retraites et assurance maladie maternité
Question de :
M. Patrice Carvalho
Oise (6e circonscription) - Communiste
Question posée en séance, et publiée le 25 octobre 2000
M. le président. La parole est à M. Patrice Carvalho.
M. Patrice Carvalho. Ma question, qui est double, s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Elle porte sur les retraites et la couverture maladie universelle.
En ces temps où le libéralisme rêve d'en finir avec les systèmes de retraite par répartition pour leur substituer, bien sûr, des fonds de pension, il est utile de réfléchir à l'évolution des retraites en France. Aujourd'hui, 4 millions de retraités perçoivent moins de 4 500 francs par mois pour vivre. Depuis 1993, les retraites ne sont plus indexées sur les salaires, mais sur les prix.
M. Thierry Mariani. Qu'a donc fait Mme Aubry ?
M. Patrice Carvalho. Les retraites ne sont plus calculées sur la base des vingt-cinq meilleures années d'activité, mais des dix meilleures. Alors qu'en 1980, elles étaient encore exemptes de toute cotisation sociale, elles subissent actuellement des prélèvements au titre de la CSG et du RDS à hauteur de 6,7 % des pensions du régime général de la sécurité sociale et de 16,7 % des retraites complémentaires. Les retraités ont ainsi perdu entre 17 % et 22 % de leur pouvoir d'achat dans les vingt dernières années.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, que nous examinerons après cette séance de questions, prévoit une augmentation des pensions de 2,2 %. Nous mesurons le décalage entre cette disposition et l'évolution de la situation des retraités.
M. Yves Fromion. Alors, il vous faudra voter contre au moment du vote !
M. Patrice Carvalho. Les retraités, qui ont cotisé durant toute leur vie active, ont droit à la solidarité nationale. Ils doivent, eux aussi, bénéficier de la croissance que le Gouvernement évalue à 3,3 % pour l'année prochaine. D'autant que ces retraités viennent souvent en aide à leurs enfants et petits-enfants chômeurs ou RMistes. Certes, le rapport entre actifs et retraités conduit désormais à demander à ceux-ci de se résoudre à consentir des sacrifices. C'est faire l'impasse sur les recettes nouvelles que pourrait dégager la taxation des revenus financiers dont nous savons le poids considérable qu'ils ont pris dans les ressources des entreprises.
Le Gouvernement est-il prêt à revaloriser substantiellement le pouvoir d'achat des retraités, à réindexer l'évolution des salaires, à exonérer les petites et moyennes retraites de toute contribution sociale et à réformer les pensions de réversion afin qu'elles permettent aux bénéficiaires concernés de disposer de revenus suffisants ?
En ce qui concerne la couverture maladie universelle, nous avions proposé, lors de sa discussion, que le seuil des ressources ouvrant droit à cette protection sociale s'élève à 3 800 francs. Ce chiffre n'était pas arbitraire: il est reconnu communément comme le niveau d'évaluation de la pauvreté. Le Gouvernement n'a pas voulu aller au-delà de 3 500 francs. Sa décision a aujourd'hui pour conséquence que des hommes et des femmes qui, hier, bénéficiaient de cartes de santé financées par les conseils généraux, ne peuvent bénéficier de la CMU et n'ont donc pas de protection sociale.
M. François Goulard. Vous avez raison !
M. le président. Monsieur Carvalho,...
M. Patrice Carvalho. Oui, je termine, monsieur le président. Vous reconnaîtrez tous avec moi que c'est un comble quand l'objectif même de la CMU était de permettre à tous nos concitoyens de bénéficier de la sécurité sociale ! Etes-vous prête, madame la ministre, à porter ce seuil au niveau où nous l'avions proposé ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. le président. Il vous reste très peu de temps pour la réponse, madame la ministre de l'emploi et de la solidarité !
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Compte tenu de l'heure, et parce que nous allons aborder en détail ces questions lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, je répondrai brièvement.
S'agissant de la revalorisation des pensions, le maintien du pouvoir d'achat des retraités est une priorité de ce gouvernement depuis 1998 et ce pouvoir d'achat a été maintenu.
M. Yves Fromion. Les retraités sont au courant !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Avec le PLFSS pour 2001, nous irons au-delà, puisque nous augmenterons les pensions de 2,2 %, alors que l'inflation n'est que de 1,2 %. En outre, la suppression de la CRDS pour les retraités non imposables procurera un gain de pouvoir d'achat supplémentaire de 0,5 % pour 5 millions de personnes. Au total, en quatre ans, nous aurons augmenté le pouvoir d'achat des retraites de 1,3 % pour la moitié des retraités, de 1,8 % pour ceux qui ne sont pas imposables et, pour les plus modestes, nous aurons revalorisé le minimum vieillesse de 4 %. Cette progression tranche agréablement avec les pratiques des gouvernements précédents qui, eux, avaient baissé le revenu disponible des retraités. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Pour ce qui est de la CMU, une question dont nous allons discuter bientôt en détail, le seuil de 3 500 francs par mois constitue un incontestable progrès par rapport à la moyenne de ce que donnaient les conseils généraux, qui était de 2 500 francs par mois. Le dispositif permet de couvrir 4,7 millions de personnes, soit beaucoup plus que les 2,8 millions de bénéficiaires dans l'ancien système.
Bien sûr, je comprends votre préoccupation de faire en sorte que, dans les départements qui donnaient davantage, les bénéficiaires n'y perdent pas. A cet égard, je rappelle que les caisses d'assurance maladie, grâce à la création de la CMU, pourront plus largement disposer des fonds d'action sociale. Ce sont ainsi 400 millions de francs par an qui pourront être consacrés par les caisses à l'aide aux personnes vivant dans les départements les plus généreux et qui donc y perdraient.
M. Bernard Accoyer. Et le 31 octobre, que fait-on ?
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Vous le savez, les départements ont une compétence générale, et rien ne les empêche, dans la même perspective, de maintenir des aides et même de créer un fonds d'accompagnement.
M. Bernard Accoyer. Que fait-on le 31 octobre ?
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Je crois raisonnable d'évaluer dans quelques mois les résultats de l'application du dispositif de façon à compenser, le cas échéant, les pertes par rapport à la situation antérieure. Je pense que nous avons les moyens de garantir ce résultat. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste.)
Auteur : M. Patrice Carvalho
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique sociale
Ministère interrogé : emploi et solidarité
Ministère répondant : emploi et solidarité
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 octobre 2000