Question au Gouvernement n° 2834 :
développement

11e Législature

Question de : M. Henri Plagnol
Val-de-Marne (1re circonscription) - Union pour la démocratie française-Alliance

Question posée en séance, et publiée le 31 mai 2001

M. le président. La parole est à M. Henri Plagnol, pour le groupe UDF.
M. Henri Plagnol. Ma question s'adresse au Premier ministre, mais, en son absence, c'est sans doute le ministre des affaires européennes qui me répondra.
Dans son discours sur l'Europe, monsieur le ministre, Lionel Jospin s'est présenté comme l'avocat d'un gouvernement politique de la zone euro. En effet, plus on va se rapprocher de l'adoption de l'euro comme monnaie unique, plus il deviendra nécessaire de rapprocher les politiques économiques des Etats membres. Pour que le discours de la France soit crédible, encore faudrait-il que les décisions de votre gouvernement soient cohérentes avec le discours. («Très bien !» sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.) Or tous les actes majeurs décidés par votre gouvernement dans le domaine économique et social sont en contradiction avec les orientations de tous nos partenaires, y compris ceux dont le gouvernement est socialiste. Pour la fiscalité, par exemple, nous sommes le dernier pays d'Europe à ne pas s'engager dans un plan de baisse massive des impôts.
M. Jean-Pierre Brard. On a raison !
M. Henri Plagnol. En matière de retraites, alors que nous sommes confrontés exactement au même défi démographique que nos voisins, nous sommes le dernier pays d'Europe à refuser le principe de l'épargne complémentaire par capitalisation pour préparer les retraites de demain. Dans le domaine des transports et de l'énergie, nos grandes entreprises - EDF, Gaz de France, SNCF - sont de plus en plus isolées car nos partenaires n'acceptent pas que nous investissions chez eux alors que nous continuons à protéger notre marché.
Ma question est simple: qui dit la vérité ? Est-ce le Premier ministre quand il s'adresse à l'opinion publique internationale et se présente comme un européen convaincu, ou l'homme de la majorité plurielle soumis au chantage grandissant de ses alliés communistes, ...
M. Jean-Pierre Brard. Jaloux !
M. Henri Plagnol. ... dont tous les choix contribuent à isoler la France de nos partenaires et à nous empêcher de mener une politique qui donne un sens concret à la volonté de faire un gouvernement économique de la zone euro ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants et sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. En l'absence de M. le Premier ministre, qui part pour l'Afrique du Sud, je réponds bien volontiers à votre question, monsieur le député, d'autant qu'elle porte beaucoup sur l'aspect économique et social.
Malheureusement pour vous, les exemples que vous prenez desservent votre thèse.
Vous surprendriez beaucoup de monde en affirmant qu'il n'y a pas en France de programme de baisse d'impôt. Vous n'êtes pas un spécialiste des finances publiques, je le sais (Rires sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance), mais vous avez tout de même dû noter, parce que vous avez exprimé un vote, que, l'an dernier, un plan de 120 milliards de baisse d'impôt sur plusieurs années a été proposé. Ce matin, nous étions en commission des finances, et vos collègues ont observé avec beaucoup de perspicacité qu'il y avait un tassement des recettes, ce qui correspond en bon français à une baisse des impôts («Non ! Pas du tout !» sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...
Bien sûr que oui !
M. Philippe Auberger. Pour un spécialiste, c'est décevant !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Chers amis députés qui protestez, vous n'avez pas été sans remarquer que, jusqu'à l'année dernière, grâce aux décisions prises par M. Juppé et M. Madelin, la TVA était à 20,6 % et qu'elle est désormais à 19,6 %. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale).
Il y a bel et bien un programme de baisse d'impôts, et je vais aggraver le cas de cette majorité et du Premier ministre: la poursuite des baisses d'impôts est programmée.
En ce qui concerne les retraites, nous avons procédé, au sein de l'Eurogroupe, à un constat sur l'ensemble des pays de la zone euro. Je le disais ce matin à vos collègues de la commission des finances, nous sommes, toute objectivité retenue, à un point moyen. Des pays sont en meilleure situation que nous. D'autres, je pense en particulier à l'Italie, sont malheureusement pour eux largement derrière nous. Personne ne conteste que des pas ont commencé d'être faits, et que d'autres devront l'être, mais je ne vois pas de contradiction entre la situation de notre pays et celle des autres pays d'Europe.
Quant à la question du service public, alors là, monsieur le député, je crains que vous ne tombiez mal. Que l'on entende ce type de propos dans la bouche d'un certain nombre de conservateurs d'autres pays, je le comprends, mais vous qui connaissez bien ces sujets, vous savez très bien qu'en ce qui concerne l'électricité, par exemple, et M. Pierret le disait encore pas plus tard qu'hier, nous avons commencé à ouvrir notre marché.
M. Jean-Jacques Jégou. Et le gaz ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. J'ai cru comprendre dans votre question, ce qui est d'ailleurs en contradiction avec celle que posait hier M. Perben, que vous regrettiez qu'une grande entreprise comme EDF puisse être présente en Italie. (Protestations sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. Henri Plagnol. Pas du tout !
M. Franck Borotra. Vous n'y connaissez rien ! C'est la réciprocité qui est en cause !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. La différence entre vous et nous, c'est que nous pensons qu'il faut soutenir nos entreprises, défendre notre service public, ce qui n'est absolument pas contradictoire avec une conception européenne.
Bref, monsieur le député, je vous rassure ou je vous inquiète: la position prise par M. le Premier ministre est parfaitement confirmée par la politique que nous menons. Nous avons une approche européenne, nous continuerons à la défendre.
M. Franck Borotra. Vous êtes à la traîne !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. J'observe, et cela n'est pas nouveau, que les conquêtes sociales de la gauche, ce sont les silences de la droite. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Huées sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Données clés

Auteur : M. Henri Plagnol

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Union européenne

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 31 mai 2001

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