bovins
Question de :
M. Jean-Claude Lenoir
Orne (2e circonscription) - Démocratie libérale et indépendants
Question posée en séance, et publiée le 22 novembre 2000
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir.
M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le Premier ministre, je crois pouvoir parler au nom de l'ensemble des députés de cet hémicycle («Ah !» sur les bancs du groupe socialiste),...
M. Bernard Outin. Ce n'est pas sûr !
M. Jean-Claude Lenoir. ... mais je suis en tout cas certain de le faire au nom des trois groupes de l'opposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
La grave crise qui affecte aujourd'hui le monde de l'élevage doit être considérée à trois niveaux: européen, économique, mais aussi moral. Aujourd'hui, l'Europe agricole a marqué ses limites. La France est présentée comme une pestiférée. Son boeuf est suspect du fait même qu'il est mieux contrôlé que d'autres.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Merci Chirac !
M. Jean-Claude Lenoir. Vous avez, monsieur le Premier ministre, avec le ministre de l'agriculture, la charge de cet important dossier. Hier, une réunion se tenait à Bruxelles. Qu'entendez-vous obtenir de nos partenaires pour assurer la cohésion et l'harmonisation des mesures de santé publique et de protection des consommateurs comme des éleveurs ?
Sur le plan économique, ce n'est pas diminuer l'importance de cette crise que la ramener au niveau de mon département qui, avec 6 000 éleveurs, est le premier département d'élevage bovin du grand Ouest. Une véritable détresse s'est aujourd'hui emparée non seulement des éleveurs, mais également de tous les acteurs de la filière bovine, qu'il s'agisse des salariés, des personnels des abattoirs, des négociants ou des bouchers. («Chirac !» sur les bancs du groupe socialiste.) Quelles mesures entendez-vous prendre au nom de la solidarité nationale pour leur permettre de faire face rapidement ? Les aides, fussent-elles importantes, ne doivent pas masquer la préoccupation des éleveurs. Ce qui compte, c'est la rapidité avec laquelle elles interviendront.
Enfin, c'est une détresse morale qui affecte aujourd'hui le monde de l'élevage. Cette crise atteint la fierté des éleveurs. Nous devons les aider à remonter une pente difficile et à retrouver foi en leur métier. Monsieur le Premier ministre, quelles perspectives, j'allais dire quelles ambitions, fixez-vous à la France pour son agriculture du XXIe siècle ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le député, vous posez trois questions: je vais m'efforcer de répondre aussi bien que possible à la première, puis j'évoquerai les deux autres sur lesquelles je reviendrai sans doute plus tard.
Hier et cette nuit jusqu'à ce matin très tôt, le Conseil agriculture s'est effectivement réuni pour faire le point sur un certain nombre de dossiers, et notamment sur la crise de la vache folle. Or cette réunion se présentait très mal pour la France. Par une sorte de paradoxe assez ahurissant, en effet, les éleveurs et les agriculteurs français se sont trouvés presque mis en cause à travers les propositions qui ont fleuri tout au long de ces dix-sept heures de négociations, alors même qu'ils consentent plus d'effort, que les autres pour assurer la qualité et la sécurité de leurs bovins. Cette réunion aurait donc pu se conclure - cela a été proposé à de nombreuses reprises - par une sorte d'embargo, partiel certes, sur le boeuf français, ce qui eût été un comble compte tenu des précautions que prend la société française dans son ensemble. Cela montre bien en tout cas le degré d'irrationalité qui préside à la gestion de cette crise dans l'ensemble de l'Europe.
Au terme de cette longue nuit de discussion, nous sommes parvenus à un certain nombre de résultats. D'abord, nous avons évité le pire, c'est-à-dire un embargo. Et, compte tenu de la manière dont les choses se présentaient, ce n'est pas si mal. Ensuite, nous avons obtenu que les délégations s'entendent sur un texte à l'unanimité pour faire prévaloir des règles communautaires, ce qui n'était pas gagné non plus. Enfin, et c'était fondamental mais pas facile à obtenir non plus, nous avons décidé d'étendre le programme de tests au niveau européen, ce que la France demandait depuis plusieurs mois. Cette extension sera mise en oeuvre en deux étapes: la première à partir du 1er janvier 2001, la seconde au 1er juillet 2001.
Nous avons donc obtenu toutes ces avancées ainsi que d'autres, plus timides, je le reconnais. C'est le cas, par exemple, s'agissant de la définition d'un plan pour les protéines végétales au niveau européen. Une mission a été confiée à ce titre à la Commission, qui devra y revenir dans les prochaines semaines. De même, le Gouvernement considère que nous avons insuffisamment avancé sur le dossier de l'interdiction des farines animales, dont la France souhaitait l'extension au niveau européen. Là, c'est le comité scientifique directeur qui est chargé d'une mission.
Vous le voyez, le bilan est mitigé. Mais compte tenu de la manière dont les choses se présentaient et des quelques avancées que nous avons obtenues, notamment sur les tests, ceux-ci étant indispensables pour faire la transparence sur la réalité de cette épidémie en Europe,...
M. Christian Jacob. Pourquoi cela était-il impossible il y a trois semaines ?
M. le ministre de l'agriculture et de la pêche. ... ce conseil n'aura finalement pas été inutile.
Quant aux mesures que nous devons prendre au niveau national, j'y reviendrai tout à l'heure. Elles ont été annoncées ce matin et représentent un effort de solidarité considérable du Gouvernement à l'égard de la filière bovine. Après le début de la crise, nous avons mis trois semaines pour arrêter ce plan. En 1996, il avait fallu trois mois pour définir un plan comparable. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Nous n'avons donc pas tardé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste.)
Auteur : M. Jean-Claude Lenoir
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Élevage
Ministère interrogé : agriculture et pêche
Ministère répondant : agriculture et pêche
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 22 novembre 2000