mer et littoral
Question de :
M. Didier Quentin
Charente-Maritime (5e circonscription) - Rassemblement pour la République
Question posée en séance, et publiée le 1er novembre 2000
M. le président. La parole est à M. Didier Quentin.
M. Didier Quentin. Ma question porte aussi sur cette catastrophe écologique, et je souhaite également la poser à M. le Premier ministre parce qu'elle a, à coup sûr, une dimension interministérielle, concernant tout à la fois les transports, l'environnement, la santé publique, les affaires européennes et bien d'autres domaines.
Je fais observer à M. le Premier ministre que, depuis 1981, la gauche a été au pouvoir les deux tiers du temps. Je pense donc qu'elle a sa part de responsabilités dans les défaillances que nous constatons. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Je pose ma question au nom des trois groupes de l'opposition, RPR, UDF et DL, et aussi au nom des parlementaires membres de la commission d'enquête qui avaient fait des propositions immédiates et diversifiées.
La population de notre littoral et, au-delà, toute la population française, est scandalisée par la répétition d'un tel drame. Elle est scandalisée d'apprendre que ce tanker avait été contrôlé par la société Rina de Gènes, la même qui avait inspecté le navire responsable de la marée noire; scandalisée qu'on laisse circuler en mer, aussi près de nos côtes, des navires aussi dangereux, alors que leur approche aurait dû être interdite à de tels bâtiments; scandalisée que, près d'un an après le naufrage de l'Erika, le ministre de l'équipement et des transports se contente de rappeler l'urgence de l'entrée en vigueur d'une réglementation plus contraignante en matière de sécurité du transport maritime, et de faire benoîtement remarquer dans un communiqué: «Si les mesures présentées par la France et reprises par les quinze Etats membres avaient été en vigueur, le Ievoli Sun aurait été banni des ports européens...»
Que je sache, M. Gayssot est bien le ministre qui préside le Conseil européen des ministres des transports ! («Oui, oui !» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Alors, qu'attend-il pour agir ? A-t-il au moins doublé le corps des contrôleurs, comme il s'y était engagé ?
Un tel aveu d'impuissance est inadmissible, quand on a déjà pu observer les conséquences écologiques et économiques dramatiques du naufrage précédent.
Un député socialiste. Démago !
M. Didier Quentin. C'est pourquoi, monsieur le Premier ministre, je vous demande de nous préciser la nature de la cargaison, et de nous informer sur les dangers que font courir les 4 000 tonnes de styrène dont la préfecture maritime de Brest a déclaré qu'il s'agissait d'un produit insoluble dans l'eau, très toxique, très corrosif et explosif... et probablement cancérigène.
Deuxièmement, quelles mesures immédiates comptez-vous prendre pour protéger et préserver la santé publique ?
Surtout, pouvez-vous nous confirmer les informations alarmantes, sur lesquelles M. Landrain vous a interrogé mais vous ne lui avez pas répondu, selon lesquelles ce tanker aurait été volontairement treuillé jusqu'à la fosse des Casquets ?
Autrement dit, quand la mer cessera-t-elle d'être une poubelle ?
Les Etats-Unis interdisent l'accès à leurs eaux aux bateaux n'offrant pas suffisamment de garanties. L'affaire de l'Exxon Valdes y a été réglée en six mois. Pourquoi l'Europe continue-t-elle d'être aussi permissive dans ce domaine ?
Enfin, monsieur le Premier ministre, quelles actions concrètes le Gouvernement entend-il prendre - immédiatement ! - pour assurer la crédibilité de la sécurité maritime, qui vient de sombrer avec le Ievoli Sun ? Allez-vous enfin, et immédiatement - puisque vous exercez la présidence de l'Union européenne -, convoquer un conseil des ministres européens responsables de ces questions ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat au logement.
M. Bernard Accoyer. Le Gouvernement coule !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le député, votre question a beau exprimer la position de trois groupes, elle ne vous dispense pas de respecter un minimum de vérité historique. Vous le savez très bien, au cours des années qui ont précédé l'arrivée de ce Gouvernement, les moyens de contrôle dont vous estimez qu'ils sont insuffisants ont été diminués par volonté de diminuer la fonction publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Vives protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Vous savez également que le transport maritime est foncièrement international et que, sous l'effet de cette tendance à la libéralisation (Exclamations sur les mêmes bancs) qui s'est manifestée au cours des années 90,...
Un député du groupe du Rassemblement pour la République. Ca n'a rien à voir !
M. le secrétaire d'Etat au logement. ... il s'est développé sans la régulation qui aurait dû l'accompagner. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Il s'agit donc aujourd'hui de bâtir cette régulation, et les efforts du ministre français des transports, dans le cadre de la présidence européenne, sont déterminants pour avancer dans le sens indiqué par M. le Premier ministre.
Vous avez demandé si le remorqueur avait choisi sa direction. Evidemment, puisque c'était celle d'un port qui, malheureusement, n'a pu être atteint. Il a manqué quelques heures de résistance au navire.
M. Bernard Accoyer. Nul !
M. le secrétaire d'Etat au logement. Ce navire, vous le savez, bat pavillon italien. Il est contrôlé par une société de classification italienne et il était en transit entre l'Angleterre et la Yougoslavie. Aucune escale n'était prévue dans notre pays et cette traversée ne concernait a priori en rien un intérêt national français.
Tout cela prouve bien que la réponse à cette question doit être internationale et s'appuyer sur une régulation. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste.)
M. Franck Dhersin. Ce navire a coulé en France !
Auteur : M. Didier Quentin
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Déchets, pollution et nuisances
Ministère interrogé : logement
Ministère répondant : logement
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er novembre 2000