transport de matières dangereuses
Question de :
M. Daniel Paul
Seine-Maritime (8e circonscription) - Communiste
Question posée en séance, et publiée le 25 janvier 2001
M. le président. La parole est à Daniel Paul, pour le groupe communiste.
M. Daniel Paul. Monsieur le ministre de l'équipement, des transports et du logement, un an après le naufrage de l'Erika, dont le préjudice est estimé à 6 milliards de francs, et quelques semaines après celui du Ievoli-Sun, c'est le Jessica qui s'est échoué mardi dernier au large des Galapagos. Ce naufrage est une véritable catastrophe écologique. Faut-il rappeler en effet que ce célèbre achipel classé au patrimoine de l'humanité par l'UNESCO abrite un écosystème unique au monde et un trésor mondial de la faune marine ? Sont ainsi menacés des dizaines de milliers de tortues géantes, de lions de mer, d'otaries, mais aussi des iguanes, des albatros, des frégates, des fous masqués et des fous à pattes bleues.
Nous sommes émus et surtout très inquiets. Qui pourra effectivement estimer le préjudice causé par la disparition de telles espèces si les secours déjà sur place ne peuvent leur venir en aide ? Au-delà de l'émotion, nous sommes également indignés de constater que les leçons des catastrophes maritimes qui souillent les côtes depuis de trop nombreuses années n'ont toujours pas été tirées. Les années de complaisance et de laisser-faire face aux exigences du libéralisme (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) vont laisser des traces indélébiles.
C'est en effet un cargo battant pavillon équatorien, vieux de vingt-sept ans et transportant huit cents tonnes de combustible qui est à l'origine de la lourde menace pesant aujourd'hui sur ce joyau de l'humanité.
M. Bernard Accoyer. Ce propos est honteux !
M. Daniel Paul. En outre, cette catastrophe nous conduit à nous interroger sur l'avenir même de la sécurité maritime. Alors que l'Amérique du Nord s'est dotée d'une législation qui protège ses côtes et que l'Union européenne travaille à la mise en place d'une législation protectrice, il existe un risque réel de voir les navires-poubelles, que l'hémisphère Nord va bannir de ses côtes, naviguer dans les eaux de l'hémisphère Sud.
Il faut donc que la France et l'Europe obtiennent de l'organisation maritime internationale une interdiction pure et simple de naviguer à l'encontre de tous les navires-poubelles, afin d'éviter que les mers et océans du Sud ne deviennent les poubelles des pays du Nord.
Mme Sylvia Bassot. Et la mer de Barents ? Et la mer d'Aral ?
M. Daniel Paul. Parce que la mer appartient au patrimoine commun de l'humanité, nous devons exiger que le transport de produits dangereux et polluants s'effectue partout dans la plus grande sécurité.
Ma question est donc la suivante: alors que, sous la présidence française, l'Union européenne a décidé de parler d'une seule voix, des mesures allant dans ce sens seront-elles demandées lors de la prochaine session de l'OMI au mois d'avril ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Avant de répondre à votre question, permettez-moi, monsieur le député, de vous donner une information concernant un drame qui se déroule actuellement près de nos côtes.
Un caboteur assurant la liaison Belle-Ile - Saint-Nazaire, avec un équipage de cinq hommes, a été repéré dans la matinée la coque retournée. Le CROSS d'Etel a dépêché d'importants moyens de sauvetage, navals et aériens - la vedette de la SNSM du Croisic, des hélicoptères et une équipe de plongeurs. Les opérations de perçage de la coque sont en cours, dans des conditions météorologiques très difficiles. Mais nous savons qu'il y a des survivants, car nous les entendons frapper des coups.
Mesdames, messieurs les députés, sachez que tous les moyens sont mis en oeuvre et que nous suivons l'évolution de la situation. Tout va se jouer dans les heures qui viennent. Si de nouveaux éléments d'information me parviennent, monsieur le président, je ne manquerai pas de vous les communiquer.
S'agissant du nauffrage du pétrolier Jessica au large des Galapagos, votre émotion et votre détermination sont bien compréhensibles, monsieur le député. Pour l'heure, nous ne disposons pas encore d'informations sur les causes de cet accident. Une chose est sûre: ce petit pétrolier, vieux de trente ans environ, n'aurait jamais dû utiliser cet itinéraire. Selon l'administration équatorienne, une enquête est en cours.
Vu l'état du Jessica et les décisions que nous avons prises au niveau européen, jamais ce bateau n'aurait pu naviguer sur les côtes européennes. Il n'aurait pas seulement été retenu dans nos ports, il en aurait été banni. Ainsi que vous l'avez souligné, tout cela montre bien que de nouvelles mesures doivent être prises au niveau mondial. Tel est le point de vue que nous espérons faire prévaloir à la prochaine réunion de l'OMI, qui se tiendra en avril et où les pays européens parleront d'une seule voix. Nous serons forts de l'acquis obtenu en matière de sécurité maritime lors de la présidence française.
Monsieur le député, je suis de votre avis: la recherche du prix le plus bas toujours aux dépens des équipages et de l'environnement. C'est cela qu'il nous faut changer. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Daniel Paul
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Transports par eau
Ministère interrogé : équipement et transports
Ministère répondant : équipement et transports
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 janvier 2001