Question au Gouvernement n° 2657 :
ministres

11e Législature

Question de : M. Georges Tron
Essonne (9e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 28 mars 2001

M. le président. La parole est à M. Georges Tron, pour le groupe RPR.
M. Georges Tron. Monsieur le Premier ministre, j'ai souhaité vous interroger pour que vous nous aidiez à comprendre le fond exact de votre pensée sur le cumul entre la fonction de ministre et le mandat de maire. (Exclamations et applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
En 1997, lors de votre déclaration de politique générale, vous avez tenu des propos assez clairs sur le sujet: aucun de vos ministres ne devait exercer les deux fonctions à la fois. Néanmoins, quelques jours après, de premières exceptions ont montré que le principe n'était pas intangible.
Au mois de mai 1998 - un an après - lors de la discussion du projet de loi sur le cumul des mandats, le Président de la République d'abord, l'opposition dans son ensemble ensuite, vous ont proposé une disposition interdisant ce cumul. Il nous avait alors été répondu qu'un texte serait déposé à ce sujet, mais nous n'avons rien vu venir.
Lorsque, à la fin de l'année dernière, monsieur le Premier ministre, vous vous êtes exprimé sur une grande chaîne de télévision, le principe a été quelque peu modifié. Vous avez en effet déclaré, en substance, que les doctrines n'étaient pas faites pour être appliquées de façon dogmatique. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Vous avez d'ailleurs effectivement démontré que vous n'appliquiez pas les doctrines de façon dogmatique puisque quatre de vos ministres sont maires. De plus, durant la campagne des élections municipales, vous êtes allé, ici et là en France, soutenir bon nombre de vos ministres. A ce propos nous avons tous cru comprendre que ni ceux qui étaient présents dans la salle ni vos ministres eux-mêmes n'avaient compris que vous reveniez sur la souplesse d'application de principe précédemment énoncé. Nous avons même entendu que quelques-uns de vos ministres n'étaient pas tout à fait d'accord avec ce retournement.
Monsieur le Premier ministre, les questions que j'ai envie de vous poser sont extrêmement simples: le nouveau principe que vous avez défini est-il intangible ? S'appliquera-t-il de la même façon à tous les maires ainsi qu'aux maires d'arrondissement à Paris ? Enfin, pour combien de temps sera-t-il applicable ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Monsieur le député, je dois dire que dans votre question, l'audace le dispute au paradoxe. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) En effet, reprocher au Gouvernement qui a appliqué ce principe pour la première fois de façon exemplaire...
M. Eric Doligé. Pas du tout !
M. le Premier ministre. ... de supposés manquements à une règle dont vous allez constater l'application me paraît tout de même assez singulier.
M. Eric Doligé. Vous ne l'avez pas fait !
M. le Premier ministre. Il me semble que, de votre côté, on a vu deux fois un Premier ministre être à la fois maire de la capitale pour l'un, maire de la grande ville de Bordeaux pour l'autre...
M. Georges Tron. Et Lille ?
M. le Premier ministre. ... en y ajoutant la communauté urbaine et la présidence d'un parti politique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.- «Mauroy, Mauroy !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
S'il est un gouvernement qui, avec sa majorité et son Premier ministre, a fait avancer le thème du non-cumul des mandats dans les textes comme dans l'application concrète, c'est bien celui-ci (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Michel Herbillon. C'est faux !
M. Philippe Briand. Ce sont les électeurs qui l'imposent !
M. le Premier ministre. Nous serions même allés plus loin si l'opposition nous avait accompagnée, notamment au Sénat. («Très bien !» sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Philippe Briand. Ca ne marche plus !
M. le Premier ministre. Il s'agit d'un changement profond d'attitude que nos concitoyens approuvent.
Grâce à ce même gouvernement, s'est produite, à l'occasion des dernières élections, une sorte de révolution douce puisque 47 % de femmes, c'est-à-dire quasiment la parité, ont été élues dans les conseils municipaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Naturellement, j'ai laissé les ministre libres d'être candidats...
M. Thierry Mariani. Et battus !
M. le Premier ministre. ... et ils l'ont été. Treize d'entre eux ont été élus et cinq ont été battus mais dans des villes dirigées par la droite. Ils sont partis à leur conquête entourés de militants et de citoyens, mais ils n'ont pas été élus. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Dans le Gouvernement tel qu'il est devant vous, la règle de non-cumul des mandats sera appliquée comme précédemment, voire avec davantage d'ampleur encore. (Rires et exclamations sur les bancs dugroupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Messieurs, vous avez ainsi les réponses à vos questions et je pense que vous feriez bien de vous appliquer à vous-mêmes les règles que vous nous réclamez. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe communiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Philippe Briand. Nous n'avons pas de maire qui soit ministre parmi nous !

Données clés

Auteur : M. Georges Tron

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Etat

Ministère interrogé : Premier Ministre

Ministère répondant : Premier Ministre

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 28 mars 2001

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