Question au Gouvernement n° 2442 :
génétique

11e Législature

Question de : M. André Aschieri
Alpes-Maritimes (9e circonscription) - Radical, Citoyen et Vert

Question posée en séance, et publiée le 29 novembre 2000

M. le président. La parole est à M. André Aschieri.
M. André Aschieri. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la justice.
Le 30 juillet dernier, la France devait intégrer dans son droit la directive européenne 98/44 sur la brevetabilité du vivant. J'ai la conviction profonde que le génie génétique représente une révolution plus importante que celles de l'industrie, de la chimie ou même de l'informatique. Elle touche en effet le vivant, elle concerne toutes les espèces.
On constate une formidable accélération des mutations, loin de celles dues à la nature. Elle s'accompagne d'un risque très fort de marchandisation. Bien sûr, tout le monde s'accorde à reconnaître que le génie génétique est très important pour la santé, pour le traitement des maladies génétiques, pour leur prévention surtout, et peut-être aussi pour des soins individualisés. Notre responsabilité n'en est pas moins grande en ce domaine. Or, aujourd'hui, l'Office européen des brevets tente de forcer la main des Etats à la réunion de Munich et souhaite modifier la convention européenne des brevets en y intégrant la directive européenne.
Madame la ministre, quelle est la position de la France vis-à-vis de cette directive européenne et de l'action de l'Office européen des brevets ? Ne pensez-vous pas que la présidence française devrait nous permettre de déclarer solennellement que le vivant est un patrimoine inaliénable, bien commun de l'humanité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste, et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice. Votre question, monsieur le député, est essentielle. C'est vrai, nous n'avons pas traduit en droit français la directive que vous évoquez, parce que - le Premier ministre l'expliquait ce matin, mon collègue Schwartzenberg le rappelait tout à l'heure - nous n'acceptons pas l'idée que l'on puisse déposer un brevet du génome. Partant de ce constat, largement corroboré par le Conseil d'Etat, qui a considéré cette directive incompatible avec notre droit, par le conseil consultatif de bioéthique et par l'académie des sciences, et forts de notre conviction profonde, nous avons demandé une première explication à la commission. Il ne nous semble pas que sa réponse soit suffisante pour que nous puissions accepter la directive en question.
Nous respectons à la fois la recherche dans sa complexité, et la pression des familles et des malades, non seulement parce que nous la comprenons parfaitement mais parce que nous sommes avant tout soucieux de la dignité de l'homme et attachés à la notion de patrimoine vivant. Compte tenu de tous ces éléments, nous allons, sous l'autorité du Premier ministre, demander qu'une révision de cette directive soit ouverte, dans la négociation tout au moins. Nous ne pourrons pas, en tout cas, la transposer en l'état sans aboutir à une transcription maximaliste et mercantile - Christian Pierret connaît bien ce sujet - car cela rendrait notre avenir trop incertain et indigne de nos convictions. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Données clés

Auteur : M. André Aschieri

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Bioéthique

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 29 novembre 2000

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