Question au Gouvernement n° 2392 :
durée du travail

11e Législature

Question de : M. François Goulard
Morbihan (1re circonscription) - Démocratie libérale et indépendants

Question posée en séance, et publiée le 9 novembre 2000

M. le président. La parole est à M. François Goulard, à qui je demande de respecter son temps de parole. (Protestations sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. François Goulard. Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, votre prédécesseur a bloqué des mois durant les négociations et entravé l'accord intervenu entre les partenaires sociaux pour dessiner un nouvel avenir à notre régime d'assurance chômage. Elle a fini par être désavouée à la veille de son départ par le Premier ministre au prix, il est vrai, du versement d'une rançon de quelques milliards. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Pour notre part, nous considérons qu'il y a eu progrès, parce que la négociation sociale a abouti à un accord, et que tout vaut mieux que l'intervention systématique et bureaucratique de l'Etat (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. Maxime Gremetz. C'est la voix du MEDEF !
M. François Goulard. La négociation sociale pourrait aussi nous aider à résoudre un des nombreux problèmes posés par la loi des 35 heures. Certes, ce serait une solution partielle car le poids de la facture de la réduction du temps de travail demeure. Les contribuables devront bientôt débourser 100 milliards de francs par an, et les salariés voient d'ores et déjà leurs revenus bloqués. Ce problème, nouveau pour vous, ce sont les pénuries de main-d'oeuvre. Nous avions dit dès le vote de la première loi que la France risquait d'y être confrontée. Aujourd'hui, ces pénuries touchent des branches entières de notre économie, comme le bâtiment ou certaines spécialités comme l'informatique. Elles ont un coût en termes de richesse nationale. Savez-vous, madame la ministre, que, depuis un an le nombre total d'heures travaillées a baissé en France ?
Pour y remédier, il n'y a qu'une solution: introduire de la souplesse, en particulier dans le recours aux heures supplémentaires. Chacun aujourd'hui en est convaincu. Et il semble que M. Fabius, qui est le premier au sein du Gouvernement à en avoir parlé, vous en a aussi convaincue, madame la ministre. Mais se pose un problème de méthode.
Plusieurs députés socialistes. La question !
M. François Goulard. Allez-vous suivre Mme Aubry dans son autoritarisme irrépressible et décider arbitrairement ce qu'il faut retenir des propositions des partenaires sociaux ou allez-vous au contraire reconnaître aux partenaires sociaux, qui sont les premiers intéressés et qui connaissent le terrain, le droit de décider eux-mêmes des aménagements au terme d'accords collectifs ?
C'est à votre attitude face à ce sujet extrêmement important que nous verrons quel prix vous accordez à la négociation sociale et quel rôle vous voulez bien reconnaître aux partenaires sociaux dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. Jean-Claude Lefort. Quelle est la question ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le député, vous venez de faire, une fois de plus, la démonstration de votre esprit de nuance ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) Inutile de le préciser, je récuse totalement l'interprétation que vous donnez de l'attitude de Martine Aubry dans la négociation sur l'UNEDIC. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) A un moment donné, cette négociation a comporté des clauses inacceptables pour l'ensemble du Gouvernement, ce qui a motivé une lettre conjointe de Martine Aubry et de Laurent Fabius. Il y a eu ensuite des améliorations significatives auxquelles Martine Aubry a fortement contribué car elle a aidé jusqu'au bout au rapprochement des points de vue.
M. Arnaud Lepercq. Taratata !
M. François Goulard. Le décret était prêt !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. S'agissant des 35 heures, monsieur le député, ne cédez pas à la caricature. N'attribuez pas à la réduction du temps de travail la responsabilité des difficultés de recrutement. Elles ont toujours existé dans notre pays,...
M. Christian Bergelin. C'est faux !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. ... en particulier dans les secteurs où l'on travaille tard le soir ou le week-end, et qui sont évidemment moins attractifs que d'autres. Il n'est pas anormal qu'elles soient aujourd'hui accentuées par la reprise de la croissance, par la diminution du chômage et par une plus grande exigence des demandeurs d'emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Je préfère, moi, traiter cette question importante avec un esprit constructif, en évitant la caricature. Nous devons d'abord prendre acte du fait que 40 % des entreprises de moins de vingt salariés sont déjà passées aux 35 heures, ce qui prouve bien que, pour beaucoup de petites entreprises, la réduction du temps de travail est attractive.
Plusieurs députés du groupe Démocratie libérale et Indépendants. C'est faux !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Quant aux autres, nous devons naturellement apaiser leurs inquiétudes en leur montrant que la loi offre certaines souplesses et ménage des périodes d'adaptation. Elle permet également aux entreprises qui peuvent prouver qu'elles connaissent des difficultés de recrutement de recourir de façon régulière aux heures supplémentaires sans renoncer aux allégements de charges.
M. Michel Meylan. Et les salaires gelés ?
La loi n'est donc pas un couperet. Elle comporte de nombreuses dispositions de nature à aider les entreprises. Je rappelle, en outre, que l'Etat finance des aides au conseil, qui ont déjà bénéficié à 11 000 entreprises du bâtiment et de l'artisanat.
Alors, je le répète, évitons les caricatures ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Faisons en sorte de résoudre les problèmes tels qu'ils se présentent dans la réalité et non pas tels qu'une approche idéologique conduit à les considérer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Maxime Gremetz. Appliquons la loi !

Données clés

Auteur : M. François Goulard

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Travail

Ministère interrogé : emploi et solidarité

Ministère répondant : emploi et solidarité

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 novembre 2000

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