Question au Gouvernement n° 2701 :
agriculture

11e Législature

Question de : Mme Marie-Hélène Aubert
Eure-et-Loir (4e circonscription) - Radical, Citoyen et Vert

Question posée en séance, et publiée le 18 avril 2001

M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Aubert, pour le groupe RCV.
Mme Marie-Hélène Aubert. Ma question s'adresse à M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture, et concerne les organismes génétiquement modifiés.
La problématique des OGM s'inscrit au coeur de nos préoccupations, qu'elles soient éthiques, car le transfert de gènes permet de franchir la barrière des espèces, qu'elles concernent les limites à fixer au marché, car les OGM font l'objet de brevets qui permettent à quelques grandes multinationales d'accaparer à leur profit un patrimoine vivant qui devrait être un bien public mondial; qu'elles concernent l'industrialisation de l'agriculture et l'artificialisation croissante de notre alimentation qui induisent des risques sanitaires et écologiques d'un type nouveau et réduisent la biodiversité, ou qu'elles concernent la coopération avec les pays du Sud, pour lesquels les OGM ne constituent pas une réponse adéquate.
Conscient des inquiétudes d'une majorité de nos concitoyens et des oppositions à l'introduction d'OGM dans notre alimentation et notre environnement, soutenu par de nombreux acteurs de la société civile mobilisés tout particulièrement aujourd'hui, le gouvernement français a adopté, à juste titre, une attitude de prudence, de précaution, prônant un moratoire sur toute nouvelle mise en culture et mise sur le marché d'OGM au niveau européen.
Mais, dans le même temps, il continue à encourager des programmes comme GENOPLANTE, qui ont bien pour but de promouvoir les OGM grâce à une alliance, d'ailleurs contestable, entre fonds publics et fonds privés, et les services de l'Etat rechignent à mettre en oeuvre la transparence, pourtant inscrite dans la loi, en matière d'essais. Ainsi, les maires des communes concernées, et a fortiori leurs habitants, n'ont aucune marge de manoeuvre pour accepter ou refuser ces essais et demander des mesures de précaution, comme des serres confinées.
Sur cette question, quelle est, monsieur le ministre, la position du Gouvernement ? Quelles initiatives compte-t-il prendre pour prolonger le moratoire, le temps de mieux évaluer l'impact des OGM, à tous les niveaux, et de conduire un débat permettant enfin un choix clair ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Madame la députée, la position du Gouvernement peut se définir par une formule que j'emprunte à mon collègue le ministre de la recherche: «ni aventurisme, ni obscurantisme».
Mme Nicole Bricq. Très bien !
M. le ministre de l'agriculture et de la pêche. Pas d'aventurisme, parce qu'il n'est pas question de nous jeter à corps perdu dans l'autorisation d'OGM dont nous ne connaissons pas l'impact éventuel sur notre environnement et notre santé. A cet égard, nous sommes très réticents à l'idée d'autoriser de nouvelles variétés d'OGM sans savoir maîtriser leurs conséquences. Ainsi, le Gouvernement affiche clairement son refus de tout aventurisme.
Mais, dans le même temps, pas d'obscurantisme, parce que, précisément, si nous voulons, comme vous le disiez vous-même, connaître l'impact des OGM sur notre environnement et notre santé, il faut bien laisser la recherche se poursuivre ! Et nous avons besoin que la recherche scientifique maîtrise mieux ces phénomènes pour mieux les connaître. Il s'agit là d'une position de principe tout aussi importante à nos yeux.
Nous avons le sentiment très fort qu'empêcher les chercheurs de mener des travaux destinés à mieux connaître l'impact des OGM, y compris leurs dangers éventuels, reléverait de l'obscurantisme. Nous voulons donc que la recherche s'intensifie.
Pour ce qui est de la transparence, le Gouvernement s'est heurté à une difficulté du fait de décisions de justice qui lui demandaient de rendre publics, dans le détail, auprès des maires, les champs d'expérimentation d'OGM. Or nous savions que si nous rendions publique cette liste, ces expérimentations risquaient fort d'être détruites - certaines pratiques nous le faisaient craindre -, et nous étions donc confrontés à un problème d'ordre public. Nous avons donc consulté de nouveau la justice.
Bien évidemment, nous irons dans le sens de la transparence souhaitée par la justice. Nous ne pourrons pas y contrevenir d'une manière ou d'une autre, mais, surtout, nous souhaitons aller au bout de cette logique, en particulier, réalisant la transparence pour les consommateurs. Voilà pourquoi nous nous sommes engagés, au niveau de l'Union européenne, à mettre en place des filières labellisées, étiquetées, certifiées non-OGM - et donc aussi des filières OGM -, ce qui nous oblige à définir des seuils de présence fortuite. Nous avons commencé à le faire pour les produits de grande consommation. Nous devons le faire maintenant pour les semences. C'est un travail de grande envergure, engagé au plan européen.
Pour répondre clairement à votre question, le Gouvernement n'a pas l'intention de modifier sa position sur le moratoire, qui s'appuie sur le principe que j'ai indiqué: «ni obscurantisme, ni aventurisme». (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert).
M. Patrick Ollier. Immobilisme !

Données clés

Auteur : Mme Marie-Hélène Aubert

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Recherche

Ministère interrogé : agriculture et pêche

Ministère répondant : agriculture et pêche

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 18 avril 2001

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