proposez que le budget de l'éducation nationale soit amputé de 50 milliards ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Est-ce que vous proposez que le budget du ministère de l'intérieur soit amputé de 50 milliards ? (Mêmes mouvements sur les mêmes bancs.)
De grâce, mesdames et messieurs de l'opposition, évitez la démagogie ! Une politique d'écoute, oui ! Une politique de vérité, oui ! Ce n'est pas sur ce chemin, qui est le chemin des sociétés pétrolières, qu'on trouve la réponse à la question légitime que posent les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Où est la démagogie ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Il y a un problème qui est posé par les hausses du prix du pétrole. Ce n'est pas en baissant massivement la fiscalité qu'on le résoudra. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Arnaud Lepercq. C'est du mauvais Fabius !

Données clés

Auteur : M. Éric Doligé

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Tva

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 19 octobre 2000

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