croissance
Question de :
M. Marc Laffineur
Maine-et-Loire (7e circonscription) - Démocratie libérale et indépendants
Question posée en séance, et publiée le 10 mai 2001
M. le président. La parole est à M. Marc Laffineur, pour le groupe Démocratie libérale et Indépendants.
M. Marc Laffineur. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, et je la pose au nom des trois groupes de l'opposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le Premier ministre, cela fait quatre ans que vous êtes chef du Gouvernement. Vous avez bénéficié d'une croissance mondiale très forte,...
M. Lucien Degauchy. Exceptionnelle !
M. Marc Laffineur. ... exceptionnelle. Et cependant, les Français n'en ont pas profité, comme on aurait pu l'espérer. Notre pays a perdu sa place de quatrième puissance économique du monde au profit du Royaume-Uni. En termes de richesse par habitant, la France est distancée, selon Eurostat, l'institut de statistiques de l'Union européenne, puisqu'elle se place au dixième rang pour le produit intérieur brut par habitant et même au onzième si on retient le critère du pouvoir d'achat.
M. Lucien Degauchy. Beau résultat !
M. Marc Laffineur. En termes de compétitivité, la France recule. Elle se situe au vingt-cinquième rang, loin derrière les Etats-Unis mais aussi derrière l'Allemagne, le Royaume-Uni et même l'Espagne. Notre pays a reculé de trois places en un an.
En termes de croissance, la France ne fait pas la course en tête. En 2000, les USA, l'Autriche, l'Espagne, la Grèce ont fait mieux que nous.
En matière de déficits publics, la France est toujours le mauvais élève de l'Union européenne.
M. Lucien Degauchy. Bilan désastreux !
M. Marc Laffineur. Et elle reste le pays dont la pression fiscale a le plus augmenté. Les prélèvements obligatoires, c'est-à-dire les impôts que les Français paient, n'ont jamais été aussi élevés, avec 45,2 % du produit intérieur brut en 2000 et treize nouveaux impôts.
La France connaît de nouveaux plans sociaux, avec de nombreuses suppressions d'emplois. Par ailleurs, la couverture maladie universelle, les 35 heures, l'allocation personnalisée d'autonomie ainsi que les retraites ne sont pas financées.
Alors, monsieur le Premier ministre, ma question est simple. Allez-vous aider les petites et moyennes entreprises qui doivent passer aux 35 heures à la fin de l'année ? Allez-vous diminuer la pression fiscale ? Allez-vous diminuer les déficits ? Allez-vous, enfin, sauver nos retraites ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, votre question assez ramassée comporte une vérité incontestable, c'est que M. le Premier ministre est à son poste depuis quatre ans. (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Michel Hunault. Ca fait beaucoup !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Sur le reste de votre analyse, vous me permettez d'exprimer des divergences.
En ce qui concerne la croissance, personne ne peut contester que parmi les grands pays européens la France est, depuis quatre ans, celui qui a eu la croissance la plus forte. («Après l'Espagne !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
En ce qui concerne le pouvoir d'achat, à l'exception de l'année dernière - durant laquelle le pouvoir d'achat a été sérieusement amputé par la hausse massive du prix du pétrole -, les augmentations moyennes de pouvoir d'achat ont été importantes. Elles sont cette année de plus de 3 %. Elles seront l'année prochaine encore du même ordre.
M. Lucien Degauchy. Et les exclus ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. En ce qui concerne les impôts, auxquels vous vous intéressez, personne ne conteste plus sérieusement qu'il y a une diminution par rapport à ce qui était prévu (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et que cette diminution d'impôt explique en grande partie pourquoi la consommation et la demande intérieure sont si soutenues.
M. Philippe Auberger. Non !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Enfin, parce que je ne veux pas être trop long sur ce point, en ce qui concerne les déficits publics, vous vous rappelez sans doute, monsieur le député, qu'en 1997, au moment où le Gouvernement de M. Jospin est arrivé aux responsabilités, le déficit était de 284 milliards de francs. Il sera pour cette année de 186 milliards de francs. Cela fait 100 milliards de moins !
J'ajoute, car là est l'essentiel, que s'il est exact que des efforts ont été demandés aux Français, c'était avec une finalité précise: parvenir à créer des emplois. Et à cet égard, depuis quatre ans - c'est là un chiffre que vous avez omis dans votre énumération, sans doute parce qu'elle se devait d'être rapide -, plus d'un million et demi d'emplois ont été créés. Et le nombre des chômeurs, monsieur le député, a baissé d'un peu plus d'un million. Je vous rappelle, au cas où vous l'auriez oublié, que sous les gouvernements successifs de M. Balladur et de M. Juppé ce nombre avait augmenté de 261 000. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Jean-Michel Ferrand. Si cela prouve une chose, c'est qu'il vaut mieux nous succéder que vous succéder !
M. le président. Du calme, monsieur Ferrand !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Cela ne veut pas dire qu'il n'y ait pas encore de nombreuses réformes à opérer en matière de formation, en matière d'entreprise, en matière d'environnement, en matière de développement européen. Mais cela sera l'effort des mois et peut-être, nous l'espérons en tout cas, de ce côté-ci de l'hémicycle, des années qui viennent.
Je terminerai sur l'expression d'une déception. L'autre jour, feuilletant un document qui s'appelle, je crois, «Alternance 2002», où sont censées figurer les propositions de l'opposition unamime au nom de laquelle vous vous êtes exprimé, j'espérais trouver quelques idées nouvelles.
Mme Odette Grzegrzulka. Il n'y en a pas !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Mais malheureusement, je n'ai trouvé qu'un album un peu vieillissant de photos tragiquement jaunies. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Auteur : M. Marc Laffineur
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique économique
Ministère interrogé : économie
Ministère répondant : économie
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 10 mai 2001