avocats
Question de :
M. Maxime Bono
Charente-Maritime (1re circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 20 décembre 2000
M. le président. La parole est à M. Maxime Bono.
M. Maxime Bono. Madame la ministre de la justice, à la sortie de l'accord intervenu cette nuit, le mouvement de revendication des avocats, engagé voilà près de deux mois, vient de se terminer. Il remettait en cause le mécanisme de l'aide juridictionnelle résultant de la loi du 10 juillet 1991 qui, pour la première fois, avait établi un régime digne de ce nom en matière d'accès à la justice et d'indemnisation des auxiliaires de justice.
Soucieux d'assurer à tous une égalité d'accès au droit et à la justice, nous avons voté, ici même, des textes qui doivent la rendre plus accessible et plus proche des citoyens. L'intervention accrue des avocats dans ces procédures nouvelles en constitue un volet important. Avec l'évolution de la société, le dispositif de 1991, établi en son temps avec l'accord de la profession d'avocat, se révèle obsolète. Il crée désormais, tant pour les professionnels que pour les usagers de la justice, de réelles difficultés.
Chacun s'accorde donc à considérer qu'une refonte des mécanismes de l'aide juridictionnelle est nécessaire. Cela prendra du temps. La mise en place d'une commission de réflexion était utile et la nomination de M. Paul Bouchet garantit la qualité des propositions que nous devrions connaître à la fin du mois d'avril prochain.
Néanmoins, et parce que la profession d'avocat souffrait - du moins certains avocats qui prenaient particulièrement en charge l'aide juridictionnelle - des mesures d'urgence s'imposaient. Par vos qualités d'écoute, madame la ministre (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...
M. Jean-Claude Lenoir. Jouez violons !
M. Maxime Bono. ... vous avez permis que soit trouvée, cette nuit, une issue convenable et acceptable par tous. Pouvez-vous nous en donner la teneur ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice. («Merci pour la question ! Merci !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Jean-Pierre Soisson. C'est Noël !
M. le président. Monsieur Soisson !
Mme Marylise Lebranchu, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, nous avons abouti cette nuit à un accord que je crois très équilibré. Il convient d'ailleurs de souligner que toutes les organisations représentatives des avocats et l'ensemble de leurs institutions l'ont accepté: c'est sans doute pourquoi cet accord a été difficile à obtenir. Mais il nous semblait important, sur un dossier de ce type, d'obtenir l'unanimité, ce qui a été possible vers une heure du matin.
Cet accord est équilibré parce qu'il comprend deux grands volets.
Le premier tend à répondre, par des mesures immédiates, aux préoccupations des avocats, généralement les plus jeunes, qui prennent en charge les dossiers les plus difficiles. Il fallait en effet donner immédiatement de l'espoir non seulement à ces avocats, mais aussi et surtout, aux exclus de notre pays qui, comme l'a souligné le Premier ministre, représentent les stigmates d'une crise sociale si violente qu'ils ont besoin d'être défendus encore plus que d'autres. C'est pourquoi, notamment pour tout ce qui concerne les audiences correctionnelles, mais aussi les expulsions et les recours devant un tribunal pour enfants, nous avons doublé les indemnisations destinées aux avocats qui prendront en charge ces dossiers. En 2002 d'autres mesures seront mises en oeuvre, prévoyant une augmentation de 50 %, en particulier pour les divorces et les affaires aux prud'hommes.
Nous avons donc élaboré un programme en paliers qui doit surtout déboucher sur une autre manière de voir les choses.
L'aide juridictionnelle a été mise en place en 1991 par Henri Nallet, mais dix ans ont passé et elle n'est plus adaptée. Avec la commission Paul Bouchet nous allons écrire un nouveau chapitre de cette histoire importante de l'accès à la justice et de l'accès au droit. D'ailleurs Elisabeth Guigou et Lionel Jospin ont rendu prioritaire l'accès à la justice dans notre pays.
Il est vrai que l'accès à la justice passe par une révision totale de ce mode de prise en charge qui doit se faire sans passion, avec raison et avec méthode. Je compte sur le président Bouchet et sur ceux qui ont accepté de participer aux travaux de cette commission pour nous remettre en avril prochain un bon rapport qu'il vous appartiendra de traduire en termes législatifs. J'espère aboutir à la fin de 2001.
Cet équilibre est important parce qu'une démocratie qui se respecte et qui veut vivre longtemps doit toujours savoir armer le bras judiciaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Maxime Bono
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Professions judiciaires et juridiques
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 décembre 2000