Question au Gouvernement n° 2347 :
exercice de la profession

11e Législature

Question de : M. Pierre Morange
Yvelines (6e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 26 octobre 2000

M. le président. La parole est à M. Pierre Morange.
M. Pierre Morange. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité et je la pose au nom des groupes RPR, UDF et Démocratie libérale. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, sur les bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Didier Boulaud. Il manque Tiberi à votre bel ensemble !
M. Pierre Morange. Demain, l'ensemble des professionnels de santé, excédé, a décidé de mener une journée d'action «santé morte». Peut-être cette décision de dernier recours surprend-elle certains de nos concitoyens qui connaissent la conscience professionnelle et le dévouement des médecins, des infirmiers, des kinésithérapeutes, des chirurgiens-dentistes et de l'ensemble des auxiliaires médicaux qui nous entourent de leurs soins jour et nuit et malgré des conditions de travail difficiles.
C'est votre gouvernement, madame la ministre, qui accule nos professionnels de santé à cette extrémité. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Cela fait maintenant plus de trois ans que vous gérez le pays. Ne rejetez donc pas la faute sur les gouvernements antérieurs.
Quelle profession accepterait sans broncher ce que les praticiens ont subi, depuis les dernières sanctions imposées sans concertation par la Caisse nationale d'assurance maladie en août dernier ?
Le chiffrage de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, le fameux ONDAM 2000, établi en 1999 par votre ministère, s'est révélé totalement irréaliste, de l'avis même de la Cour des comptes. Il n'est pas normal que la rémunération d'un acte médical soit sans cesse remise en cause à la baisse, à tel point que les professionnels de santé travaillent chaque jour sans savoir quels seront leurs revenus le lendemain.
A titre d'exemple, le projet de soins infirmiers, mis en place par Mme Aubry, instaure le transfert d'une partie des actes dévolus aux infirmiers à des auxiliaires de vie en nombre insuffisant. Ce dispositif est d'ailleurs dénoncé par la majorité des infirmiers libéraux et va minorer considérablement leurs revenus, sans répondre aux besoins des personnes dépendantes.
Que dire des kinésithérapeutes, dont la cotation des actes est ramenée au tarif de 1997 ? C'est un recul des acquis sociaux pour toutes ces professions et la voie ouverte au rationnement des soins pour l'ensemble des Français. C'est inacceptable. (Exclamations plusieurs les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Je vous demande donc, madame la ministre, au nom de l'ensemble de mes collègues de l'opposition, RPR, UDF et DL...
M. Didier Boulaud. Et Tiberi !
M. Jérôme Lambert. Et Soisson !
M. Pierre Morange. ... d'user de votre autorité de ministre de tutelle afin d'annuler ces mesures iniques prises sous la forme d'une décote des actes basée sur le principe des lettres flottantes et sur la foi de chiffres erronés. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le député, pourquoi y a-t-il un mouvement des professionnels de santé demain ? L'origine principale réside dans les mesures d'économie prises par les caisses d'assurance maladie cet été. Or, vous savez que celles-ci sont responsables, depuis le PLFSS voté par le Parlement l'an dernier, de la fixation des honoraires des professions de santé.
Je rappelle que, parallèlement à ces mesures d'économies prises par les caisses d'assurance maladie, le Gouvernement a prévu - d'ailleurs sur proposition de ces caisses - des mesures positives à l'égard des professions de santé.
Par exemple, pour les 48 800 infirmières...
M. Maurice Leroy. ... qui sont dans la rue !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. ... nous avons décidé de consacrer 400 millions de francs à l'amélioration des prestations fournies aux personnes âgées dépendantes, ce qui représente environ 8 000 francs de plus par personne et par an. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Pour les quelque 38 000 kinésithérapeutes, nous avons également pris des actes favorables en matière de nomenclature, qui aboutissent à un coût de 800 millions de francs par an, ce qui, compte tenu d'autres mesures négatives, représente un gain net de 400 millions de francs, c'est-à-dire environ 10 000 francs par kinésithérapeute.
M. Jean-Michel Ferrand. Il faut le leur expliquer !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Je souligne en outre que les honoraires de l'ensemble des professions médicales, y compris des médecins, ont augmenté depuis 1998, après une baisse en 1996 et 1997. (Exclamations sur divers bancs.)
M. Didier Boulaud. C'était Juppé à l'époque !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Peut-être le dialogue n'a-t-il pas été suffisamment soutenu avec les professions médicales. Ce que je puis vous assurer, c'est que je reprendrai ce dialogue moi-même («Ah !» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), et ce sans attendre, c'est-à-dire dès après le vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Quant à la journée de demain, nous avons pris les mesures nécessaires pour que les soins puissent être assurés. Les hôpitaux fonctionneront, les urgences aussi et, par conséquent, la sécurité des soins sera assurée en dépit de ce mouvement. (Applaudissement sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
M. Lucien Degauchy. Je souhaite bon courage aux malades !

Données clés

Auteur : M. Pierre Morange

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Professions de santé

Ministère interrogé : emploi et solidarité

Ministère répondant : emploi et solidarité

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 octobre 2000

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